Pour Barroso, la voie solitaire n’a aucun avenir
Un pays seul n'a pas d'avenir à l'heure de la mondialisation, a plaidé jeudi à Lausanne le président de la Commission européenne.
José Manuel Barroso a demandé également à la Suisse «un effort» pour régler le différend fiscal entre Berne et Bruxelles.
«La taille européenne est plus adaptée que jamais» pour affronter les grands défis de la globalisation, qu’il s’agisse d’énergie, de pollution ou de sécurité, a déclaré José Manuel Barroso invité jeudi à l’Université de Lausanne.
Pour le président de la Commission européenne, le pays solitaire est «perdu» dans la course économique et son influence politique est réduite à néant.
La force de l’Europe aujourd’hui, c’est d’avoir réalisé en cinquante ans «le rêve» d’une union forte de 27 membres, qui allie solidarité et «respect des différences», a souligné José Manuel Barroso.
Il a appelé à rejeter «les chimères populistes» et «les replis nationalistes» qui menacent à nouveau après les récents échecs de la construction européenne.
Ne pas subir
Face aux Etats-Unis, à la Russie «plus affirmative», à l’Inde ou à la Chine, les leaders politiques doivent avoir le courage de dire qu’il faut «utiliser la dimension européenne». Si certains d’entre eux ne font pas ce choix avec le coeur, «tous doivent le faire avec la raison». Faute de quoi «ils subiront les décisions prises par d’autres», avertit le chef de l’exécutif européen.
Interrogé sur de telles convictions par rapport à la Suisse qui ne veut pas rejoindre l’Union européenne (UE), José Manuel Barroso a relevé qu’elle est «de facto plus impliquée» économiquement dans l’UE que certains pays membres. La Suisse «est aussi plus dépendante de l’Europe», a-t-il remarqué avec le sourire.
Le village d’Astérix sans les Romains
«Mais nous ne faisons aucune pression» pour que la Suisse devienne membre de l’Union européenne, «nous respectons pleinement ses choix».
Le président de la Commission estime même que la présence de la Suisse réfractaire au coeur de l’Europe montre que l’UE n’est «pas un empire impérialiste». La Suisse est un peu «un village gaulois, mais sans Romains qui veulent le conquérir».
Questionné à l’issue de son discours sur le différend entre la Suisse et la Commission européenne à propos de certains régimes fiscaux cantonaux, José Manuel Barroso a demandé à Berne de s’atteler à résoudre la question.
«Nous sommes dans le meilleur esprit, mais nous pensons effectivement que cela requiert aussi un effort de la part des autorités suisses».
Trouver une solution
«Je tiens à souligner les excellents rapports que nous avons avec les Suisses», a-t-il déclaré en mentionnant les référendums victorieux sur des enjeux européens. «Nous espérons que nous allons trouver une solution», a-t-il glissé avant de s’engouffrer dans sa voiture et de quitter l’université.
Avant sa conférence, José Manuel Barroso a brièvement visité la Fondation Jean Monnet pour l’Europe qui a organisé l’événement en partenariat avec le Centre européen de la culture de Genève. Il a félicité ces institutions pour leur travail sur l’Europe et rappelé «les moments importants» qu’il a lui-même passés en Suisse lorsqu’il y étudiait.
Le président de la Commission a salué la mémoire du professeur Henri Rieben, «le plus européen des Vaudois», qui a consacré sa vie à la construction européenne et à la Fondation.
Au moment de s’installer dans son nouveau bureau au Berlaymont à Bruxelles, les bibliothèques étaient vides, a-t-il raconté. Et les premiers livres reçus furent les célèbres ‘Cahiers rouges’ édités par Henri Rieben.
swissinfo et les agences
Pour la Commission européenne, les privilèges fiscaux accordés par certains cantons suisses à des entreprises étrangères sont contraires aux Accords de libre-échange de 1972 conclus entre la Suisse et l’UE.
Ces régimes particuliers concernent les sociétés holdings étrangères dont le siège se situe dans un pays membre de l’UE mais dont les bénéfices sont imposables à l’étranger.
L’UE somme la Suisse d’abandonner cette pratique fiscale et de s’adapter à ses exigences. Elle demande à ses Etats membres de la mandater en vue de négociations avec la Suisse, afin de trouver une solution.
L’article 23.iii des Accords de libre-échange entre la Suisse et l’UE de 1972 stipule que «toute aide publique qui fausse ou menace de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions» est contraire à l’accord.
L’accord de 1972 concerne exclusivement le commerce de certains biens (produits agricoles et industriels).
La Suisse estime que l’imposition des sociétés n’entre pas dans le cadre de cet accord.
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