Henri Matisse, tout en couleurs
La Fondation Beyeler, à Riehen (Bâle), propose une très riche rétrospective de l'œuvre du peintre français Henri Matisse.
Elle salue la peinture vivifiante de l’artiste, qui dépassa largement le fauvisme auquel il doit sa célébrité.
Matisse, comme la plupart des grands artistes, est un peintre singulier, qui développa sa pratique en dehors des grands courants contemporains, comme le cubisme ou l’abstraction construite.
Certes, son nom est rattaché au fauvisme, dont il fut, à son corps défendant peut-être, le chef de file. Mais le fauvisme, s’il a marqué l’histoire de l’art, en cette année 1905 où se virent réunis dans une même salle des peintres aussi provocateurs, dans la gamme de leur coloris, que Maurice de Vlaminck, André Derain, Albert Marquet, Othon Friesz et, considéré comme le plus audacieux, Henri Matisse, ne dura pas.
De toute beauté
Une rétrospective Matisse, riche de 160 œuvres qui plus est, est un événement marquant, en Suisse où on ne l’avait exposé sur une grande échelle depuis près de vingt-cinq ans.
L’exposition de la Fondation Beyeler à Riehen près de Bâle, conçue en collaboration avec la Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen de Düsseldorf, est de toute beauté.
Simplement accrochés à des cimaises blanches, les tableaux, centrés sur le thème de la figure féminine dans un intérieur, marquent les étapes de la réflexion de Matisse sur les concepts de forme et de fond, de couleur et d’espace.
La toile, lieu ouvert
L’espace, justement, est traité de manière tout à fait nouvelle. Jouant d’éléments décoratifs (des tissus, un bocal de poissons rouges, une porte-fenêtre, des tables et des vases de fleurs), plus ou moins liés à un environnement paisible et harmonieux, l’artiste s’attache à les répartir sur la surface de sa toile et à les traiter de telle sorte que la composition s’offre à la fois comme un morceau de peinture et comme un lieu ouvert.
L’ouverture se voyant signifiée par la présence d’un miroir qui reflète la mer, d’un tableau dans le tableau, d’une fenêtre captant la lumière, ou simplement par l’importance accordée, dans les papiers découpés de la fin de la vie, au fond blanc qui interfère avec le motif, comme dans les versions du «Nu bleu».
(Re)découvrir
Les principaux chefs-d’œuvre sont représentés, à toutes les périodes. On découvre ou redécouvre, comme dans un livre, mais en mieux c’est évident, ces tableaux très typiques que sont «Femme à la fontaine» (1909), «La séance de peinture» (1918-19).
Ou la «Figure décorative sur fond ornemental» de 1925-26, où l’artiste insiste, dans le titre même, sur le rôle du motif décoratif, qu’il a contribué à revaloriser, ou encore «La musique» de 1939.
Matisse est mort en 1954. Sa peinture, avec ses formes bien découpées et ses couleurs cassées, n’a pas perdu de sa fraîcheur et de son pouvoir de fascination.
swissinfo, Laurence Chauvy
«Henri Matisse – Figure couleur espace», à voir jusqu’au 9 juillet à la Fondation Beyeler à Riehen (Bâle).
Musée ouvert tous les jours de 10 h à 18 h, le mercredi jusqu’à 20 h. Le musée est ouvert tous les dimanches et les jours fériés.
Henri Matisse: peintre français (1869-1954). Artiste associé au fauvisme, point de départ pour lui d’une démarche picturale plus vaste.
Après les œuvres fauves («La Fenêtre à Collioure, 1905, «La Femme au chapeau», 1906), il effectuera un travail sur la pureté des lignes («La Danse et la musique», 1910).
Alternent dans l’évolution du peintre des recherches sur la lumière — les années de Nice —, sur la couleur, sur l’architecture et la bi-dimensionnalité du tableau (les «Odalisques»), les compositions monumentales, hautement stylisées…
«L’œuvre trouve son apothéose dans les papiers découpés des dernières années, formes épurées sculptées à même la couleur dans un lyrisme serein et éblouissant» (Encyclopédie de l’Agora).
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