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Le rêve africain de Marc Duvillard

Marc Duvillard (accroupi à g.) et ses jeunes joueurs de l'Aysa au stade de Tesserete-Capriasca. swissinfo.ch

Ex-joueur et ex-entraîneur de football en Suisse, le Genevois vit au Zimbabwe depuis 1995. Il y a fondé une académie de football pour jeunes déshérités.

swissinfo a rencontré Marc Duvillard au Tessin, étape d’une tournée de trois semaines en compagnie de jeunes joueurs zimbabwéens.

«Le mal de l’Afrique existe… Bien sûr, le terme est un peu galvaudé mais il exprime bien ce que ressent un Blanc qui a choisi de vivre en Afrique», raconte Marc Duvillard.

Ancien footballeur professionnel, âgé aujourd’hui de 53 ans, il a entraîné plusieurs clubs suisses.

Il s’est établi, début 1995, à Harare, capitale du Zimbabwe. Avec sa femme Gaby, une journaliste tessinoise qui a travaillé à la télévision et à la radio suisse italienne, il a choisi l’ex-Rhodésie pour la suite de son parcours.

Après une expérience de huit ans à la tête du FC Lugano, Marc Duvillard a entraîné le Lausanne-Sports de 1992 à 1994. Remercié au terme de la saison 93-94, il s’est mis en quête d’une nouvelle équipe.

Cela l’a conduit en Afrique noire. C’est en effet à Harare, capitale du Zimbabwe que Marc Duvillard a trouvé de l’embauche. En février 1995, il est nommé entraîneur de l’équipe locale des Black Aces (1ère division), club aujourd’hui disparu.

Un rêve devenu réalité

Egalement sélectionneur et superviseur technique de l’équipe nationale du Zimbabwe à trois reprises, Marc Duvillard a renoncé à entraîner les joueurs professionnels en 1999.

Secondé par son épouse, par un ancien membre du comité de l’équipe des Black Aces et par l’avocat et mécène zougois Guido Renggli qui a assuré le financement, Marc Duvillard a réalisé son rêve africain le 7 février 2001.

A cette date, son académie de football «Aces Youth Soccer Academy» (AYSA) est devenue une réalité. Elle a permis de sauver de la rue, de la misère et de la maladie, des dizaines de jeunes garçons et jeunes filles dont plusieurs orphelins.

«Je considère le Zimbabwe comme mon pays et j’estime désormais y avoir mes racines», explique le Genevois.

«Ma femme et moi avons adopté deux enfants du lieu, un garçon et une fillette qui ont maintenant neuf et cinq ans. Le Zimbabwe est un pays magnifique, d’une grande beauté et au climat superbe. Harare est située à 1500 mètres et les nuits n’y sont jamais étouffantes, même pas en été. »

Une vie de privilégiés

Né à Genève le 22 novembre 1952, Marc Duvillard a ensuite vécu à Meyrin dès l’âge de 10 ans. «Nous étions parmi les premiers habitants de la cité-satellite », se souvient-il.

Le fondateur et manager de l’Académie de football Aces revient régulièrement en Suisse: «une fois par année en tous cas. Nous y restons environ deux mois et en profitons pour faire le plein de visites aux parents et amis.»

Dans un quartier résidentiel

«Malgré la distance, nous avons des contacts réguliers avec la Suisse. Il est vrai cependant que, lorsque nous sommes au pays, nous avons de la peine à nous habituer à la frénésie, à l’agitation quotidienne. Et au froid, si nous venons en hiver».

«Il faut dire, ajoute Marc Duvillard, qu’à Harare nous jouissons d’une bonne qualité de vie. Nous habitons dans un quartier résidentiel, dans une villa avec piscine et personnel. Nous ne pourrions jamais vivre ainsi en Suisse. Nous en sommes conscients.»

Marc et Gaby Duvillard vivent donc en privilégiés dans l’ex-colonie britannique devenue indépendante en 1980 et dirigée depuis, de main de fer, par le président Robert Mugabe.

Peu enclins à partager leur intimité

«Ceci dit, il n’est pas toujours aisé de frayer avec les gens du lieu. Les Africains sont extérieurement chaleureux mais peu enclins à partager leur intimité », explique Marc Duvillard.

«Les familles ne s’invitent pas mutuellement chez elles, comme cela est courant ici et les plus aisées d’entre elles se retrouvent dans tel ou tel club chic».

La vie sociale de la famille Duvillard ne laisse toutefois pas à désirer. «Nous fréquentons le personnel européen et américain des ambassades et des organisations humanitaires comme le CICR avec qui nous tissons des liens durables. En fait, nous menons une vie intéressante. »

Ne jamais dire jamais

Dès lors, un retour définitif en Suisse semble exclu. «A un certain âge, il faut savoir planter ses racines et faire un choix. Mais même si la vie est plus facile au Zimbabwe que dans d’autres nations d’Afrique noire, la situation économique et politique du pays est actuellement très difficile. Il ne faut donc jamais dire jamais et on pourrait, un jour ou l’autre, devoir rentrer.»

Et les Suisses du Zimbabwe? «Il y en a très peu, environ 400 dans tout le pays», explique Marc Duvillard. « Il s’agit surtout d’Alémaniques qui ont fondé le ‘Club suisse d’Harare’ où ils se retrouvent pour jouer au jass», souligne le Genevois. A Harare, dit-il, «il n’y a que quatre à cinq Romands».

Dans son pays d’adoption, Marc Duvillard s’est fixé d’autres objectifs. Il veut relever de nouveaux défis: «nous sommes actuellement en pourparlers avec Nestlé notamment pour obtenir des fonds qui nous permettraient d’acquérir un terrain et construire un nouveau centre d’accueil pour nos jeunes», conclut-il.

swissinfo, Gemma d’Urso, Lugano

– 16 jeunes de 15 à 17 ans de l’Académie de football de Marc Duvillard effectuent une tournée de promotion en Suisse.

– Le groupe a atterri à Genève le 19 mai et est arrivée le 24 mai au Tessin.

– Accueillie par la commune de Capriasca (Lugano) pour l’inauguration de son nouveau centre sportif, la délégation a été hébergée par des familles locales.

– Du 29 au 31 mai, les jeunes joueurs de Marc Duvillard participent à un camp d’entraînement au Centre fédéral de sport de Tenero (Locarno).

– Le 1er juin, le groupe ira en Valais puis à La Chaux-de-Fonds (Neuchâtel), avant de rentrer au Zimbabwe le 13 juin.

«Aces Youth Sport and Soccer Foundation» (AYSSF) a été créée en 2001 à Harare par Marc et Gaby Duvillard avec le soutien du mécène suisse Guido Renggli.
Elle accueille 40 garçons et 20 filles de 11 à 18 ans, dont plusieurs ont perdu un ou deux parents, victimes du Sida.
Outre la formation et l’éducation, l’AYSSA veut sensibiliser les élèves à la lutte contre le Sida, qui frappe 40% de la population. Les plus doués seront dirigés vers des équipes professionnelles, notamment en Europe.
L’AYSSF (et la tournée en Suisse) est financée par la fondation «Little Dreams» basée à Nyon (Vaud) et créée en 2001 par le chanteur Phil Collins et son épouse.

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