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Jean-Luc Godard a 70 ans!

Le toujours mystérieux Jean-Luc Godard. Keystone

Le cinéaste franco-suisse Jean-Luc Godard fête dimanche ses 70 ans avec, semble-t-il, un désir de tourner resté intact. Son prochain film sortira au printemps.

Ne dites jamais que vous ne comprenez rien à Godard, vous auriez l’air d’un plouc. Dites plutôt «Godard, j’adore»! Ou alors: «Godard, c’est totalement surfait. Une véritable imposture». Et là, dans un cas comme dans l’autre, vous serez parfaitement crédible dans le plus intello-branché des cafés, qu’il soit parisien ou lausanno-genevois.

A propos, JLG est-il suisse ou français? Godard est né à Paris de parents d’origine suisse, il a poussé à Nyon, explosé à Paris, puis s’est replié sur la bourgade vaudoise de Rolle. Ce qui explique assez aisément le fait que les Français comme les Suisses le revendiquent simultanément.

Au fait, pourquoi un tel acharnement dans l’appropriation? C’est certain, avec «A bout de souffle», en 1960, Godard invente un style nouveau, nerveux, à la limite de l’improvisation, à mille lieues des standards français de l’époque. «Pierrot le Fou» (1965), «La Chinoise» (1967) étayeront ce constat, et imposeront l’homme qui parle plus lentement que son ombre comme chef de file de la «Nouvelle Vague», avec à ses côté Rohmer, Rivette ou Truffaut.

Mais c’était il y a longtemps, ça. Car si JLG, depuis, a tout de même tourné quelques films qui ont eu un certain retentissement, «Sauve qui peut (la vie)» en 1980, «Prénom Carmen» en 1983, il est indéniable qu’aujourd’hui, le public le boude avec une belle constance. Ainsi en Suisse, son dernier film exploité en salles, «For Ever Mozart» (1996), a totalisé 2248 entrées. Ce qui n’est pas beaucoup.

Il est aisé pour les aficionados de Godard de rétorquer que le succès public d’une oeuvre n’a rien à voir avec ses qualités intrinsèques. Mais peu d’artistes de cette envergure connaissent toutefois un décalage aussi énorme entre la taille de leur réputation et l’indifférence de la foule.

Certains propos du cinéaste peuvent peut-être tenir lieu d’explication: pour lui, le cinéma actuel n’offre que du spectacle ou du romanesque sans effort. Or à ses yeux, «le cinéma est fait pour penser, pour montrer des idées». Oui, mais lesquelles? Encore faudrait-il que le public, effectivement biberonné quotidiennement à une forme narrative traditionnelle, ait une piste.

Prochaine oeuvre estampillée JLG: «Eloge de l’Amour», à paraître au printemps 2001, peut-être à Cannes. Avec, à l’affiche, la voix de Juliette Binoche, l’acteur Bruno Putzulu, César 99 du meilleur espoir, et… Jean d’Ormesson.

Ou quand l’ancien gauchiste fait tourner un écrivain monarchiste convaincu. Evidemment, après avoir dirigé Hallyday ou Delon, filmé les Stones et France Gall, les barrières, comme les catégories, n’existent plus pour le cinéaste. Avec la provocation et l’humour, ce n’est peut-être pas la moindre de ses qualités.

Comment dit-on «joyeux anniversaire» en Godardien?

Bernard Léchot

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