Festival Médias Nord-Sud: une radio du Burkina Faso primée
C'est «La Voix du Paysan», une radio rurale du Burkina Faso, qui remporte cette année le «Prix Suisse Radios du Sud» créé par Radio Suisse Internationale. Le jury a porté son choix sur une émission consacrée à la vie dans la prison de Ouahigouya.
Ce Prix – coparrainé cette année par Radio Suisse Internationale et par la Commission nationale suisse pour l’Unesco – récompense des émissions consacrées à des problèmes de développement et produites par des radios francophones du Sud.
Son jury, cette fois-ci, s’est interrogé sur son propre choix: fallait-il, dans le cadre du Festival Médias Nord-Sud de Genève, primer une émission qui a priori s’attache à montrer les déficiences d’une situation carcérale plutôt que d’en retenir une autre témoignant d’une réussite dans des domaines comme l’éducation, l’action sociale ou la protection de l’environnement?
La réponse, affirmative, part d’un autre point de vue: le jury a en effet estimé que l’émission présentée par «La Voix du Paysan» illustre de façon positive le progrès des médias africains. D’où cet hommage rendu à une radio «qui fait preuve à la fois d’un grand esprit de liberté, d’une démarche journalistique courageuse et surtout d’une approche professionnelle de l’événement».
L’événement qui sert de toile de fond à l’émission, c’est une journée portes ouvertes à la maison d’arrêt de Ouahigouya, la troisième ville du pays. A la faveur d’une visite des avocats du barreau burkinabé, les journalistes de «La Voix du Paysan» vont eux aussi à la rencontre des prisonniers, dont plusieurs hommes en détention préventive depuis des années.
La radio leur donne la parole ainsi qu’au régisseur de la prison, au bâtonnier des avocats et au procureur de la République dont le constat est finalement «que la situation est certes déplorable mais qu’on est obligé de faire ainsi pour défendre l’ordre public».
«La Voix du Paysan» est une mini-radio associative, forte d’une douzaine de collaborateurs, lesquels ont en quelque sorte pris le relais des animateurs ruraux qui sillonnaient la brousse à vélo, porte-voix en bandoulière. Elle devient un peu l’âme de sa région, le Yatenga.
Comme la plupart des nouvelles radios d’Afrique, elle joue son rôle de service public immédiat, faisant part matin et soir des décès et des baptêmes, transmettant les communiqués officiels des autorités politiques et traditionnelles ou faisant office de bureaux des objets (et du bétail) trouvés. Mais on y chante aussi, on y palabre en direct dans les différents parlers de la région et en français.
Bref, le Jury s’est dit très sensible à cette image d’une Afrique qui progresse malgré les difficultés de toutes sortes. «Notre décision, explique-t-il, doit être comprise comme un appel à faire davantage confiance aux médias africains: donner du courage à des journalistes est aussi une forme de coopération au développement».
Bernard Weissbrodt
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