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Des écoutes téléphoniques contre le terrorisme

Le ministre suisse de la Justice veut pouvoir procéder à des écoutes téléphoniques pour lutter contre le terrorisme. Keystone Archive

Le ministre suisse de la justice exige un renforcement des mesures préventives de lutte contre le terrorisme et demande de réintroduire les écoutes téléphoniques.

Afin d’éviter les abus, Christoph Blocher propose que les autorisations d’écoute soient données par une instance de contrôle neutre.

«Ces mesures ont pris une nouvelle actualité après les attentats de Londres, qui ont été préparés dans les milieux extrémistes islamistes», affirme le ministre suisse de la justice dans une interview publiée par la SonntagsZeitung.

Ce dernier présentera en automne ses propositions au gouvernement suisse. Il faut d’abord examiner avec soin jusqu’à quel point de telles mesures sont conciliables avec les libertés individuelles.

Pour mémoire, cette pratique avait été abandonnée en Suisse au début des années 90 suite au scandale dit «des fiches» recensant près d’un million de personnes et d’organisations censées représenter un risque pour la sécurité du pays.

Afin d’éviter les abus, Christoph Blocher proposera que le feu vert à des écoutes téléphoniques ne soit pas du ressort de la police fédérale, ni du Département fédéral de justice et police (DFJP) mais plutôt de personnalités externes. Il envisage notamment la création d’un groupe composé d’anciens juges.

Pour le Préposé fédéral à la protection des données les autorités disposent de suffisamment de possibilités à l’heure actuelle. Lors de sa conférence annuelle d’il y a deux semaines, Hanspeter Thür a mis l’accent sur la nécessiter de justifier les éventuelles démarches entreprises.

«Il serait dangereux que les services secrets intérieurs soient autorisés à récolter des données et à écouter des conversations téléphoniques sans avoir à justifier la nécessité de leur démarche», expliquait-il.

Des individus liés au terrorisme

Reste que pour l’heure, aucune structure comparable à Al-Qaïda n’a été repérée en Suisse, a déclaré Jürg S. Bühler, vice-directeur du Service d’analyse et de prévention (SAP) de l’Office fédéral de la police, à la NZZ am Sonntag.

Entre plusieurs centaines et un millier de personnes sont toutefois liées «d’une manière ou d’une autre» à des organisations terroristes. Mais ces individus ne sont «pas automatiquement des terroristes prêts à recourir à l’action violente», ajoute-t-il.

Jürg S. Bühler n’exclut par ailleurs pas l’hypothèse de terroristes «indigènes».

«L’expérience en Suisse et à l’étranger montre que des groupes isolés peuvent très bien se tourner vers la violence et finalement passer à l’acte», affirme-t-il. A ses yeux, une telle évolution est illustrée par l’agression d’un imam en octobre 2004 à Lausanne.

Cantons et imams

Les cantons suisses font également entendre leur voix dans la discussion actuelle sur la lutte antiterroriste. Ces derniers déplorent une absence de moyens adéquats pour remplir les tâches de protection qui leur sont confiées.

«Notre groupe de spécialistes de la question est beaucoup trop petit», se lamente par exemple le porte-parole du ministère publique du canton de Bâle dans les colonnes de la NZZ am Sonntag.

Des propos confirmés par Karin Keller-Sutter directrice de justice et police du canton de Saint-Gall qui affirme vivre la même situation.

Actuellement, les personnes qui assurent la protection de l’Etat en Suisse sont au nombre de 200 (120 au Service d’analyse et de prévention et 80 au sein des polices cantonales). Selon les responsables cantonaux de la sûreté, l’augmentation de la menace terroriste met en lumière l’insuffisance de ces ressources.

Toujours dans le même quotidien dominicale, Farhad Afshar, coprésident de la Coordination des organisations islamiques de Suisse, critique le fait que toute la discussion sur le terrorisme islamiste se concentre uniquement sur les mesures de sécurité.

Ce dernier pense qu’il est impossible de réussir à faire la paix avec des moyens policiers. Selon lui, un meilleur contrôle des courants radicaux à l’intérieur des communautés musulmanes suisses doit passer par la formation universitaire des imams dans les universités helvétiques.

swissinfo avec les agences

Le 7 juillet 2005, quatre kamikazes présumés ont fait sauter quatre bombes dans le métro et dans un autobus de Londres.
Au moins 55 personnes ont perdu la vie dans ces attentats et plus de 700 autres ont été blessées.
Le gouvernement suisse discute une série de mesures visant à améliorer la sécurité intérieure incluant les écoutes téléphoniques.
Cette pratique avait été abandonnée au début des années 90 suite au scandale dit «des fiches».

-Les ministres de l’Intérieur des pays de l’Union européenne désirent que les données des télécommunications (téléphone portable, téléphone, fax et internet) puissent être conservées durant une année.

-Grâce à ces données, il est possible de savoir qui a téléphoné, faxé, envoyé un mail ou un sms, à qui ou qui a visité tel site internet.

-La Suisse conserve déjà ces données depuis 2002, mais seulement durant six mois. Le gouvernement suisse veut tout de même examiner la possibilité de prolonger ce délai.

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