Des perspectives suisses en 10 langues

Le Rapport Bergier, pour tous… ou presque

swissinfo.ch

Un livre et une double exposition au Château de Prangins reviennent sur les conclusions du rapport Bergier.

Ils veulent relancer le débat sur l’attitude de la Suisse durant la Seconde Guerre mondiale. Un débat toujours controversé.

«J’espère qu’il y aura enfin un véritable débat, et que ce débat débordera dans la classe politique qui l’a jusqu’ici écarté», a déclaré jeudi le professeur Jean-François Bergier, qui a présidé la commission d’experts chargée d’enquêter sur le comportement de la Suisse face au régime national-socialiste allemand.

Instituée fin 1996, la commission Bergier a rendu son rapport cinq ans plus tard. En mars 2002, elle publiait la somme de ses travaux, soit plus de 11’000 pages réparties en 28 volumes.

Une version ‘grand public’

Un rapport de synthèse de 600 pages sortira en parallèle, mais il manquait jusqu’ici un ouvrage destiné au grand public. C’est désormais chose faite avec «Les Suisses et les nazis: le rapport Bergier pour tous» qui paraît cette semaine en librairie.

L’ouvrage, qui a été préfacé et supervisé par Jean-François Bergier, revient dans un style clair et lisible sur les principaux travaux de la commission d’experts indépendants.

Pietro Boschetti soulève, chapitre par chapitre, les points essentiels de l’histoire suisse durant la guerre: la politique en matière d’asile, la politique économique, le rôle de la place financière suisse et l’or de la Banque Nationale.

Mais aussi des aspects méconnus comme les initiatives commerciales des CFF dans le transit des marchandises entre l’Allemagne et l’Italie, celui des personnes et des militaires, la fourniture de courant électrique sans oublier le traitement des travailleurs forcés et des prisonniers de guerre dans les filiales des entreprises helvétiques sur sol allemand.

«Les conclusions du rapport Bergier sont infiniment plus nuancées qu’on ne le croit et elles sont riches en informations inédites», souligne Pietro Boschetti. Fait rare, les chercheurs ont eu un accès illimité aux archives des entreprises suisses.

Démission des uns, engagement des autres

«Ce livre est le survivant d’un projet qui a subi des difficultés», a expliqué à la presse le professeur Bergier. A l’origine, deux livres devaient voir le jour, l’un en français, l’autre en allemand, réalisés par deux auteurs différents.

«Mais la fondation privée qui soutenait le projet a brusquement retiré ses billes, probablement sous l’effet de pressions», a expliqué M. Bergier. Pour le professeur, ces pressions proviendraient d’un lobby «anti-rapport Bergier» très actif en Suisse alémanique ainsi que d’associations proches de l’UDC.

Finalement, seule la version française de cet ouvrage tout public verra le jour grâce à l’engagement de l’auteur, le journaliste et historien Pietro Boschetti, et des Editions Zoé, qui assument le risque commercial. Ce livre de 190 pages a été tiré à 3000 exemplaires, un «gros» tirage pour la Suisse romande.

Double exposition

Le Château de Prangins, l’antenne romande du Musée national suisse, s’associe à sa manière à cette pubication, à travers une double exposition, agrémentée de débats public.

Il accueille pour la première fois en Suisse romande l’exposition itinérante «Le rapport Bergier», qui a déjà fait escale à Berne, Zurich, Liestal, Aarau et Shaffhouse.

L’exposition, qui a suscité un vif intérêt, terminera son parcours à Prangins. Le musée montre en parallèle une version réduite de l’exposition-témoignage d’Archimob «L’Histoire c’est moi. 555 versions de l’histoire suisse 1939-1945», réalisée sous la houlette du cinéaste Frédéric Gonseth. La version complète de l’exposition est visible à Neuchâtel jusqu’au 30 janvier.

«L’association des deux expositions met en évidence le problème de la confrontation entre la mémoire et l’histoire, entre l’image transmise par la mémoire et les informations que les sources transmettent à l’historien», relève Jean-François Bergier.

swissinfo et les agences

«Les Suisses et les nazis: le rapport Bergier pour tous», 2004, est publié aux Editions Zoé, Genève.

«Le rapport Bergier» et «L’Histoire c’est moi. 555 versions de l’histoire suisse 1939-1945», double exposition à voir au Château de Prangins jusqu’au 30 janvier 2005.

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision