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Le Mondial de hockey à domicile du président René Fasel

Keystone

Le Fribourgeois René Fasel est le patron du hockey mondial depuis près de 15 ans. A un peu plus d'un mois du Championnat du monde 2009, il fait le point sur ce grand événement organisé dans son pays natal.

Du 24 avril au 10 mai, la Suisse sera l’épicentre de la planète hockey. René Fasel, président suisse de la Fédération internationale de hockey, vivra ses deuxièmes championnats du monde à «domicile». Interview d’un homme jamais à cours d’idées pour rendre son sport encore plus attractif.

swissinfo: Les Zurich Lions ont remporté la Ligue des Champions face aux Russes de Metallurg Magnitogorsk. Quelle valeur cette victoire a-t-elle pour le hockey suisse?

René Fasel: Ce succès était pour nous complètement inattendu. Ca démontre qu’en hockey sur glace, David peut parfois battre Goliath (ndlr: budget de Magnitogorsk: 67 millions de francs; budget de Zurich: 10 millions).

C’est un bon signal pour les petites nations comme la Suisse. Avec un travail sérieux, de la concentration et de l’enthousiasme, elles peuvent battre les Suédois, les Finlandais, les Tchèques et les Russes.

swissinfo: Savez-vous déjà quels matches des Championnats du monde vous allez suivre sur place?

R.F.: Non, je me décide toujours au dernier moment et selon l’envie. Je vais assister à au moins deux rencontres par jour. Il y aura des matches très attractifs à Berne et à Kloten. Par chance, le trajet entre les deux villes est très court, à peine plus d’une heure en train.

swissinfo: Qu’attendez-vous de la Suisse au niveau sportif en tant que pays organisateur?

R.F.: Le sélectionneur Ralph Krueger a fait du très bon travail ces dernières années. Il devra préparer spécialement les joueurs à la pression engendrée par ces joutes à domicile. Les Suisses doivent garder les pieds sur terre, car leur groupe, où évoluent la Russie, l’Allemagne et la France, ne sera pas facile.

swissinfo: Des Mondiaux sont l’occasion pour le pays organisateur de se mettre en vitrine. Quels sont vos objectifs pour ce grand événement?

R.F.: Nous cherchons toujours à motiver les organisateurs pour qu’ils construisent de nouvelles patinoires ou rénovent les enceintes actuelles. Ces dix dernières années, nous avons presque toujours atteint ce but. C’est le cas également pour cette édition: à Berne, la patinoire a été complètement refaite. A Kloten, des investissements ont également été consentis. C’était une nécessité.

Sur le plan sportif, j’espère que ces Mondiaux vont apporter un nouvel élan au hockey sur glace, comme ce fut le cas pour l’Eurofoot 2008 ou les Mondiaux de ski alpin à St-Moritz en 2003.

swissinfo: Le hockey sur glace est moins populaire que le football. Vous avez été l’initiateur de la Champions League et de la Victoria Cup, rencontre qui oppose le meilleur club américain au meilleur club européen. Avez-vous également de nouvelles idées pour les Championnats du monde?

R.F.: Le format actuel avec 16 équipes suscite toujours des discussions chez les organisateurs. Certains veulent supprimer le tour intermédiaire, parce qu’on ne sait pas à l’avance quelle équipe affronte quelle autre équipe.

Une proposition a été faite pour réduire le nombre de nations participantes à 14, divisées en deux groupes de 7. Dans ce cas de figure, les deux finalistes devraient disputer un total de 9 matches en deux semaines. C’est beaucoup trop.

Une autre variante serait de composer deux groupes de six équipes. Cette idée aurait pour désavantage de priver quatre nations de participation aux Mondiaux, ce qui va à l’encontre de notre désir de rendre le hockey davantage populaire.

Un exemple: la Hongrie s’est qualifiée pour la première fois pour des Mondiaux. Même si les Hongrois risquent de connaître des difficultés en Suisse ce printemps, il y a un véritable engouement pour le hockey dans ce pays. C’est pour cette raison que je soutiens complètement le mode de compétition avec 16 équipes.

swissinfo: L’Amérique du Nord, respectivement la NHL, est toujours une planète à part dans la galaxie du hockey. Comment voulez-vous réduire ce fossé?

R.F.: Nous nous y sommes attelés ces dernières années. Notre but est de réunir ces deux mondes. C’est clair, les propriétaires de clubs nord-américains ainsi que le syndicat des joueurs (NHLPA) défendent leurs intérêts. Nous ne devons pas oublier que la NHL et ses 30 équipes génèrent un chiffre d’affaires de deux milliards de dollars annuel !

Les aspects économiques sont plus importants que le sport. Les relations sont cependant assez bonnes entre le hockey européen et américain.

swissinfo: Le hockey sur glace européen est un peu comme un train à deux classes. La Russie, la Suède, la Finlande et la Tchéquie s’affrontent en cercle clos, même durant les matches de préparation. La Suisse doit toujours rencontrer les mêmes adversaires, comme l’Allemagne ou la Slovaquie. Pour les spectateurs, des matches face aux grosses cylindrées seraient plus attractifs!

R.F.: Certainement. Mais ce n’est pas de notre ressort de changer cet état de fait. Ce sont les fédérations nationales qui sont responsables.

A nouveau, la question financière prime. Les 4 grandes nations du hockey européen disputent chaque année 4 tournois, générateurs de revenus substantiels. Ils n’ont pas grand intérêt à jouer contre la Suisse, l’Allemagne ou la France.

Une idée serait de créer une Coupe d’Europe ou un Championnat d’Europe avec les équipes nationales. Je travaille pour trouver une solution qui convienne aux grandes nations et qui soit également profitable aux plus petites.

swissinfo: Sur la carte du hockey, seule manque jusqu’à présent la Chine parmi les grandes puissances mondiales. L’Empire du Milieu fera-t-il bientôt partie des nations du hockey?

R.F.: Bonne question! Le potentiel de la Chine est énorme. Quand je demande autour de moi combien il y a de hockeyeurs licenciés en Chine, tout le monde me cite des chiffres au-delà du million. Sur les 1,3 milliards de citoyens chinois, il y a en fait 200 licenciés. Pas des millions ni des milliers, mais deux cents!

Sur 700 millions de Chinoises, 62 ont une licence de joueuse de hockey. Pourtant, l’équipe nationale féminine s’est qualifiée de manière surprenante pour les Jeux olympiques de Vancouver.

Nous investissons chaque année 500’000 francs pour la promotion du hockey en Asie, notamment dans la construction de patinoires. Si nous faisons seulement un petit pas en avant, alors il se fera certainement en Chine.

La ville d’Harbin veut organiser les Jeux d’hiver de 2018 ou 2022. Si cette candidature passait, les sports d’hiver connaîtraient un énorme essor en Chine.

Interview swissinfo, Renat Künzi
(traduction de l’allemand: Samuel Jaberg)

Dentiste. René Fasel est né en 1950 à Fribourg. Marié et père de 4 enfants. Il est dentiste de formation.

Arbitre. Après avoir joué plusieurs années, notamment avec Fribourg-Gottéron en LNB, il s’est entièrement consacré à une carrière d’arbitre international.

Président. En 1985, il est élu à la présidence de la Fédération suisse de hockey sur glace. En 1994, il prend la présidence de la Fédération internationale de hockey sur glace (IIHF).

CIO. A l’été 2008, René Fasel a été nommé dans le comité exécutif du Comité International Olympique (CIO, une sorte de «gouvernement mondial du sport») en tant que responsable des sports d’hiver. Il fait ainsi partie des représentants importants du sport mondial.

Deux sites. Le championnat du monde de hockey aura lieu du 24 avril au 10 mai 2009 à Berne et Zurich. La patinoire de Berne pourra accueillir 11’600 spectateurs par rencontre, le Schlüfweg de Kloten 6800.

Mode. Seize équipes participent au tournoi. La Suisse disputera ses trois premières rencontres, dans le groupe B, face à la Russie, à l’Allemagne et à la France. Les 3 meilleures équipes des 4 groupes disputeront ensuite un tour intermédiaire dans deux groupes de 6 équipes d’où sortiront les 8 quarts de finalistes. Dès les quarts de finale, chaque rencontre est éliminatoire.

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