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Un vote qui ne change rien?

Jusqu'à présent, la concordance a garanti la stabilité du système politique suisse. Keystone

Dans la plupart des pays démocratiques, les élections sont attendues avec impatience. En effet, elles permettent de former un nouveau gouvernement.

Ce n’est pas le cas en Suisse où les législatives de ce 19 octobre n’auront quasiment pas d’influence sur la composition du Conseil fédéral.

Lorsqu’ils s’intéressent au système politique suisse, Italiens, Français et autres Allemands ont bien de la peine à comprendre que la composition du gouvernement est restée inchangée depuis 1959.

Pratiquement partout en Europe, c’est un système d’alternance entre majorité et opposition qui est la règle. Extrêmement stable, le modèle suisse suscite beaucoup de curiosité et de surprise, quand bien même d’autres pays connaissent aussi un système de concordance.

«En Suisse, tous les grands partis restent au pouvoir après les élections, même s’ils ont perdu des voix», note Adrian Vatter, professeur de sciences politiques à l’Université de Berne.

«Ce système rend les élections suisses ennuyeuses, poursuit le professeur. Elles sont beaucoup plus intéressantes dans les pays où la composition du futur gouvernement dépend du résultat du scrutin.»

En effet, le gouvernement suisse (Conseil fédéral) n’est pas l’expression d’une majorité parlementaire élue sur la base d’un programme de gouvernement. Il est le résultat d’un accord entre les quatre principaux partis du pays.

Le peuple, juge suprême

Tous les grands partis faisant partie du gouvernement, on n’assiste pas à de grands affrontements entre majorité et opposition au sein du parlement suisse. En effet, dans la plupart des cas, les textes législatifs font l’objet d’un compromis entre la droite et la gauche.

Cette culture du consensus ne concerne d’ailleurs pas que les politiciens. Avant même de présenter un projet de loi sur une question donnée, le gouvernement prend l’avis des divers milieux concernés par le sujet via une «procédure de consultation».

Malgré la politique de consensus, il arrive que certains partis mis en minorité au Parlement ou certains cercles de la société civile estiment que leurs thèses n’ont pas suffisamment été prises en compte. Ils peuvent alors faire appel au juge suprême: le peuple.

Pour faire voter le peuple sur une loi, il faut réunir 100’000 signatures en cent jours. Au cours des dernières années, la gauche et la droite dure ont à plusieurs reprises eu recours à cet instrument politique. L’une pour mettre un frein au démantèlement social, l’autre pour s’opposer à une plus grande ouverture de la Suisse au plan international.

L’opposition, c’est le peuple

Avec un tel système politique, on peut dire qu’en Suisse, c’est au peuple qu’il revient de contrôler l’action du gouvernement. Les citoyens assument donc le rôle qui, dans d’autres pays, reviendrait à l’opposition parlementaire.

«Le contrôle se fait au travers de la démocratie directe, confirme Adrian Vatter. Le rôle d’opposant est assumé par ceux qui votent.»

Le politologue admet que, dans les autres pays, l’alternance entre majorité et opposition permet un plus grand renouvellement de la classe politique, ce qui est un point positif.

Cependant, rien ne permet de dire qu’un système d’alternance fonctionne mieux qu’un système de concordance. «Faire alterner la majorité et l’opposition ne permet pas toujours de mener une politique cohérente», relève Adrian Vatter.

En définitive, il est vrai qu’en comparaison avec d’autres pays, les élections fédérales de cet automne n’auront qu’une importance relative. Mais il est vrai aussi que, nulle part ailleurs, les citoyens n’ont autant d’influence directe sur la politique.

swissinfo, Andrea Tognina
(Traduction: Olivier Pauchard)

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