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Affaire de l’amiante: la Suva déboutée

Pour Eternit, les suites de l'affaire de l'amiante ne sont pas encore terminées. Keystone

Le Tribunal fédéral oblige la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (Suva) à transmettre de nouveaux dossiers sur les victimes de l'amiante au Parquet de Turin.

Opposée à cette entraide, la Suva ne cache pas ses craintes de tomber à son tour dans le collimateur des juges italiens.

En 2004, le procureur de Turin Raffaelle Guariniello avait adressé une demande d’entraide complémentaire à la Suisse. Le magistrat enquête depuis plusieurs années sur les décès de travailleurs italiens victimes d’un mésothéliome ou d’un cancer des poumons après avoir travaillé dans les entreprises suisses d’Eternit, à Niederurnen (Glaris) ou Payerne (Vaud).

Suite à une précédente demande d’entraide, déposée en 2001, la Suva avait dû remettre au Parquet de Turin les dossiers en sa possession concernant une douzaine d’ex-employés d’Eternit décédés en Italie. En janvier dernier, la justice glaronnaise avait exigé qu’elle fournisse aux enquêteurs des informations supplémentaires.

Données personnelles

Les indications qui seront transmises aux enquêteurs italiens contiennent les données personnelles et le diagnostic de 196 employés des usines Eternit pour lesquels la Suva avait ouvert un dossier d’assurance-maladie professionnelle en relation avec l’amiante. 62 d’entre eux sont tombés malades ou sont décédés d’une affection provoquée par cette substance.

Les actes qui seront envoyés aux magistrats italiens contiennent par ailleurs 367 documents concernant les usines de Payerne et de Niederurnen. Le Tribunal fédéral (TF) a rejeté les recours d’Eternit et de la SUVA.

Opposée à la requête du parquet de Turin, la Caisse nationale avait affirmé ne pas vouloir donner suite à ce qu’elle avait appelé une «fishing expedition».

Il ne s’agit plus pour les enquêteurs de trouver des éléments «à charge» pour étayer de premiers soupçons, lui rétorque le TF. L’enquête n’en est plus à ce stade. Les documents envoyés aux magistrats italiens devraient leur permettre d’établir s’il y a d’autres victimes et de se prononcer sur le comportement des responsables d’Eternit.

Craintes de la Suva

En réponse aux craintes exprimées par la Suva, le TF relève qu’elle ne risque aucun reproche pour violation du secret de fonction. Elle est autorisée, en vertu de la Loi fédérale sur l’assurance-accidents, à transmettre ces dossiers.

Pour justifier son opposition à la demande d’entraide des enquêteurs italiens, la Caisse nationale avait exprimé d’autres appréhensions, notamment la crainte que les juges de la Péninsule contrôlent ses activités et enquêtent sur certains de ses collaborateurs.

Le TF précise qu’il appartiendra au ministère de justice et police (DFJP) de se prononcer sur ce point. Il devra examiner la plainte de la Suva au terme de la procédure engagée devant le TF. De plus, sa décision pourra être attaquée par un recours au gouvernement.

Porte-parole de la Suva, Erich Wiederkehr indique que la Caisse nationale a pris connaissance de la décision du TF. Les dossiers ne pourront toutefois pas être remis aux enquêteurs italiens avant que le DFJP n’ait rendu sa décision.

Le parquet de Turin enquête contre une dizaine de personnes, en particulier contre les industriels suisses Stephan et Thomas Schmidheiny, anciens actionnaires majoritaires d’Eternit.

swissinfo et les agences

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L’amiante désigne diverses roches naturellement fibreuses. Dotée de particularités très intéressantes (résistance à la chaleur, élasticité, conductibilité thermique et électrique élevée), l’amiante a été utilisée de manière intensive depuis les années 1930.

On a commencé à exiger des contrôles sanitaires dès les années 1940, puis, au fil des ans, on s’est aperçu que les fibres d’amiante, qui se dispersent très facilement dans l’air, pouvaient avoir des conséquences graves sur la santé.

L’amiante provoque en particulier des plaques pleurales, l’asbestose et des cancers. Les affections peuvent se manifester jusqu’à 40 ans après une première exposition.

La Suisse a interdit le flocage à l’amiante en 1975. Une interdiction générale de l’amiante est en vigueur depuis 1990.

Aujourd’hui, 40 pays interdisent l’amiante. Mais, ce produit est encore très utilisé en dépit de sa nocivité. Les principaux producteurs sont la Chine, la Russie et le Kazakhstan.

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