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La justice suisse relance l’affaire Elf

La justice genevoise vient de découvrir une commission de 70 millions de dollars versée par Elf au Nigeria.

Deux grosses affaires, apparemment indépendantes l’une de l’autre, les détournements de fonds de la compagnie pétrolière française Elf, et la corruption du dictateur nigérian Sani Abacha, viennent de se télescoper au palais de justice de Genève.

Le juge Daniel Devaud a découvert que le groupe pétrolier Elf a versé, jusqu’en 1995, 70 millions de dollars (environ 100 millions de francs suisses) sur les comptes suisses d’Elie Khalil, un homme d’affaires britannique, d’origine libanaise.

Cette opération risque de relancer la tentaculaire affaire Elf. En effet, pour des raisons politiques, la justice française a décidé que les affaires de corruption ne se sont déroulées qu’entre 1989 et 1993, sous la présidence de Loïk Le Floch-Prigent, le PDG d’ELF nommé par François Mitterrand.

L’avocat de Jacques Chirac

Or, la découverte de la justice suisse tend à prouver que ces pratiques «particulières» se sont poursuivies avec Philippe Jaffré, patron d’Elf de 1993 et 1999, et nommé par la droite.

Elie Khalil a été arrêté à l’hôtel Bristol à Paris, à la demande du juge Renaud van Ruymbeke, en charge de l’affaire Elf. Le problème, c’est que cet homme d’affaires est devenu le conseiller financier de Karim Wade, le fils du président du Sénégal, et qu’il dispose d’un passeport diplomatique.

Dans sa dernière édition, «La Lettre du Continent», une publication spécialisée, révèle que c’est Francis Szpiner, l’un des avocats de Jacques Chirac, qui a été chargé de faire sortir Elie Khalil de prison, contre une caution de 53 000 francs suisses.

Le clan Abacha à Genève

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Elie Khalil travaillait comme intermédiaire pour Sani Abacha, l’ancien dictateur du Nigeria, décédé en 1998. La Suisse a joué un rôle majeur pour récupérer les milliards de dollars détournés par ce tyran, et cachés en Suisse, au Liechtenstein, au Luxembourg, en Grande-Bretagne et en France.

Elie Khalil percevait l’argent d’Elf à Genève, via le Crédit Lyonnais de Luxembourg. Ensuite, une partie des 70 millions de dollars a atterri chez un proche de Sani Abacha.

L’enquête mentionne le nom de Gilbert Chagoury, un Libano-nigérian, condamné par la justice suisse pour avoir aidé le clan Abacha à blanchir l’argent. Et plus particulièrement pour avoir introduit l’un des fils de Sani Abacha auprès des dirigeants du Crédit Suisse.

swissinfo/Ian Hamel

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