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Sévères critiques contre le ministre de la Justice

La tension était vive entre l'ancien procureur Valentin Roschacher (à gauche) et Christoph Blocher. Keystone

Le rapport de la Commission de gestion de la Chambre basse épingle Christoph Blocher. Selon elle, le ministre a outrepassé ses compétences dans le cadre du départ du procureur de la Confédération Valentin Roschacher.

Le gouvernement nommera un jurisconsulte extérieur pour être informé le plus objectivement possible sur ce rapport. Quant à Christoph Blocher, il clame son innocence.

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Ministère public de la Confédération

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Lors de la résiliation des rapports de travail avec le procureur en juillet 2006, le ministre de la Justice a contourné le gouvernement, seul compétent en la matière, et a donc outrepassé ses compétences, selon le rapport de 101 pages publié mercredi soir.

La CdG relève que Christoph Blocher a mis fin aux rapports de travail au moyen d’une convention, sans motif au sens de la loi sur le personnel. Le rapport souligne par ailleurs que le ministre a donné au procureur des instructions relatives à l’information du public sur les procédures d’enquête en cours sans y être habilité.

En sanctionnant disciplinairement le procureur général pour non-respect de ces instructions, Christoph Blocher a porté atteinte à l’indépendance judiciaire de celui-ci.

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Commission

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Gouvernement en cause

Mais la CdG n’est pas tendre non plus avec le gouvernement. Bien que les signes de conflit entre le chef du ministère de la Justice et Police (DFJP) et le procureur général étaient visibles depuis un certain temps déjà, l’exécutif n’a pas assumé la responsabilité qui lui incombe en tant qu’autorité de nomination et de surveillance du procureur général de la Confédération.

La CdG recommande au gouvernement de se pencher sans délai sur le dossier du Ministère public de la Confédération et de prendre des mesures garantissant son indépendance et celle des magistrats qui le composent.

Elle lui demande en outre de clarifier la délimitation entre la liberté d’informer du MPC et l’activité d’information de son autorité de tutelle administrative, le DFJP.

Avis extérieur

Plut tôt dans la journée, le gouvernement avait indiqué vouloir se faire se faire une opinion aussi objective que possible de l’affaire, a expliqué son vice-président Pascal Couchepin. Pour lui, il ne s’agit pas d’un acte de défiance à l’encontre de Christoph Blocher, «bien au contraire».

Le gouvernement devra prendre position, comme de coutume, après la publication du rapport de la commission. Or une prise de position formulée par le DFJP, qui est partie dans l’affaire, pourrait donner lieu à des contestations, a expliqué Pascal Couchepin.

En revanche, un jurisconsulte, par exemple un ancien juge fédéral, ne pourra pas être soupçonné d’être impliqué. Chaque ministre pourra ainsi se faire une opinion fondée de l’affaire sur la base de son analyse du rapport de la commission de gestion.

Pour Pascal Couchepin, il est dans l’intérêt du gouvernement de parler d’une seule voix et d’éviter que chacun ajoute son grain de sel. La nomination d’un jurisconsulte est sans doute une première, en tout cas de mémoire de ministre en exercice. Mais «à problème nouveau, solution nouvelle», a conclu Pascal Couchepin.

Des accusations «intolérables»

La presse n’a pas été tendre ces derniers jours avec Christoph Blocher. Elle laissait entendre que le ministre avait poussé le procureur de la Confédération vers la porte, afin de protéger un banquier de ses proches.

Lors d’une conférence de presse tenue mercredi en fin d’après-midi, le ministre a vivement démenti avoir ourdi un complot pour faire démissionner Valentin Roschacher. Ces accusations sont «intolérables» et «portent atteinte à son honneur», a-t-il déclaré.

Il avait indiqué dans la matinée au gouvernement que toute l’affaire se basait sur des articles de presse. Christoph Blocher affirme ni avoir eu connaissance d’un tel plan contre Valentin Roschacher ni y être ou avoir été impliqué sous quelque forme que ce soit.

Le ministre a indiqué dans le cadre de l’enquête menée par la commission de gestion que les recherches n’ont pas été menées de manière objective mais tendancieuses. Les fuites dans les médias ces derniers jours ont renforcé cette impression.

La commission de gestion va continuer d’enquêter sur ce prétendu complot. Elle a chargé mercredi sa sous-commission de se procurer certains documents en Allemagne.

Un ministre en question

Christoph Blocher a été l’artisan de la montée en puissance de l’Union démocratique du centre (UDC / droite nationaliste) dans les années 1990. Son parti avait exigé son entrée au gouvernement.

Le Parlement l’avait finalement élu en 2003 à la place de la démocrate-chrétienne (PDC / centre-droit) Ruth Metzler. Bon nombre d’élus avaient alors estimé qu’un aussi rude adversaire serait plus facilement maîtrisable s’il était intégré au collège gouvernemental.

Ses quatre ans à l’exécutif n’ont en rien amoindri le mordant de l’UDC qui s’est opposée à plusieurs reprises à la ligne officielle du gouvernement, notamment en matière de politique européenne.

En cette période de campagne électorale – les élections fédérales auront lieu en octobre – et à quatre mois de la réélection du gouvernement pour un nouveau mandat de quatre ans, la question de la présence de Christoph Blocher au gouvernement redevient un thème d’actualité. Les Verts, par exemple, lient une éventuelle entrée à l’exécutif au départ du tribun zurichois.

swissinfo et les agences

Sous le feu des critiques et peu apprécié du ministre de la Justice Christoph Blocher, le procureur général de la Confédération Valentin Roschacher a quitté son poste en juillet 2006.

Le magistrat était dans le collimateur de certains organes de presse suite à l’utilisation d’un ex-trafiquant de drogue colombien comme informateur. Il a été blanchi par le Tribunal pénal fédéral (TPF) en septembre 2006.

En janvier de cette année, la délégation des finances du Parlement a constaté que Christoph Blocher avait outrepassé ses compétences en réglant lui-même les modalités de la démission de Valentin Roschacher. Il revenait au gouvernement dans son ensemble d’en décider.

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