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Le plastique est-il au menu des poissons de l’Antarctique?

Looking for the longline
À la recherche de la palangre © Kevin Leuenberger

Après environ trois semaines de voyage en mer, le navire de recherche Polarstern est arrivé sur notre principal lieu d'échantillonnage en Antarctique. La glace et les icebergs s'étendent à perte de vue, mais les plastiques ne sont pas visibles à l'oeil nu. Pour savoir si les poissons ingèrent des microplastiques, nous devons examiner l'intérieur de leur tube digestif.

Fish dissection

À bord du navire, chaque poisson capturé est disséqué pour en retirer le tube digestif, qui est ensuite conservé en vue d’une analyse ultérieure au laboratoire de Bâle. Les poissons sont également utilisés pour d’autres types d’analyses. Aucune partie du poisson n’est gaspillée. Nos collègues à bord du Polarstern prélèvent des échantillons de sang et de tissus sur le foie, les gonades, les nageoires, les muscles, les yeux et les otolithes, de petits os dans la tête des poissons qui les aident à garder l’équilibre. 

Deploying the lander
Déploiement de la sonde
Deploying the longlines
Déploiement des palangres

Mais avant cela, il faut d’abord capturer les poissons. Nous utilisons différents types d’engins, comme des atterisseurs avec des pièges à poissons ou des palangres, qui sont couramment utilisés dans la pêche commerciale. Comme vous pouvez le voir sur la photo ci-dessus, cet appareil se compose d’un cadre auquel sont fixés les pièges à poissons (structures en forme de panier). Des poids sont fixés aux pieds de cette structure, qui entraîne l’ensemble du dispositif au fond de la mer. L’atterrisseur est ensuite laissé sur place pendant 24 heures, avant que nous ne retournions à la position enregistrée par GPS.

Contenu externe

Pour récupérer le dispositif, les poids sont libérés à distance, puis les grandes bouées orange, que vous pouvez voir en haut, ramènent l’atterrisseur à la surface où les scientifiques et l’équipage du navire peuvent le repérer. Le déploiement de la palangre suit le même principe avec l’utilisation de poids, de largueurs et de bouées. Une ligne avec des hameçons munis d’appâts est toutefois déployée à la place des paniers. Dans la pratique, cela signifie qu’il faut appâter 350 hameçons par déploiement de palangre avec des calamars à moitié pourris. Nos vêtements sont ensuite enduits d’un parfum pas des plus raffinés. 

Récupérer les engins de pêche déployés est facile – du moins en théorie. Mais pas en Antarctique et si tard dans la saison, alors que la glace se forme autour de notre zone de recherche. Nous sommes retournés sur le site de déploiement de la palangre et avons déclenché le largueur. Comme prévu, une extrémité de la ligne a commencé à remonter vers la surface, mais les bouées orange n’ont jamais été repérées. Après quelques heures passées dans la zone et des dizaines d’yeux scrutant la glace et l’épaisse brume, nous avons abandonné nos recherches. Nous ne savons pas si les bouées ont été piégées sous la glace ou si les courants étaient si forts qu’ils n’ont pas permis à la ligne de remonter à la surface.

Deux jours plus tard, avec une couverture de glace réduite et une meilleure visibilité, nous sommes retournés pour une nouvelle tentative de récupération – cette fois avec un hameçon qui pouvait être traîné sur le fond là où la ligne avait été déployée – et ça a marché! Tout excités, nous avons commencé à récupérer la ligne. Alors que les premiers hameçons étaient retirés de l’eau, une grande légine, mesurant au moins 1,5 mètre, a émergé. Mais juste avant de le soulever sur le pont, le poisson s’est échappé.

Grenadier cod
Grenadier de roche

Cependant, nous avons pu attraper plusieurs poissons, principalement des espèces de fond, comme les anguilles, les morues de grenadier et des Notothenioidei, communément appelés poissons antarctiques. Ces derniers produisent des protéines antigel leur permettant de mieux braver les eaux froides. Les poissons-crocodiles des glaces ou poissons à sang blanc constituent une famille d’espèces particulièrement prisées par la recherche car leur sang est dépourvu d’hémoglobine, une protéine habituellement responsable du transport de l’oxygène.

Striped rockcod
Bocasse rayée
Eelpout
Zoarcidé

En attendant notre prochain article, nous vous recommandons de consulter le blog de PolarsternLien externe où vous pourrez y découvrir une autre menace pour notre matériel: les icebergs. Un iceberg en particulier a failli emporter un équipement coûteux attaché à une autre palangre. Bonne lecture!

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photo des scientifiques

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Notes de terrain de l’Antarctique

Ce contenu a été publié sur Comment la pollution plastique affecte-t-elle l’océan Austral? Suivez nos blogueurs à bord du brise-glace allemand «Polarstern».

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