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L’America’s Cup à l’heure suisse

Le team Alinghi contre lequel onze challengers comptent l’emporter. Keystone Archive

Comme Audemars Piguet avec Alinghi, plusieurs horlogers parient sur les concurrents de la célèbre compétition pour mettre du vent dans leur marketing.

Ce créneau actuellement porteur intéresse aussi des entreprises dont l’image était jusqu’ici éloignée du monde de la voile.

Les six et septième régates préparatoires de la 32e Coupe de l’America se déroulent du 25 août au 1er septembre à Malmö, dans le sud-ouest de la Suède. Et cette fois encore, on distinguera sur la coque, la bôme ou les voiles de plusieurs bateaux, les marques de montres suisses.

Quatre horlogers helvétiques ont décidé de lier leur nom à l’aventure des prétendants à la coupe actuellement détenue par les Suisses d’Alinghi. Un cinquième – Louis Vuitton – n’est ni plus ni moins que le chronométreur officiel de la compétition.

Audemars Piguet était déjà de la partie en 2003, au moment de la victoire d’Alinghi à Auckland. Les retombées en termes de notoriété et de chiffre d’affaires ont convaincu l’horloger de reconduire sa collaboration avec le bateau helvétique pour cette nouvelle campagne qui s’achèvera en 2007 à Valence (Espagne).

Pour sa part, Girard-Perregaux a signé avec BMW Oracle Racing. Et TAG Heuer (LVMH) avec China Team, seul concurrent asiatique de cette campagne. Le Swatch Group est lui aussi dans la course. Sa marque OMEGA embarque avec le syndicat défait par Alinghi en 2003 – les Kiwis d’Emirates Team New Zealand.

Visibilité exceptionnelle

Ces horlogers sont «co-sponsor», «sponsor associé» ou encore «exclusive supplier». Et heureux de l’être. «C’est une chance pour nous de profiter de l’exceptionnel potentiel de visibilité offert par China Team», indique très officiellement le patron de TAG Heuer.

«Ce sera sans nul doute l’équipe la plus populaire de cette édition. Près de 1,3 milliard de chinois vont soutenir cette équipe (…). Avec deux bases, une en Espagne et une en Chine, ce partenariat nous offre une plateforme de relations publiques de très grande qualité», poursuit Jean Christophe Babin.

Propriétaire de Girard-Perregaux, Luigi Macaluso indique que «la véritable raison qui [nous] a conduit dans la voile est la passion de ces hommes pour les défis, leur désir de travailler ensemble pour vaincre avec une maîtrise et une innovation technologique extrêmes (…)».

L’implication des horlogers suisses a évidemment un prix. Si les principaux intéressés le taisent, les observateurs évaluent à 20 millions de francs l’enveloppe globale mise sur la table pour ces partenariats.

Viendront se greffer là-dessus les dépenses d’exploitation de cet investissement initial. Explication de Kalust Zorik, spécialiste en marketing horloger: «Si vous mettez 3 millions pour être présent avec votre nom, vous devrez mettre un autre million ou un million et demi pour vous légitimer en re-communiquant derrière. Sinon, c’est de l’argent perdu.»

Question d’opportunité

Horlogerie et voile collaborent depuis très longtemps. La victoire d’Alinghi (et son corollaire, l’organisation de l’America’s Cup en Europe) a toutefois suscité un appel d’air vers un créneau porteur (sport sans taches, élitaire, technologique et vert). Autrement dit, ces horlogers saisissent une opportunité.

«Cela leur permet de positionner leurs produits à la fois à travers ce sport et pour ce sport haut de gamme», explique Kalust Zorik.

Avec la voile, les firmes horlogères privilégient une clientèle plus ciblée qu’en ayant recours à des stars du show business par exemple. En outre, le calcul est à la fois plus risqué (la défaite du bateau partenaire) et à plus court terme (la compétition s’oublie vite). Ce qui suppose un retour sur investissement rapide.

Dans l’affaire, l’essentiel est, pour les marques en question, de ne pas tomber dans la voile comme un cheveu sur la soupe. «Comment je peux légitimer une implication dans ce domaine sportif au travers de mes produits et de ma philosophie d’entreprise, c’est la question centrale», assure Kalust Zorik.

En marge de l’America’s Cup, les quatre horlogers impliqués sortent des produits – séries limitées ou spécialités réellement innovantes. Mais, à l’inverse d’une marque comme Corum, qui a bâti son succès sur la voile, leur entrée dans le nautisme peut surprendre.

C’est la cas pour Tag Heuer, dont l’image est plutôt connotée «sports extrêmes». D’OMEGA aussi, qui risque de plus en plus la dispersion en multipliant sa présence dans différents sports.

Exploitant largement ses relations avec le sport automobile, Girard-Perregaux n’avait pas grand chose non plus à voir avec la voile. L’avenir dira si – par calcul réel ou par pur opportunisme – ces horlogers ont vu juste.

swissinfo, Pierre-François Besson

Inauguré en 2004, le calendrier de cette 32e Amercia’s Cup s’étend sur quatre ans.
Les douze équipages s’affrontent au cours d’une série de quatorze régates préparatoires («Acts»). Objectif: maintenir la compétition en une de l’actualité.
En 2007 à Valence (Espagne), les onze challengers se rencontreront durant la Coupe Louis Vuitton.
Le vainqueur défiera ensuite Alinghi lors de l’America’s Cup match proprement dit.

– L’Amercia’s Cup est le trophée le plus fameux dans le monde la voile. C’est aussi la première compétition de l’histoire du sport international (1851).

– En dehors de la victoire australienne de 1983, la coupe était demeurée en mains américaines de 1851 à 1995. Les Néo-zélandais l’ont gagnée en 1995 et 2000, avant la victoire d’Alinghi en 2003.

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