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L’inconnue du Rhône

Enterrée au pied des tours de Saillon, l’inconnue du Rhône garde son secret. swissinfo.ch

Si Farinet, après avoir été jeté dans une fosse commune, repose désormais derrière l’église de Saillon, il est une autre tombe, plus bas dans la plaine, qui intéresse particulièrement les Amis du hors-la-loi épris de justice et de liberté.

Au printemps 1978, des pêcheurs retrouvent dans le fleuve le corps d’une femme décapitée que personne n’est capable d’identifier. Les Amis de Farinet décident alors d’en faire la petite soeur de leur héros et se chargent de l’enterrement à Saillon, avec pour seule mention sur la pierre «l’Inconnue du Rhône.»
Chaque année, le 1er juin, ils organisent une cérémonie du souvenir où l’on médite sur les mystères de la vie et de la mort. Et comme le relève fièrement Pascal Thurre, journaliste, homme de lettres et Ami de la première heure de Farinet, «aucun président du parlement de ce canton n’a encore osé manquer ce rendez-vous annuel.»

Les Amis de Farinet ont également fait appel à la générosité populaire pour faire ériger un monument de plusieurs tonnes au bord du fleuve. Le jour de son inauguration, les pilotes des glaciers et les champions suisses de vol libre ont largué 10’000 pétales de roses au-dessus des eaux grises du Rhône.

Le plus étonnant, c’est que plusieurs familles, de Suisse et d’ailleurs, qui pourraient être liées à l’Inconnue, ont toutes refusé que l’on pratique sur elles un test ADN qui permettrait de savoir enfin qui elle était réellement. Ainsi, les gens qui viennent régulièrement se recueillir sur la tombe préfèrent-ils continuer à ignorer si celle qui repose là est bien la fille, l’épouse ou l’amie disparue et jamais rendue.

«Seul le mystère est grand, il faut le laisser, ne pas le réveiller», commente Pascal Thurre.
Un mystère qui a inspiré nombre de poètes, parmi lesquels Jack Rollan. Après avoir ravi trois générations de Romands par ses traits au vitriol, le vieil humoriste se fait humble et lyrique pour écrire ceci:

«Est-ce un amoureux fou, aveuglé par la haine
Ou le Rhône jaloux de tes yeux de sirène
Qui aurait emporté dans ce geste sauvage
La secrète beauté de ton précieux visage?»

swissinfo, Marc-André Miserez à Saillon

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