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Une Suissesse dénonce les mariages forcés

Dans certaines communautés, comme ici chez les Tsiganes, les filles sont parfois contraintes de se marier à 15 ans. Keystone

La députée démocrate-chrétienne zurichoise Rosmarie Zapfl-Helbling lance le débat au Conseil de l’Europe sur les mariages forcés.

Membre de la Commission sur l’égalité des chances de l’Assemblée de Strasbourg, elle a été chargée de rédiger un rapport sur la question.

«Chaque année, de nombreuses femmes, des jeunes filles, souvent même très jeunes, sont mariées de force. Rien ne peut justifier de tels mariages. Chacun a le droit de disposer de sa vie», a déclaré Rosmarie Zapfl-Helbling en ouvrant en début de semaine sa première audition à Anvers (Belgique).

Cette séance était organisée par la Sous-Commission sur la violence des femmes de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Des représentants d’organisations travaillant avec des victimes, des représentants des pouvoirs locaux, belges et français, ainsi que des victimes de mariages forcés ou de mariages blancs avaient été invités.

«Cette audition devait nous permettre de découvrir l’ampleur du phénomène et de déterminer des mesures à prendre pour enrayer cette pratique», explique la députée suisse.

Tous les pays d’Europe sont concernés

C’est la première fois que le Conseil de l’Europe étudie la question des mariages forcés. Membre de l’Assemblée depuis 2000, Rosmarie Zapfl-Helbling espère pouvoir présenter son rapport devant les parlementaires en juin prochain.

«Il s’agit d’un problème très important qui concerne tous les pays d’Europe», souligne la députée.

«En Suisse, on n’en parle pas, poursuit-elle, mais quand je discute avec des professeurs, tous connaissent des cas de jeunes filles mariées de force.»

Le ministère suisse de la Justice a promis à Rosmarie Zapfl-Helbling qu’il lui fournirait des chiffres pour étayer son rapport.

Le phénomène, semble-t-il, est en progression. En France, on estime à 70’000 le nombre de jeunes filles victimes de mariages forcés.

Il s’agit surtout de jeunes filles étrangères ou ayant la nationalité française, originaires du Maghreb ou de pays asiatiques comme le Pakistan ou le Sri Lanka.

Mais, souligne Rosmarie Zapfl-Helbling, il ne faut pas accuser l’Islam. «Les mariages forcés ne concernent pas que des familles musulmanes, dit-elle. D’ailleurs, l’Islam ne les préconise en rien».

Les lois ne suffisent pas

Que faire pour lutter contre ce type de mariages? Il existe des textes internationaux. Ainsi, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a édicté en mai 2002 une recommandation sur la protection des femmes contre la violence. Mais peu d’Etats l’ont appliquée à ce jour.

«Les lois ne sont pas suffisantes, s’exclame la députée, il faut avant tout sensibiliser l’opinion publique et les autorités, car le problème est méconnu. Seules les personnes engagées dans l’aide aux victimes et les jeunes filles traumatisées connaissent la question.»

Selon Rosmarie Zapfl-Helbling, les solutions passent par la prévention, l’éducation, voire la médiation avec les parents des jeunes filles concernées.

Cependant, selon plusieurs intervenants à l’audition d’Anvers, c’est surtout «la volonté politique» d’appliquer les décisions prises pour empêcher les mariages forcés qui manque.

«Il faut trouver des réponses dans nos pays», conclut la juriste suisse, qui défend depuis 40 ans les droits des femmes.

swissinfo, Barbara Speziali à Anvers

Les mariages forcés sont un fait de société qui touche l’ensemble de l’Europe.
Le Conseil de l’Europe veut en connaître l’ampleur et déterminer les mesures à lui opposer.
Rosmarie Zapfl-Helbling devrait présenter en juin prochain un rapport sur la question.
Selon la députée suisse, les solutions passent par la prévention, l’éducation, et la médiation avec les parents des jeunes filles concernées.

– Le Conseil de l’Europe est la plus ancienne organisation politique supra-nationale sur le Vieux-Continent (1949). 46 pays – dont la Suisse (1963) – en sont membres et cinq Etats ont statut d’observateur (Vatican, Etats-Unis, Canada, Japon et Mexique).

– Il est le gardien de la sécurité démocratique fondée sur les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit. En 1997, les chefs d’Etat ont adopté un plan d’action pour renforcer son travail en matière de démocratie et droits de l’homme, cohésion sociale, sécurité des citoyens, valeurs démocratiques et diversité culturelle.

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