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Dinos de l’Atlas, une découverte exceptionnelle

Le gisement, et en contre-bas, le village de Tazouda. MNHN/P.Richir

La richesse du site de Toundount, au Maroc, a été confirmée par le baptême officiel de «Tazoudasaurus Naïmi».

Un dinosaure herbivore vieux de 180 millions d’années, découvert par une équipe internationale dans laquelle figurent des chercheurs suisses.

Avril 2002, site de Tazouda, à côté de Toundount, dans le Haut-Atlas marocain. Le paléontologue français Philippe Taquet est au travail, ainsi que les membres marocains, français, suisses et américains de l’équipe de chercheurs qu’il coordonne.

«Ce serait de la science-fiction que de vous dire ce que c’est. Ce sera seulement lorsqu’on aura comparé ces pièces avec d’autres, trouvées ailleurs, qu’on pourra éventuellement dire: c’est nouveau, c’est la même chose ou c’est différent», nous disait-il alors.

A l’époque, le climat est à la discrétion: il est même interdit de photographier les fouilles, les pièces qu’on y trouve… et ceux qui les trouvent (voire notre dossier spécial «Les Dinos de l’Atlas»).

Parmi ceux-ci, le géologue suisse Michel Monbaron, professeur à l’Université de Fribourg, qui à son retour en Suisse, soulevait un coin du voile en évoquant la découverte de «pièces superbes»: «Un véritable trésor paléontologique. On sait déjà que c’est très important, mais cette importance sera précisée par la suite.»

La suite, nous y sommes. Avec une publication des résultats dans la célèbre revue scientifique «Nature», et une présentation officielle qui a eu lieu cette semaine au Maroc.

Le saurien de Tazouda

«Tazoudasaurus» pour «le saurien de Tazouda», du nom du petit village situé en contrebas des fouilles, non loin de Toundount, à une soixantaine de kilomètres de Ouarzazate. «Naïmi», mot arabe, en référence à la taille modeste de l’animal, que Philippe Taquet compare volontiers à «un gros rhinocéros avec un très long cou et une très longue queue».

Car par rapport aux brachiosaures et autres diplodocus, ce sauropode-là est plutôt petit: 9 mètres de long. Plus petit, mais plus vieux: l’animal vivait il y a 180 millions d’années (Jurassique inférieur), bien avant que le groupe des sauropodes ne s’épanouisse, au Jurassique moyen, et donne naissance aux célèbres géants.

C’est son âge, justement, qui le rend particulièrement intéressant, car on connaît très mal cette période. Parmi les pièces retrouvées, des vertèbres cervicales, dorsales et caudales, des os des membres et des ceintures. Et surtout, découverte exceptionnelle, les éléments du crâne, dont une mandibule comportant 17 dents. Ce sont les plus anciens restes crâniens connus d’un sauropode.

Les restes en question, ainsi que les éléments d’autres dinosaures et les nombreux débris végétaux fossilisés qui ont été trouvées sur ce gisement apportent donc un éclairage passionnant sur cette période. Une époque où l’Amérique du Nord était encore soudée à l’Afrique.

Mais alors que ces couches ont été enfouies aux Etats-Unis sous les sédiments des Appalaches, elles sont particulièrement bien conservées et accessibles au Maroc. Pour Philippe Taquet, les Américains doivent donc «venir au Maroc, dans l’Atlas, pour connaître l’origine de leurs diplodocus»!

Du gisement au musée

Lundi, dans la capitale marocaine, le ministre marocain de l’Energie et des Mines, Mohammed Boutaleb, a d’ailleurs évoqué la richesse et la grande diversité du patrimoine paléontologique du Maroc, «véritable livre ouvert» sur les étapes de la formation de la planète.

Rappelons que le fameux «Atlasaurus Imelakei», découvert il y a une vingtaine d’années par Michel Monbaron au nord de l’Atlas, date quant à lui de 160 millions d’années. Il est actuellement exposé au Musée des sciences de la Terre de Rabat.

Suite aux découvertes de Toundout, les autorités marocaines comptent d’ailleurs construire un musée sur le site paléontologique lui-même. Un musée qui permettrait au public d’assister aux recherches en cours..

Car la pente de Tazouda est peut-être loin d’avoir livré tous ses secrets.

swissinfo, Bernard Léchot

– «Tazoudasaurus Naïmi» est un sauropode âgé de 180 millions d’années. Il date donc du jurassique inférieur, une période jusque là très mal connue en matière de dinosaures.

– Il a été découvert à une soixantaine de kilomètres de Ouarzazate, dans le Haut-Atlas marocain, dans le cadre de l’opération «Dino Atlas», qui réunit le Ministère marocain de l’Energie et des Mines, le Muséum d’histoire naturelle de Paris (F), l’Université de Fribourg (CH) et l’Université de Raleigh (USA).

– Le géologue suisse Michel Monbaron, professeur à l’Université de Fribourg, était à l’origine de la découverte d’un autre dinosaure marocain, «Atlasaurus Imelakei », exposé à Rabat.

– Le présentation officielle de «Tazoudasaurus Naïmi» a eu lieu cette semaine au Maroc. Cette découverte fait l’objet d’une publication dans la revue scientifique «Nature».

– swissinfo avait couvert les recherches de Toundout au printemps 2002 à travers un dossier spécial intitulé «Les Dinos de l’Atlas».

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