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Davantage d’invalides psychiques à cause du stress

Toujours plus de Suisses voient leur vie assombrie par l'invalidité psychique. swissinfo.ch

Ils sont trois fois plus nombreux qu'il y a seize ans, les Suisses touchant une rente de l'assurance invalidité pour des raisons psychiques.

Le stress lié au monde du travail et aux déprimes économiques successives expliquent en grande partie cette explosion.

Les Suisses ont le blues. Le nombre d’Helvètes touchant une rente de l’assurance invalidité (AI) pour des raisons psychiques a plus que triplé en seize ans. Il est passé de 23 000 en 1986 à 73 000 en 2002.

Chef de la section travail et santé du Département fédéral de l’économie, le Dr Alain Kiener propose une explication économique. La basse conjoncture de la dernière décennie et son cortège d’insécurités sont responsables de cette augmentation spectaculaire.

La fin d’un tabou

Selon ses déclarations à l’ATS, les crises économiques successives ont rendu le monde du travail plus dur. A cet égard, il cite une enquête récente indiquant que 26,6% de la population active se sent souvent ou très souvent stressée.

Ce n’est pas tout. L’accélération du rythme de travail, la mobilité, la concurrence, le mobbing, tous ces facteurs font aussi que les gens craquent et deviennent dépressifs.

Vice-directrice de l’Office fédéral des assurances sociales, Beatrice Breitenmoser complète le panorama. Pour elle, le nombre d’emplois qui peuvent être assumés par des personnes de santé fragile a diminué drastiquement ces dernières années.

Une autre raison peut expliquer les chiffres de l’AI: le tabou qui entourait les maladies psychiques a disparu ces dernières années. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien si le nombre de psychiatres a triplé depuis le début des années 60.

Epargner les médecins

Cela étant, Alain Kiener refuse de mettre sur le dos des médecins le triplement des invalides psychiques. Les médecins qui voient leurs patients désespérés et dépressifs, après quelques années de maladie et de chômage, n’ont d’autre recours que de leur prescrire l’invalidité.

Et si tout système a ses tricheurs, les éventuels abus ne sautent pas aux yeux. C’est du moins le constat de Jean-François Novelle, directeur ad intérim de l’Office AI du canton de Genève. Qui précise: l’avis de plusieurs médecins est requis par les offices AI avant qu’ils ne prennent leurs décisions.

Interne à la Policlinique médicale universitaire de Lausanne, le Dr Jean Perdix participe à des expertises pour l’AI. Les patients qu’il voit souffrent surtout de douleurs chroniques persistantes, souvent inexpliquées. Le type de troubles qui se développe le plus actuellement, a-t-il indiqué à swissinfo.

L’AI souffre aussi

Selon Jean-François Novelle, la composante psychique est l’un des gros problèmes auquel doit faire face l’AI. Il faut maintenant réfléchir à la manière de réadapter ces malades, en négociant avec les employeurs et les caisses-maladie.

Mais pour l’AI, le problème est plus large. C’est en effet l’ensemble des rentiers qui augmentent. D’où de graves conséquences financières.

Le fonds AI qui accuse aujourd’hui une dette cumulée de 4,5 milliards de francs, dont plus d’un milliard pour la seule année 2002.

swissinfo, Pierre-François Besson

Le nombre de rentiers à l’AI toutes causes confondues a doublé depuis 1986. Ce qui représente 4,9% de la population active.
Le montant de la dette cumulée de l’AI atteint 4,5 milliards de francs.
Pour une explication scientifique de l’explosion du nombre de rentiers, il faudra attendre les résultats de l’étude en cours au Fonds national de la recherche scientifique.
La quatrième révision de l’AI devrait aboutir lors de la session de mai du Parlement. Son assainissement passera par une hausse de 0,8% de la TVA.

– Trois fois plus de Suisses touchent une rente de l’assurance invalidité (AI) pour des raisons psychiques depuis seize ans.

– Le stress sur la place de travail, les crises économique successives et le tabou enfin levé sur ce type d’invalidité expliquent en bonne partie le gonflement du nombre de malades.

– Les douleurs chroniques persistantes forment le gros de l’explosion des rentiers pour raisons psychiques.

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