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Quand l’intégration passe par la foi

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A l'église écossaise de Lausanne, on prie en anglais et on pratique la danse traditionnelle gaélique. Un obstacle à l'intégration? Pas si sûr...

swissinfo a rendu visite à cette vénérable institution religieuse pour tenter de comprendre comment une église étrangère peut aider ses fidèles à se sentir chez eux en Suisse.

Soudain les portes de la minuscule église néo-gothique s’ouvrent et une foule métissée de fidèles de tous âges se presse sur le parvis. En cette froide matinée venteuse, quelques Africains s’activent autour du révérend Melvyn Wood, tandis que plusieurs familles font rapidement chemin vers la salle commune toute proche, où les attend une revigorante tasse de thé.

C’est en 1876 que le petit sanctuaire lausannois a été fondé par l’Eglise d’Écosse, afin de subvenir aux besoins de la petite communauté de Réformés presbytériens qui vivaient dans la région.

Aujourd’hui, le nom et les apparences sont trompeurs. Parmi les quelque 200 membres de la communauté, seul un dixième d’entre eux sont d’origine britannique, et deux fois moins encore d’origine écossaise. Pour le reste, ce sont des Américains, des Canadiens, des Australiens, des Sud-Africains et quelques Africains et Asiatiques.

«Malgré sa petite taille, l’Écosse a une longue tradition d’ouverture et de cosmopolitisme. Nous n’accueillons pas uniquement les Écossais, mais toutes les personnes d’obédience presbytérienne et celles qui ressentent une affinité avec notre tradition», explique le révérend Wood.

Loin de vouloir cultiver un quelconque sectarisme, le pasteur se montre au contraire convaincu que l’église joue un rôle important pour aider les anglophones à s’intégrer à la société suisse.

Pour les expatriés désireux de s’intégrer, l’appartenance à une communauté de foi offre plus qu’un simple club de sport ou une association: «la foi est bien plus qu’un passe-temps; elle fait partie intégrante de la vie. Elle façonne la relation aux autres et engendre des liens mutuels très forts que même le sport ne peut pas créer.»

«Il y a toutefois deux choses que les anglophones n’arrivent pas à faire dans une langue étrangère, c’est compter et prier, précise Melvyn Wood. Mais je ne pense pas que la difficulté à exprimer sa foi dans la langue du pays d’accueil soit un obstacle à l’intégration.»

Un réseau d’entraide

Pour certains membres de la communauté, l’église écossaise n’est pas seulement un lieu de culte mais elle est une sorte de seconde famille, au sein de laquelle se noue un réseau vital d’entraide et de soutien.

C’est l’avis de Gary Goodmann, qui vit à Lausanne depuis 20 ans: «L’église n’est pas forcément utile en terme d’intégration, mais elle offre un espace unique de rencontre entre des gens d’horizons différents; on s’entraide lorsque c’est nécessaire.»

Récemment arrivée en Suisse où elle a rejoint un groupe d’étude biblique, la britannique Katherine Furphy confirme ce sentiment: «Pour quelqu’un qui n’est jamais sorti de Grande-Bretagne auparavant, débarquer en Suisse peut se révéler très intimidant, même pour des choses aussi triviales que faire du shopping. Le soutien des gens de l’église est alors très précieux.»

Jenny Replogle, qui anime un groupe d’une quinzaine d’enfants et adolescents, dont beaucoup sont nés en Suisse, pense que l’église est une composante essentielle de leur identité.

«A bien des égards ils sont totalement intégrés, affirme-t-elle, mais ils aiment pratiquer leur religion en anglais car cela constitue une part de leur héritage culturel et identitaire.»

Une attitude personnelle

Hormis le culte du dimanche matin et quelques réunions de prière, l’église écossaise organise de nombreuses activités sociales telles que des ateliers d’art, des concerts, des lectures de poésie ainsi que des soirées de danse traditionnelle gaélique, «très appréciées par les Suisses», aux dires du révérend Wood.

Fidèle paroissien, Christian Anner parle de l’église écossaise comme d’un «endroit chaleureux auquel la communauté est redevable».

Mais il ajoute: «La plupart des gens ici ne sont pas intégrés… Mais ils n’en souffrent pas. Ils sont privilégiés du point de vue professionnel et savent comment communiquer. Il en va tout autrement dans la communauté brésilienne dans laquelle je vis, où les difficultés sont bien plus grandes.»

Les nouveaux arrivés reconnaissent presque unanimement que l’église a joué un rôle certes limité mais néanmoins important pour leur intégration, dont le succès se laisse expliquer par un mélange d’attitude personnelle et de circonstances favorables.

«Nous avons placé nos enfants à l’école publique et cela nous a aidés à rencontrer d’autres Suisses, confie Katherine Furphy. Mais le risque est grand de se laisser cloisonner dans le cercle des expatriés anglophones.»

«L’intégration est en partie une question de personnalité, de disposition à aller vers les autres et à accepter les valeurs et les principes d’une autre culture», complète Melvyn Wood.

«C’est un cliché de dire que les Suisses sont introvertis et difficiles à connaître. Personnellement, je n’en ai pas fait l’expérience.

Mais je reconnais qu’il y a des similitudes de caractère entre les Suisses et les Écossais. C’est peut-être la raison pour laquelle notre communauté existe depuis si longtemps en Suisse et qu’elle a su s’y intégrer mieux que d’autres.»

swissinfo, Simon Bradley
(traduction: Laurent Andrey)

L’église écossaise de Lausanne, de son vrai nom «Trinity Presbyterian Church», est l’une des deux communautés de l’Église d’Écosse en Suisse – l’autre se trouvant à Genève.

Le bâtiment, de style néo-gothique anglais, a été formellement consacré en 1877.

Il existe 13 communautés de l’Église d’Écosse disséminées en Europe. Celle de Lausanne compte environ 200 membres, parmi lesquels 5% sont Écossais.

SSR SRG Idée Suisse organise du 7 au 13 avril une semaine consacrée à l’intégration. Sous le titre «Wir anderen – nous autres – noi altri – nus auters», la SSR propose à ses auditeurs et téléspectateurs une vaste palette de sujets, dans les registres de l’information, de la documentation et de la fiction. swissinfo participe également à cette semaine spéciale, dans ses neuf langues.

Le presbytérianisme est une forme d’organisation de l’Église protestante, dans laquelle chaque communauté locale possède ses propres instances décisionnelles constituées d’un ministre et d’un conseil de laïcs appelé consistoire.

Le presbytérianisme est apparu à Genève en 1541 sous l’impulsion de Calvin, en réaction à l’organisation jugée trop hiérarchique de l’Église catholique. Il a été introduit en Écosse par le réformateur John Knox.

Il existe plusieurs Églises presbytériennes dans le monde. L’Église presbytérienne est la première confession en Écosse mais elle est également fortement implantée en Angleterre, au Pays de Galles et aux États-Unis.

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