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Procès Swissair: la balle dans le camp des juges

Mario Corti s'exprimant en marge du procès Swissair (Reuters)

Les dés sont jetés pour les 19 anciens managers et conseillers de l'ancienne compagnie nationale Swissair qui ont comparu devant le Tribunal de district de Bülach. Le verdict ne tombera pas avant fin mai.

Si neuf des accusés – qui ont tous plaidé non coupables – ont choisi de se taire durant les audiences, le dernier patron du groupe a saisi l’opportunité du procès pour s’expliquer publiquement.

Le dernier plaidoyer a été prononcé vendredi et les juges doivent maintenant délibérer. Mais le verdict du plus grand procès économique en Suisse ne tombera pas avant la fin du mois de mai.

Il aura fallu 29 jours d’audience, quatre procureurs et trois juges pour mener la procédure contre les anciens responsables de Swissair. La balle est maintenant dans le camp du triumvirat des juges du Tribunal de district, présidé par Andreas Fischer.

Des peines de prison et pécuniaires

Au terme de trois longues journées de réquisitoire, le Ministère public a exigé des peines de prison de 6 à 28 mois et pécuniaires de 38’000 à plus d’un million de francs, selon les capacités financières des prévenus.

Principal accusé, Mario Corti est le seul à risquer une peine ferme. Le procureur en chef Christian Weber a réclamé 28 mois, dont six ferme, et une peine pécuniaire de 1,08 million de francs.

Après le dernier patron de SAirGroup, l’ancien chef des finances Georges Schorderet est le plus lourdement chargé, avec 18 mois de prison et une peine pécuniaire de 180’000 francs requis contre lui.

Philippe Bruggisser, instigateur de la stratégie du chasseur, souvent considérée comme la véritable cause de la débâcle de Swissair et patron du groupe de 1997 à 2001, fait l’objet de 15 mois de prison et 150’000 francs de peine pécuniaire.

Le procureur réclame des peines de 8 mois de prison et de 90 000 francs contre Eric Honegger, président du conseil d’administration de SAirGroup et directeur de janvier à mars 2001.

Contre les huit autres anciens membres du conseil d’administration, il a requis des peines de prison de 6 mois à 10 mois avec sursis.

Une accusation bancale et contradictoire

Les 19 accusés, qui ont presque tous appartenu à l’élite économique de la Suisse des années 1990, ont plaidé non coupables. Leurs avocats ont demandé l’acquittement et une indemnisation.

Pour la défense, les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis ont changé la donne et empêché la stratégie prévue de se réaliser.

Contradictoire, incompréhensible, bancal ont figuré parmi les descriptifs de la défense pour qualifier l’acte d’accusation et le rapport d’expert l’appuyant. La défense a aussi fustigé le défaut de preuves, et certains avocats n’ont pas manqué de souligner que la procédure obéissait à des motifs politiques.

Certains avocats ont dénoncé un procès-spectacle. Mais les débats n’ont pas suscité autant d’intérêt que prévu. Ce sont surtout les prestations très théâtrales de Mario Corti ou plus réservées de Philippe Bruggisser qui ont attiré les curieux.

Mario Corti a joué son va-tout en présentant un document au dernier jour de sa défense prouvant que le groupe était encore viable et accusé les grandes banques, surtout l’UBS, d’avoir «enlevé la prise».

Un mauvais message

Malgré la nature des peines requises par les procureurs, les experts ne s’attendent pas à de condamnations majeures. La question qui aura prédominé le procès a été de savoir si l’on peut condamner ou non de mauvaises décisions stratégiques.

«Je serais pas surpris que tous les accusés soient relaxés. Enormément d’argent a été dépensé pour cette comédie ou tragédie – voire les deux à la fois», affirme Eugen Curti, un avocat basé à Zurich et interrogé par swissinfo.

Chef du personnel de Swissair au moment de la crise, Matthias Mölloney va même plus loin et estime que des peines de prison enverraient un mauvais message.

«Il serait très difficile pour la compagnie actuelle Swiss de trouver des gens susceptibles de s’engager pour elle à l’avenir, explique-t-il à swissinfo. Il n’y aura plus de volontaires si ceux-ci pensent qu’ils risquent la prison.»

swissinfo et les agences

Le procès de la débâcle du groupe Swissair a duré du 16 janvier au 9 mars. Les audiences du Tribunal de district étaient ouvertes au public et se sont déroulées dans la salle communale de Bülach.


Pour les 19 accusés, le Ministère public a exigé des peines de prison de 6 à 28 mois et pécuniaires entre 40’000 et plus d’un million de francs. Principal accusé, le dernier patron de SairGroup Mario Corti est le seul à risquer une peine ferme


Le Ministère public zurichois a auditionné plus de 300 personnes pendant 40’000 heures et a ordonné vingt perquisitions. Il a produit un acte d’accusation d’une centaine de pages.

Le coût du procès est évalué entre 4 et 5 millions de francs, sans compter les salaires des employés de l’Etat.

Le verdict est attendu au plus tôt pour la fin du mois de mai 2007.

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