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Moins de faux réfugiés ou plus de clandestins?

Des requérants roumains devant un centre d'enregistrement. Pas d'asile, plus d'aide sociale. Keystone

Dès le 1er avril, la Confédération coupe l’aide sociale qu’elle octroyait aux demandeurs d’asile déboutés.

Le gouvernement pense que cette mesure découragera les faux requérants. Mais les défenseurs de l’asile estiment qu’elle risque d’entraîner un accroissement du nombre de clandestins.

Cette décision s’inscrit dans le très controversé programme d’économies par lequel l’Etat central entend diminuer ses dépenses de 3,3 milliards de francs.

Le budget de l’asile est l’un des plus touchés, puisqu’il doit fondre de 137 millions dans les trois prochaines années.

A l’Office fédéral des réfugiés (ODR), on compte sur le fait que cette suppression de l’aide sociale incitera les requérants déboutés à quitter le pays.

Le gouvernement estime également que cette mesure conduira à des économies à long terme, puisqu’elle devrait décourager certains requérants de venir en Suisse.

La tâche des cantons

«Avec cette nouvelle réglementation, nous voulons rendre notre pays moins attractif pour les personnes dont la demande d’asile est infondée», explique à swissinfo Mathias Stettler, de l’ODR.

Comme la Confédération ne donnera plus rien de façon directe, il appartiendra aux cantons de fournir à ces personnes l’aide d’urgence, sous la forme d’un abri et de rations de nourriture.

L’Etat central donnera tout de même aux cantons un forfait de 600 francs par requérant pour couvrir les frais de cette aide d’urgence. Les cantons recevront en outre 1000 francs pour chaque personne renvoyée dans son pays d’origine.

Ces nouvelles règles font peur à l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR). Selon elle, les autorités cantonales ne sont pas forcément bien préparées à traiter les demandes et ne sauront pas rendre les requérants attentifs à l’aide à laquelle ils ont droit.

Economies contestées

«Nous craignons qu’avec ces mesures, de nombreuses personnes ne décident de rester illégalement dans le pays et ne se trouvent poussés à des activités criminelles», explique Jürg Schertenleib, de l’OSAR.

Selon lui, cette hausse du nombre des sans-abri et de la criminalité, ajoutée aux coûts de l’aide d’urgence, risque finalement de faire monter les frais à la charge des cantons.

Autre conséquence prévisible, selon Jürg Schertenleib, l’incarcération des requérants en attente de refoulement, qui va, elle aussi, faire monter la facture.

Un risque jugé minime

Bien que les cantons aient eu plus d’une année pour se préparer à l’entrée en vigueur de cette nouvelle réglementation, Mathias Stettler admet qu’ils ne sont pas tous forcément prêts.

«Le problème est que jusqu’ici, les cantons n’ont eu que très peu l’occasion de s’occuper de gens qui demandent cette aide d’urgence», explique le fonctionnaire de l’ODR.

Mathias Stettler ne nie pas non plus le risque de voir certains requérants entrer dans la clandestinité afin de rester en Suisse. Mais il pense qu’ils seront très peu nombreux à choisir cette voie.

L’an dernier, le nombre de requérants d’asile en Suisse a reculé de 20%, pour atteindre 20’806 nouvelles demandes. Dans le même temps, le nombre de refus est passé de 6445 en 2002 à 7818 en 2003.

swissinfo, Joanne Shields
(traduction, Marc-André Miserez)

Selon les chiffres de l’OSAR, un requérant d’asile coûte aux autorités:
50 francs par jour s’il est logé dans un abri collectif
150 francs par jour s’il est logé dans un abri d’urgence
300 francs par jour s’il est en prison

– Aux termes de la loi suisse, une demande d’asile est considérée comme infondée si le requérant ne révèle pas son identité, présente de faux papiers ou ne collabore pas pleinement durant la procédure.

– Sont également tenues pour infondées les demandes de ressortissants de pays considérés comme sûrs ou de personnes ayant séjourné un certain temps en Suisse dans l’illégalité avant de s’annoncer.

– Selon la réglementation encore en vigueur jusqu’au 31 mars, les requérants déboutés en attente de renvoi se voient offrir automatiquement une place dans un abri collectif, de la nourriture et trois francs par jour.

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