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Et si la Suisse s’offrait son amnistie fiscale

Le débat sur l'amnistie fiscale est relancé en Suisse. Keystone Archive

Son secret bancaire provisoirement sauvé, la place financière suisse respire. Reste la menace de l'amnistie fiscale des pays voisins.

Et si la Suisse faisait pareil? Lancée à droite, l’idée ne séduit pas la gauche. Qui parle de ‘prime à la triche’.

L’accord sur la fiscalité de l’épargne conclu mardi soir par l’Union européenne préserve le secret bancaire. Provisoirement, du moins. Mais une autre menace plane toujours sur la place financière suisse: l’amnistie fiscale des pays européens.

L’Italie l’a lancée récemment dans le cadre de son programme de lutte contre la fuite des capitaux. Des dizaines de milliards d’euros ont ainsi été rapatriés – une grande partie se trouvait d’ailleurs en Suisse.

L’Allemagne menace d’introduire à son tour une telle mesure. La Grande-Bretagne y songe. L’Espagne, la Belgique, également.

Bref. Autant de menaces pour la place financière helvétique qui pourrait voir repartir son précieux magot vers les pays d’origine.

Réputation de paradis fiscal

Alors pourquoi la Suisse ne s’offrirait-elle pas à son tour une amnistie fiscale? C’est vrai, elle est plutôt connue comme paradis fiscal. Et pas l’inverse. Mais cela n’exclut pas qu’il y ait aussi une fuite des capitaux de Suisse vers l’étranger.

Depuis quelques mois, l’idée d’amnistier les fraudeurs pour rapatrier quelques milliards au pays fait donc son chemin dans les milieux de droite. Parmi ceux qui défendent cette solution: le conseiller national Fulvio Pelli (PRD/TI).

«Dès l’instant où les pays voisins le font, il me semble normal que la Suisse se pose au moins la question», lance le radical tessinois.

«Une prime à la triche»

«L’amnistie fiscale encourage la fraude, c’est une prime à la triche», rétorque le porte-parole du Parti socialiste, Jean-Philippe Jeannerat. Le PS, par principe, est donc opposé à une telle mesure.

Cela dit, il accepterait d’entrer en matière, mais dans des cas «très rares». Et le contexte actuel européen n’en est pas un.

«Surtout pas, ajoute Jean-Philippe Jeannerat. La Suisse facilite déjà l’évasion fiscale et lorsque ces pays – des amis – tentent de se défendre comme ils le peuvent, voilà qu’on veut soutenir les tricheurs!»

Le prix du pardon

«Bien sûr, je me rends compte qu’il y a un problème éthique», avouait Fulvio Pelli, jeudi matin, sur les ondes de la Radio Suisse Romande.

Selon le radical tessinois, il s’agit de trouver le taux idéal. Un taux suffisamment attractif pour que les fraudeurs soient tentés de rapatrier leur argent. Et suffisamment élevé pour mériter une amnistie. Oui, mais… combien ça coûte le pardon?

«Toute la question est là… L’Italie applique un taux de 2,5%. En Allemagne, on parle de 25%. La marge est grande, constate le conseiller national. En Suisse, il faut déjà lancer le débat sur le principe.»

Et Fulvio Pelli estime qu’il n’est jamais trop tôt pour ouvrir la discussion. Surtout sur un sujet aussi controversé. Cela peut prendre du temps.

swissinfo, Alexandra Richard

En Suisse, la dernière amnistie fiscale – au niveau fédéral -remonte à 1969
L’Italie a introduit la mesure avec un taux de 2,5%
L’Allemagne y songe et parle d’un taux de 25%

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