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Alcool au volant: la Suisse s’aligne sur l’Europe

Un automobiliste soumis à un alcootest. Keystone Archive

Après le Sénat, la Chambre du peuple a accepté jeudi d'abaisser le taux d'alcool à 0,5‰, comme le demandait le gouvernement.

La Suisse ne sera pas l’un des derniers pays d’Europe à autoriser la conduite avec 0,8 gramme pour mille d’alcool dans le sang.

Contre toute attente, la chambre basse a accepté de diminuer le taux d’alcool par 101 voix contre 74. Désormais approuvée par les deux chambres du Parlement, la mesure entrera en vigueur le 1er janvier prochain.

Dès cette date, les automobilistes pris avec un taux d’alcool situé entre 0,5 et 0,79‰ recevront un avertissement. En cas de récidive, le permis leur sera retiré durant un mois.

Quant à ceux qui rouleront avec plus de 0,8‰, ils perdront leur permis pendant trois mois, et cela sans avertissement.

Un front du refus opposé au politiquement correct

Jeudi, le débat sur la baisse du taux d’alcoolémie n’a pas été sans peine. Les députés ont discuté durant près de deux heures et demi, avant d’en arriver au vote final.

Le front du refus regroupait, entre autres, les partisans de la responsabilité individuelle, les défenseurs de secteurs économiques touchés par cette mesure (restauration, tourisme, viticulture) ou encore les représentants de cantons où les transports publics ne sont pas très développés.

«La mesure d’abaissement du taux d’alcoolémie à 0,5‰ fait partie du triomphe du politiquement correct, de l’hystérie, des angoisses d’une société qui est toujours plus urbaine, aseptisée, qui ne supporte plus le risque, qui ne supporte plus l’accident, qui ne supporte plus la mort», a notamment déclaré le libéral vaudois Serge Beck.

«La liberté ne commence pas à 0,8‰, elle ne se termine pas à 0,5‰, lui a rétorqué sa collègue de parti, la Genevoise Barbara Polla. Même si je suis convaincue que la liberté est mère de toutes les vertus, la question ne se pose pas en termes de taux d’alcoolémie. Nous prenons ici une décision technique.»

Ne pas faire cavalier seul

Les deux camps se sont livrés à de longues joutes oratoires portant notamment sur l’efficacité réelle de l’abaissement du taux d’alcoolémie. La fixation de ce taux a par ailleurs fait l’objet d’un intense marchandage.
«Je me suis même posé la question de savoir si quelqu’un allait proposer l’immunité pour les parlementaires fédéraux», a conclu, ironique, le radical vaudois René Vaudroz, au nom de la majorité de la commission.

Moritz Leuenberger a de son côté rappelé que des études montrent très clairement qu’une diminution du taux d’alcoolémie entraîne une baisse du nombre des accidents de la route.

Le ministre des Transports a par ailleurs déclaré que la Suisse ne pouvait pas faire cavalier seul, alors que la plupart des pays européens ont déjà abaissé la limite du taux d’alcoolémie à 0,5‰.

Finalement, une majorité de députés se sont ralliés à l’avis du gouvernement. Ils ont considéré que l’intérêt général, c’est-à-dire l’objectif «zéro mort sur la route», l’emportait sur toute autre considération.

Des réactions généralement positives

Les organisations actives dans la prévention se félicitent de la décision du Parlement. Pour l’Institut suisse de prévention de l’alcoolisme et autres toxicomanies (ISPA), «c’est une mesure de bon sens et de sécurité qu’on attendait depuis longtemps».

Même son de cloche pour le Bureau suisse de prévention des accidents (BPA) pour qui cette mesure «permettra de diminuer de 5% le nombre de morts sur les routes, ce qui représente environ 20 tués par année.»

L’Association transports et environnement fait également part de sa satisfaction. «C’est une mesure très raisonnable en matière de sécurité routière et nous la soutenons totalement», déclare son responsable de la communication Felix Adank.

Du côté du Touring Club Suisse (TCS), on perçoit aussi l’abaissement du taux d’alcoolémie d’une manière «très positive». Pour Joël Grandjean, son porte-parole romand, cette décision va dans la «toute bonne direction».

Le TCS est surtout satisfait parce que la mesure reste raisonnable. «Nous saluons le fait qu’entre 0,5 et 0,79‰, l’automobiliste fautif sera d’abord avertit avant de se voir retirer son permis, explique Joël Grandjean. Quoi qu’il en soit, au TCS, notre message est clair: celui qui boit ne conduit pas.»

Cafetiers et restaurateurs devront s’adapter

Pour la Fédération de l’hôtellerie-restauration (GastroSuisse), la réduction du taux limite d’alcoolémie est en revanche une décision «très discutable». «Il n’a jamais pu être prouvé que cette mesure contribuerait durablement à l’amélioration de la sécurité routière», indique-t-elle dans un communiqué.

La fédération va maintenant développer des propositions pour aider les professionnels de la branche et leurs clients à adapter leur comportement en fonction des nouvelles circonstances.

swissinfo, Olivier Pauchard

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