Des perspectives suisses en 10 langues

Des Mondiaux de ski au goût amer pour la Suisse

Lara Gut a une nouvelle fois été au centre des attentions à Garmisch-Partenkirchen. Keystone

Seul Didier Cuche, médaillé d’argent de la descente, a permis à l’équipe de Suisse de ne pas rentrer bredouille des Mondiaux de ski alpin de Garmisch-Partenkirchen. Un bilan décevant, qui doit pour beaucoup à la malchance et aux blessures en série.

Des six médailles de Val d’Isère à l’unique breloque remportée par Didier Cuche à Garmisch-Partenkirchen, la chute est rude. Première au classement des nations il y a deux ans, la Suisse n’occupe au terme de ces Mondiaux qu’un modeste 9e rang. L’Autriche, avec quatre médailles d’or, deux d’argent et une de bronze, retrouve sa suprématie.

Les Suisses ont dû se contenter des accessits, comme ces 4e places de Dominique Gisin (super-combiné), Lara Gut (descente et super-G) et Didier Cuche (super-G). Ajouté à ce manque de réussite les blessures et les virus en série qui ont frappé les représentants de Swiss-Ski, et une bonne partie de l’explication de la débâcle est déjà trouvée.  

Une constatation s’impose toutefois. La Suisse dispose certes d’une équipe talentueuse, mais au réservoir trop restreint. Pourtant décimée par les blessures, l’Autriche a toujours dans sa manche un skieur capable de créer l’exploit. Lorsque Daniel Albrecht et Didier Défago manquent à l’appel et que Carlo Janka est diminué, c’est tout le camp suisse qui tousse. Quant à Silvan Zurbriggen, révélation du début de saison, il est passé complètement à côté du rendez-vous allemand.

La dernière de Cuche

Heureusement, pour sauver l’honneur, il y avait Didier Cuche. Le meilleur descendeur de la planète a fait honneur à son statut, battu seulement le jour-J par le Canadien Erik Guay, qui a profité de conditions de neige plus favorables. A bientôt 37 ans, Didier Cuche est le pilier de l’équipe. Pourtant, la maison suisse ne pourra bientôt plus s’appuyer sur le champion originaire de l’Arc jurassien.

A l’issue du géant, qu’il a disputé avec un pouce cassé, le colosse des Bugnenets n’a pu contenir ses larmes. «Si je suis ému comme ça, c’est parce que je me rends compte que c’est mon dernier départ dans des Championnats du monde». Est-ce à dire qu’il mettra un terme à sa carrière ce printemps? «Pour tout le reste, je ne sais pas encore», répond-il laconiquement.

Beaucoup souhaiteraient le voir poursuivre encore au moins une saison. Sa présence permettrait d’enlever beaucoup de poids é ses coéquipiers qui reviendront de blessure, mais aussi aux jeunes skieurs appelés à gagner en maturité. Le Valaisan Justin Murisier, 19 ans, bonne surprise suisse de ces Mondiaux avec sa 14e place en géant, en fait partie. «J’espère sincèrement qu’il reste encore une saison. C’est essentiel de pouvoir compter sur un skieur expérimenté comme lui qui puisse nous donner de précieux conseils».

D’ici les finales de Coupe du monde, qui auront lieu du 14 au 20 mars dans la station grisonne de Lenzerheide, Didier Cuche n’aura pas le temps de tergiverser. Actuellement deuxième du général de la Coupe du monde derrière l’intouchable Ivica Kostelic, il se battra surtout pour le globe de cristal de la descente et du super-G.

Janka pas dans le rythme

Champion du monde du géant et médaillé de bronze de la descente à Val d’Isère il y a deux, Carlo Janka est reparti les mains vides de son séjour bavarois. «Mon but était d’obtenir une médaille, je ne peux pas me satisfaire de ma performance», a déclaré le Grison au terme du géant de vendredi, lors duquel il a décroché la 7e place.

Il peut toutefois invoquer des circonstances atténuantes. Diminué physiquement depuis le début de l’hiver, le vainqueur sortant du général de la Coupe du monde a dévoilé en marge de ces Mondiaux qu’il souffrait d’arythmie cardiaque. Son problème de cœur, détecté au mois de décembre, pourrait être la conséquence d’un virus mystérieux contracté il y a deux ans.

Carlo Janka subira une intervention du coeur ce printemps. «C’est une opération de routine. Si tout se déroule comme prévu, il pourra très vite reprendre l’entraînement et il y a de fortes chances pour qu’il retrouve le 100% de ses capacités», a expliqué le médecin de l’équipe de Suisse Dionys Glanz. Le principal concerné se veut plus prudent: «Ca me soulage de pouvoir poser un diagnostic. Mais ce n’est que le point de départ, je n’ai pas encore la réponse à toutes mes questions.»

Lara Gut au pied du podium

Autre héroïne dans le camp suisse à Val d’Isère il y a deux ans, Lara Gut n’a pas non plus vécu les Mondiaux souhaités. De retour sur les skis cet hiver après une blessure à la hanche, la Tessinoise n’a pourtant pas grand-chose à se reprocher. Avec un brin de chance supplémentaire, elle aurait pu ramener une ou deux médailles au pays. Quatrième du super-G et de la descente, elle a chuté spectaculairement à quelques portes de l’arrivée du slalom du super-combiné alors qu’elle était en course pour le podium.

Représentante la plus en vue d’une équipe féminine qui se cherche toujours dans les disciplines techniques, Lara Gut a une nouvelle fois eu tous les projecteurs braqués sur elle. Ses critiques à l’égard de Mauro Pini, le nouveau patron de l’équipe féminine, qui ont conduit la Fédération à la suspendre pour deux courses entre Noël et Nouvel-An, et son attitude jugée arrogante, ont eu le don de monter une partie de la presse contre elle.

«Les journalistes analysent pourquoi une skieuse s’est préparée de telle manière, pourquoi une autre n’a pas répondu, pourquoi celle-ci a choisi des skis différents. C’est parfois un peu pénible, mais c’est comme ça, les journaux doivent bien remplir des lignes», répond-elle. A la tête de la structure privée de la championne, Pauli Gut, le père, explique: «On apprend avec le temps. Parfois, c’est l’athlète qui fait des fautes, parfois les journalistes. De toute manière, on est tellement projeté vers l’avant qu’on oublie rapidement les histoires négatives».

Un noyau de polyvalentes

 

Les tensions entre la Fédération et le clan Gut risquent pourtant bien d’apparaître à nouveau sur la table prochainement, en raison des intérêts divergents que nourrissent les sponsors officiels de Swiss-Ski et ceux de la structure privée de Lara Gut.

La solution, pour Mauro Pini, se situe davantage sur le plan sportif. «Notre but est d’offrir la possibilité à Lara de s’intégrer définitivement dans l’équipe. Pour cela, il faut que nous puissions lui mettre à disposition les meilleurs entraîneurs. Si le niveau est suffisamment bon, elle n’aura plus aucune raison de s’entraîner à part.»

L’entraîneur tessinois veut créer un nouvel état d’esprit au sein de l’équipe, en s’appuyant sur un noyau dur de polyvalentes, qui comprendrait outre Lara Gut les jeunes talents Denise Feierabend et Wendy Holdener. Déjà bredouille aux Jeux olympiques de Vancouver, l’équipe de Suisse féminine ne pourra pas se permettre de rentrer une nouvelle fois sans médaille des prochains rendez-vous majeurs: les Mondiaux de Schladming (Autriche) en 2013 et les Jeux olympiques de Sotchi (Russie) en 2014.

1.    Autriche  8 au total / 4 or / 2 argent / 1 bronze

2.    France 4 / 2 / 1 / 1

3.    Italie 6 / 1 / 2 / 3

4.    Etats-Unis 3 / 1 / 2 / 0

5.    Slovénie 2 / 1 / 1 / 0

6.    Canada 1 / 1 / 0 / 0

  .    Norvège 1 / 1 / 0 / 0

8.    Suède 4 / 1 / 0 / 3

9.    Suisse 1 / 0 / 1/ 0

10. Allemagne 2 / 0 / 0 / 2

Les Championnats du monde de ski alpin ont eu lieu du 7 au 20 février dans la station allemande de Garmisch-Partenkirchen. Située en Bavière, à quelques kilomètres de la frontière autrichienne, Garmisch-Partenkirchen est une station de sports d’hiver qui a notamment accueilli les Jeux olympiques d’hiver en 1936. 

Les prochains Mondiaux de ski alpin auront lieu en 2013 dans la ville autrichienne de Schladming, ceux de 2015 à Beaver Creek, aux Etats-Unis. Deux fois andidate malheureuse, la station grisonne de Saint-Moritz espère quant à elle organiser les Championnats du monde de 2017. Elle avait déjà eu droit à cet honneur en 2003.

Tops

 

Christof Innerhofer. L’Italien est l’incontestable roi de ces joutes. Sur un terrain qu’il affectionne (piste verglacée et bosselée), “Winnerhofer” a raflé l’or du super-G, l’argent du super-combiné et le bronze de la descente. Restera-t-il l’homme d’une seule quinzaine ? A lui de prouver le contraire en Coupe du monde et à Schladming en 2013.

Les Autrichiennes. On attendait une mainmise germano-américaine avec Maria Riesch et Lindsey Vonn, mais ce sont finalement les Autrichiennes qui ont quasiment tout gagné avec Elisabeth Görgl (descente et super-G), Marlies Schild (slalom) et Anna Fenninger (super-combiné). Seul le géant remporté par Tina Maze (Sln) leur a échappé.

Didier Cuche. Médaillé d’argent de la descente, le Neuchâtelois a été fêté comme un champion du monde. Il faut dire que son podium relève de l’exploit, compte tenu des conditions le jour de la course (piste dégradée) et de la pression qui reposait sur ses épaules. Pour ses derniers Mondiaux, Cuche s’est aussi fait sauveur de la nation, récoltant l’unique médaille suisse.

Flops

 

L’ange gardien de Lara Gut. Autant la Tessinoise avait eu de la réussite à Val d’Isère en 2009 (deux fois l’argent), autant elle en a cruellement manqué à Garmisch. Son bilan des joutes relève presque du pathétique: 4e en descente, 4e en super-G, éliminée dans les derniers mètres du super-combiné alors que la médaille semblait acquise, blessures à un genou et une cheville.

Les stars américaines. Lindsey Vonn a moins fait parler d’elle avec sa médaille d’argent (descente), qu’avec ses critiques de la piste, jugée trop verglacée à son goût. Son comportement en a agacé plus d’un, au point d’être taxée «reine de la dramatisation». Quant à Bode Miller, il a gratifié le public de ses traditionnelles acrobaties. C’est spectaculaire (super-G avec un seul bâton) ou grotesque (élimination à la 3e porte en super-combiné), mais c’est quoiqu’il en soit pas suffisant pour monter sur les podiums.

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision