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Ni cagoules ni masques lors des manifs du G8

Tout déguisement sera interdit lors de la manifestation anti-G8. Keystone Archive

Le gouvernement genevois veut interdire le port de masques lors de la manifestation du 1er juin. Sur la base d'un règlement datant du 15e siècle.

A ce jour, seuls Bâle, Berne et Zurich interdisent de défiler masqué. Le Parlement fédéral va en débattre.

Avis aux manifestants anti-G8: le port de masques, de casques, de cagoules ainsi que tout autre déguisement sera strictement interdit lors du grand rassemblement prévu le 1er juin prochain à Genève.

C’est une des conditions posées par le gouvernement genevois pour autoriser la manifestation. Les sprays et les pots de peinture seront aussi prohibés, comme toute une série d’objets contondants.

Simultanément, le législatif vaudois a adopté mardi une résolution appelant le Conseil d’Etat à interdire les masques et les cagoules et tout objet contondant lors des manifestations altermondialistes. Mais cette résolution n’a pas force de loi.

Un règlement du 15e siècle

En Romandie, il n’existe en effet aucune loi interdisant de telles pratiques.

A Genève, le gouvernement s’est basé sur un règlement datant du 15e siècle. Il stipule que le port de masques et le travestissement sont interdits sur la voie publique.

Chaque année, les autorités doivent donc délivrer une dérogation spéciale pour les Fêtes de l’Escalade en décembre.

Base légale douteuse

Interrogé par swissinfo, Jean-Michel Dolivo, doute que «le règlement sur les spectacles et les divertissements genevois soit une base légale suffisante pour introduire cette condition au droit de manifestation».

L’avocat rappelle que «l’exercice des libertés d’expression, d’opinion et de réunion se fondent sur les constitutions fédérale et cantonale. Et aussi sur des traités internationaux que la Suisse a signé, notamment la Convention européenne des droits de l’homme».

L’auteur du récent ouvrage intitulé «Manifester: vos droits», suggère donc de déposer un recours contre cette condition. Recours qui de toute manière ne sera examiné qu’après la manifestation.

L’un des organisateurs de la grande manifestation prévue le 1er juin à Genève, le Forum social lémanique (FSL), a pour sa part déploré les mesures prises.

Il a aussi regretté que les autorités n’aient encore jamais répondu à sa requête de faire porter aux policiers chargés du maintien de l’ordre des numéros de matricule facilement identifiables en cas de bavure.

Interdictions dans les cantons

Des interdictions de défiler masqué existent en Suisse dans plusieurs cantons, à Zurich, Bâle et Berne. Mais là, il s’agit de lois qui ont été votées par les parlements.

Ces trois grandes villes alémaniques sont en effet coutumières de grandes manifestations qui peuvent potentiellement dégénérer. On connaît les débordements devenus traditionnels lors du 1er mai à Zurich.

«Mais cette loi est très difficile à appliquer. Elle peut notamment être assimilée à de la provocation», souligne le porte-parole de la Police zurichoise.

«Elle donne néanmoins aux forces de l’ordre une base légale pour agir en cas de casse, ajoute Marco Cortesi. Mais c’est très rarement le cas».

Cela dit, le Tribunal fédéral, la plus haute instance judiciaire suisse, a estimé que dans la mesure où ces lois visaient à obtenir un effet préventif lors de manifestations, elles étaient constitutionnelles.

Au niveau national

Au niveau national, pas d’interdiction non plus. Toutefois, après les débordements qui ont eu lieu à Berne en janvier en marge du World Economic Forum, le Parlement a réagi.

Le député démocrate-chrétien schwitzois Toni Eberhard a déposé une motion en mars. Elle demande au gouvernement de préparer une loi-cadre qui définisse les conditions des manifestations «ayant un caractère supra-régional».

Le texte se veut un compromis entre le droit d’expression et celui à la sécurité, en responsabilisant notamment les organisateurs.

Il y figure aussi expressément l’interdiction dans toute la Suisse du port de cagoules.

Toni Eberhard estime que «celui qui porte une cagoule est forcément malintentionné. Il n’y a aucune raison en démocratie de se cacher pour manifester».

La protection de l’identité des activistes politiques, argument avancé par certains alter-mondialistes, ne l’ébranle pas. Pas plus que le rappel historique du scandale des fiches au début des années 90.

900 000 personnes résidant en Suisse avaient en effet été fichées pour des raisons essentiellement politiques.

swissinfo, Anne Rubin

– En Suisse romande, il n’existe aucune loi interdisant le port de masques ou de cagoules lors de manifestations.

– Le gouvernement genevois se base sur un règlement sur les spectacles et les divertissements qui date du 15e siècle.

– Les villes de Bâle, Berne et Zurich ont voté des lois punissant le port de la cagoule.

– Mais elles sont rarement appliquées.

– Une motion a été déposée au Conseil National pour interdire cet usage au niveau suisse.

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