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Dernier examen pour le programme d’armement

Keystone

Durant la session d'automne, la Chambre basse du Parlement doit s'exprimer sur un crédit de 917 millions de francs destiné à des achats d'armement. Mais ce budget pourrait se heurter à l'alliance entre l'Union démocratique du centre (UDC / droite nationaliste) et le Parti socialiste.

Au mois de juin, la Chambre des cantons (Conseil des Etats) avait approuvé l’octroi du crédit qui servira principalement à acheter des nouveaux véhicules de transport de troupes et d’exploration ainsi des équipements de dépistage de matériels radioactifs et toxiques. La somme sera également utilisée pour moderniser la flotte des F/A-18.

Ces avions pourront ainsi encore remplir leur rôle durant une quinzaine d’années. Mais cela coûte cher: sur un budget total de 917 millions, 404 millions sont prévus dans ce seul but.

Toujours durant la session d’été, les sénateurs avaient rejeté la proposition Gisèle Ory demandant de renvoyer cette modernisation tant qu’aucune décision définitive n’a été prise sur le remplacement d’un autre jet de combat, le Tiger. La sénatrice socialiste estime que l’équipement des F/A-18 est pour l’heure suffisant.

Le maintien des capacités opérationnelles du F/A-18 est en effet lié au remplacement partiel des 54 Tiger. L’appel d’offre, d’un montant d’environ 2,2 milliards de francs, est actuellement en cours. Le ministre de la Défense Samuel Schmid a cependant récemment affirmé qu’avant tout achat, il fallait encore effectuer des vérifications par rapport aux coûts d’exercice et au changement de génération des pilotes.

Les Tiger objet de discorde

Selon le Groupe pour une Suisse sans armée, les Verts et les socialistes, le remplacement des Tiger pourrait cependant s’avérer beaucoup plus onéreux que ce que prétend le Département fédéral de la défense, accusé de ne pas prendre en compte les frais liés à l’importation du matériel nécessaire pour la manutention.

«L’achat des nouveaux avions coûterait en réalité à la Suisse 6 milliards de francs: il s’agit d’une dépense totalement inutile au moment même où l’on économise dans des secteurs comme le social, la formation et l’aide au développement. Les attentats du 11 septembre 2001 ont démontré que même les armées les plus puissantes ne sont pas en mesure de prévenir les attaques», affirme Marina Carobbio, députée socialiste et membre de la direction du parti.

La question de la protection de l’environnement fait également parti des arguments des opposants. Ils sont d’avis que les jets de combat de nouvelle génération sont extrêmement polluants tant sur le plan des émissions de CO2 que sur celui du bruit.

Le Département fédéral de la défense soutient en revanche qu’il est indispensable de remplacer les Tiger. Dans la cas contraire, les seuls F/A-18 ne seraient pas en mesure de garantir la sécurité de l’espace aérien suisse 24 heures sur 24. Ce avis est partagé par le Parti radical (PRD / droite) et le Parti démocrate-chrétien (PDC / centre-droit) pour qui l’armée doit disposer des moyens d’effectuer les missions qui lui sont assignées.

Une alliance insolite?

Lors du débat de la Chambre basse sur le Programme d’armement, le camp des opposants à la modernisation du F/A-18 et de l’achat de nouveaux avions pourra compter sur un contexte particulièrement favorable.

En effet, le ministre de la Défense, qui a toujours souligné la nécessité absolue du crédit, est dans la ligne de mire de ses anciens camarades de l’UDC qui menacent de saboter tout budget pour l’armée tant que Samuel Schmid n’aura pas démissionné. On se souvient que le ministre de la défense avait quitté l’UDC pour adhérer à un nouveau parti.

Début août, Samuel Schmid a publiquement avait publiquement pris position sur cette demande de démission. «Il n’est pas acceptable que l’armée et le Département de la défense deviennent otages d’un parti politique».

Samuel Schmid est cependant confronté à un sérieux problème de crédibilité, suite à son rôle dans le récent scandale qui a conduit au départ du commandant de l’armée Roland Nef. L’UDC exige d’ailleurs que l’ensemble du ministère fasse l’objet d’un examen approfondi dans le cadre de cette affaire.

De son côté, le Parti socialiste a déclaré ne pas être fermé à une alliance – somme toute contre-nature – avec la droite nationaliste. Son porte-parole Peter Lauener a ainsi affirmé que le PS n’a rien à redire si les «disputes infantiles» de l’UDC devaient contribuer à une limitation des dépenses militaires.

Le président du parti Christian Levrat a quant à lui souligné que son parti ne s’opposerait pas à l’ensemble du budget militaire, mais uniquement aux dépenses concernant les avions de combat.

Une initiative dans l’air

Pour sa part, le Groupe pour une Suisse sans armée a lancé une initiative populaire demandant que l’achat de nouveaux avions fasse l’objet d’un moratoire de 2010 à 2019. Pour le moment, 45’000 signatures ont déjà été récoltées.

Un sondage réalisé par l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) dans le cadre de l’étude «Sécurité 2008» montre que seulement 42% des personnes interrogées sont favorables à l’achat d’un nouvel avion de combat alors que 49% s’y opposent.

Quoi qu’il en soit, le Groupe pour une Suisse sans armée devra encore trouver 55’000 signatures pour que la question soit posée à l’ensemble des citoyens.

swissinfo, Andrea Tognina
(Traduction de l’italien : Olivier Pauchard)

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L’armée suisse a dû faire face depuis plusieurs mois à une série d’affaire qui ont entamé sa crédibilité.

Eté 2008: le chef de l’armée est contraint au départ après que la presse eut révélé qu’il avait harcelé son ex compagne après leur rupture. Samuel Schmid n’avait pas informé ses collègues du gouvernement que Roland Nef avait fait l’objet d’une enquête.

Juin 2008: un stage dans les eaux de la Kander coûte la vie à cinq soldats. L’affaire se solde par la démission du chef des forces aériennes, car le commandant responsable du stage n’avait pas l’âge requis pour exercer un commandement.

Juin-juillet 2008: à deux reprises, la garde tire accidentellement un coup de feu. Au début de l’année, l’armée avait décidé que la garde devait être posée avec une balle déjà engagée dans le canon, ce qui avait suscité une polémique.

Juillet 2007: cinq soldats meurent lors de l’escalade de la Jungfrau. Des guides de montagne civils avaient déconseillé l’exercice en raison de la situation météo.

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