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La défense demande l’acquittement

Philippe Bruggisser (à gauche) et son avocat Lorenz Erni à Bülach. Keystone

Les plaidoyers de la défense ont commencé ce jeudi. Les avocats demandent l'acquittement de l'ancien président du conseil d'administration Eric Honegger et de l'ancien patron Philippe Bruggisser.

Alors que l’avocat d’Eric Honegger a démonté pièce par pièce l’accusation et qualifié le procès de ‘procès-spectacle’, celui de Philippe Bruggisser a déclaré que les reproches à l’égard de sont client sont infondés.

La défense est entrée en scène jeudi dans le procès Swissair à Bülach, dans le canton de Zurich. Les avocats ont martelé que les dirigeants de SairGroup ne sont pas responsables de la débâcle.

A leurs yeux, le non à l’Espace économique européen (EEE) en 1992, puis les attentats terroristes du 11 septembre 2001 ont pesé lourd dans la balance.

Pas de préjudice

Jeudi matin, Markus Hug, l’avocat de l’ancien président et directeur de SAirGroup, Eric Honegger, a vivement critiqué les manquements de l’accusation. Pour lui, l’acte d’accusation ne se base sur aucun fait. Swissair était un mythe, dont on juge la chute sous la pression du public, a-t-il déclaré. Or, la débâcle d’une entreprise ne peut pénalement pas être jugée.

Eric Honegger, qui a présidé le groupe de 2000 à mars 2001 et dirigé la compagnie ad interim de janvier 2001 à mars 2001, est accusé de gestion déloyale – comme tous les anciens membres du conseil d’administration – pour avoir injecté 150 millions d’euros début 2001 dans Sabena, alors mal en point.

Ce paiement n’a pas porté préjudice à SAirGroup, au contraire, a expliqué Markus Hug. Si cet argent n’avait pas été versé, il aurait fallu liquider la compagnie belge. Une telle décision aurait coûté davantage au groupe que le montant injecté, a relevé l’avocat.

Markus Hug a aussi repris les déclarations d’Eric Honegger sur les liens entre le sauvetage de Sabena et la ratification des accords bilatéraux par l’Union européenne (UE). La Belgique a fait pression et la Confédération, actionnaire du groupe, a transmis le message par la voix des ministres Joseph Deiss et Moritz Leuenberger, selon l’avocat. La pression était d’autant plus forte pour Swissair qu’une non ratification des bilatérales l’aurait directement touchée. L’accord sur le trafic aérien en faisait partie, a-t-il rappelé.

Lundi, le procureur a requis contre Eric Honegger une peine de huit mois de prison assortie d’une peine pécuniaire de 90.000 francs, avec sursis, et une amende de 20.000 francs. A l’époque, l’ancien conseiller d’Etat représentait le canton de Zurich au sein du conseil d’administration.

Une plainte séparée a aussi été déposée contre M. Honegger pour fraude fiscale et pour laquelle le procureur a requis 8000 francs d’amende. Là aussi, Markus Hug a rejeté l’accusation.

«Reproches infondés»

La défense a poursuivi ses plaidoiries jeudi après-midi, en faveur de Philippe Bruggisser l’instigateur de la «stratégie du chasseur». Le patron de SAirGroup de 1997 à 2001 est accusé de gestion déloyale en lien avec la fusion de Roscor et SAirLines, deux filiales de SAirGroup en fin d’année 2000.

L’opération avait grevé la fortune du groupe de plus de 100 millions de francs. De l’avis du Ministère public, la fusion avait pour but d’assainir SAirLines, ce que l’avocat de Philippe Bruggisser a démenti.

SAirLines n’était pas surendettée à l’époque contrairement à ce que prétend l’accusation, a expliqué Lorenz Erni. Cette décision faisait en outre suite à la stratégie adoptée en 1996, soit avant l’arrivée de M. Bruggisser, a-t-il ajouté.

Comme son client lors de son audition, l’avocat s’en est pris au rapport d’experts sur lequel l’accusation se base. Selon lui, les reproches à l’égard de Philippe Bruggisser sont infondés. Le Ministère public manque d’arguments, d’indices et de témoignages étayant ses affirmations. De plus, l’expertise n’est pas partiale, son auteur travaillant de concert avec les procureurs.

Le Ministère public a requis contre Philippe Bruggisser, âgé de 59 ans, quinze mois de prison assorti d’une peine pécuniaire de 400.000 francs avec sursis, ainsi qu’une amende de 10000 francs.

swissinfo et les agences

Le Ministère public zurichois a requis lundi des peines de prison allant de 6 à 28 mois et des peines pécuniaires de 38’000 à plus d’un million de francs contre les ex-responsables de Swissair. Mario Corti est le plus chargé des 19 accusés qui ont tous plaidé non coupable.
Les interventions de la défense s’étalent jusqu’au 9 mars. A l’exception du plaidoyer de l’avocat de Mario Corti, pour lequel deux jours sont réservés, une demi-journée est prévue pour les autres accusés.

Le procès devant le Tribunal de district de Bülach s’est ouvert le 16 janvier et doit durer jusqu’au 9 mars.

Les auditions des 19 accusés se sont achevées le 5 février.

Les débats sont publics et se déroulent dans la salle communale de Bülach qui peut accueillir jusqu’à 1500 personnes.

Les plaidoiries de la défense et du Ministère public avaient débuté le 15 février.

La date du verdict n’a pas encore été fixée.

L’acte d’accusation compte 100 pages et les actes judiciaires remplissent 4150 classeurs.

Pour instruire la cause, le Ministère public zurichois a travaillé 40’000 heures, a interrogé plus de 300 personnes et a procédé à la perquisition de 20 habitations.

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