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L’ambition de Carla Del Ponte

Le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, inaugurant la CPI mardi à La Haye. Keystone

La Suissesse Carla Del Ponte ne cache pas son intérêt pour le poste de procureur de la Cour pénale internationale (CPI).

Avec les dix-huit juges qui ont prêté serment mardi à La Haye, ce magistrat s’occupera des génocides et autres crimes de guerre.

La Cour pénale internationale (CPI) est désormais une réalité tangible. Journée inaugurale et prestation de serment des dix-huit juges ont eu lieu mardi à La Haye. Mais sans la Neuchâteloise Barbara Ott. La Suisse voulait la faire élire. En vain.

Cela ne l’empêche pas de voir plus loin et surtout plus haut. Un nom circule depuis plusieurs mois, notamment dans la presse helvétique. Celui de Carla Del Ponte comme possible procureur de la Cour.

Contactée par swissinfo, la porte-parole de Carla Del Ponte confirme l’intérêt de sa patronne pour ce poste. Mais Florence Hartmann refuse la notion de candidature. Car, dit-elle, il revient aux Etats de désigner officiellement les candidats.

Selon Simon Hubacher, chef de l’information au Ministère des affaires étrangères, la Suisse a procédé à une première prise de température auprès de ses partenaires.

Objectif de cette démarche: savoir si Carla Del Ponte, actuellement procureure des Tribunaux pénaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, répondait au profil de l’institution. Pour l’heure, aucun écho n’est parvenu à Berne.

Soutien prématuré de la part de Berne

Simon Hubacher va même plus loin. La question de savoir si la Suisse soutiendra officiellement la candidature de Carla Del Ponte est, selon lui, prématurée.

La Suisse officielle s’en remet aux mécanismes de la CPI. «S’il est décidé que la désignation du procureur à la Cour pénale internationale résulte d’un consensus, alors nous demanderons aux Etats leur avis sur la candidature de Carla Del Ponte. Elle a d’excellentes qualités», souligne Erwin Hofler, chef du département politique au Ministère suisse des affaires étrangères, dans l’édition de mardi du quotidien français le Monde.

«Consensus». Le mot-clef est lâché. Les 139 nations ayant signé le Traité de Rome, qui créée la CPI, cherchent en effet un «candidat de consensus» pour cette fonction stratégique. L’ouverture des candidatures est fixée au 24 mars et le procureur sera désigné le 23 avril.

Recherche d’appuis

Une fois n’est pas coutume, Carla Del Ponte cherche prudemment des appuis à sa candidature. Elle a discrètement sondé la cheffe de la diplomatie, Micheline Calmy-Rey, sur le soutien de Berne.

De bonne source, elle en a fait de même auprès de Kofi Annan, secrétaire général des Nations Unies.

Mais un obstacle se dresse sur le chemin de la Suissesse. Actuellement, elle mène le procès de l’ancien président yougoslave Slobodan Milosevic. Et selon le journal zurichois Tages Anzeiger, un retrait en cours d’affaire serait très mal vu de Kofi Annan.

Les défauts de ses qualités

Cela dit, Carla Del Ponte a des atouts à faire valoir: elle connaît parfaitement le fonctionnement de la justice pénale internationale, elle dispose d’un carnet d’adresses bien fourni et elle est indépendante.

Mais elle a également les défauts de ses qualités: fonceuse, parfois brouillonne. «Elle devrait être secondée par deux adjoints très pointus en matière juridique et en management», concède l’un de ses proches.

Traditionnellement, le choix d’individus pour des postes à haute responsabilité dans les institutions internationales est fonction de facteurs qui dépassent leurs qualités intrinsèques. Parmi ces paramètres figure en bonne place la diversité géographique.

Or, mardi, la CPI a élu son président. Philippe Kirsch est Canadien. Il sera assisté de deux magistrates venues du Costa-Rica et du Ghana. «Le choix d’un président d’un pays occidental et de deux femmes rendra la candidature de Carla Del Ponte plus difficile», note un expert.

A La Haye, pour la cérémonie de prestation de serment, le Secrétaire d’Etat Franz von Däniken a remplacé au pied levé la ministre Micheline Calmy-Rey, qui s’est désistée au dernier moment.

Simon Hubacher invoque de pures questions d’organisation. Et rejette toute interprétation politique à l’absence de la ministre suisse des Affaires étrangères.

swissinfo, Alain Franco et Pierre-François Besson

Le dernier délai de présentation des candidatures au poste de procureur est fixé au 4 avril.
Le nouveau procureur sera désigné le 23 avril.
139 nations ont signé le Traité de Rome qui institue la Cour pénale internationale (CPI).

– Actuellement procureur des Tribunaux pénaux internationaux (TPI), la Suissesse Carla Del Ponte ne cache pas son intérêt pour la charge de procureur de la CPI.

– Berne a sondé ses Etats-partenaires mais il n’est pas encore question d’une candidature officielle de Carla Del Ponte.

– La Suissesse dispose d’atouts à faire valoir et cherche discrètement des appuis.

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