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La Suisse dévoile les dessous du trafic d’organes

Le crime organisé s'enrichit grâce au commerce d'organes humains. Keystone

La députée Ruth-Gaby Vermot apporte sa contribution à la lutte contre le trafic d'organes. Elle livre au Conseil de l'Europe un rapport percutant sur un marché juteux.

En Suisse, une nouvelle loi est en discussion pour empêcher ce commerce illégal.

«Il est dramatique que des gens vivent dans des conditions si épouvantables qu’ils doivent se vendre eux-même en entier ou en parties». De retour de Moldavie, Ruth-Gaby Vermot ne cache pas son émotion.

D’énormes profits

Membre du Conseil de l’Europe, la députée suisse a présenté mercredi un rapport circonstancié.

Au cours de son voyage en Moldavie où elle a passé 3 jours au mois d’octobre dernier, elle a en effet rencontré plusieurs jeunes gens ayant vendu un rein en Turquie.

Du travail a été promis à ces jeunes gens en Turquie. Arrivés sur place, ils n’ont pas trouvé le travail espéré.

En revanche, on leur a donné la possibilité de vendre un rein pour 3000 dollars. Désargentés, ils ont fini par accepter.

Le prélèvement d’organe a eu lieu dans une clinique high-tech. Mais sans suivi médical. Ces jeunes gens ont, en effet, dû retourner en Moldavie quelques jours plus tard.

Selon Ruth-Gaby Vermot, le prix d’un rein varie entre 150 000 et 200 000 dollars sur le marché.

«C’est une énorme quantité d’argent qui profite surtout au crime organisé», déclare la députée.

Les acheteurs proviennent d’Israël, mais aussi de pays arabes et d’Europe occidentale.

«Nous savons que des Européens disparaissent des listes d’attente pour les transplantations sans pour autant être morts, explique Ruth-Gaby Vermot. Nous en déduisons qu’ils ont acheté un rein sur le marché illégal.»

Une pénurie d’organes

En Suisse, l’an dernier, 1178 personnes figuraient sur la liste d’attente de Swiss Transplant, l’organisation qui organise et coordonne les transplantations. Mais 54 des patients sont décédés, parce qu’ils n’ont pas obtenu un organe à temps.

«Plus les soins sont efficaces, plus on sauve de vies, explique Theodor Weber, de l’Office fédéral de la santé publique. Et parmi ces vies sauvées, il y a aussi celles de potentiels donneurs d’organes.»

C’est la raison pour laquelle il y a un manque d’organes dans les pays riches.

Il y a bien longtemps déjà que les organisations criminelles ont découvert ce «créneau». Elles misent donc sur la détresse des personnes en attente d’un organe et poussent des gens extrêmement pauvres à vendre une partie de leur corps.

Le vendeur risque sa vie et le malade peut éventuellement espérer retrouver la santé. En tout cas, une seule chose est sûre: le trafiquant s’enrichit.

Traiter le problème à la racine

Pour mettre fin à ce trafic illégal, le Conseil de l’Europe entend en premier lieu lutter contre la pauvreté dans des pays comme la Moldavie, la Bulgarie, l’Ukraine ou la Russie, explique Ruth-Gaby Vermot.

Mais il s’agit aussi de lutter contre le crime organisé ainsi que contre les vendeurs et les acheteurs. C’est pour cela que le Conseil de l’Europe demande aux différents états de réviser leur loi sur la transplantation.

Pour sa part, le gouvernement suisse satisfait à cette demande. Avec sa nouvelle loi sur les transplantations, il veut en effet interdire l’utilisation abusive d’organes, de tissus et de cellules. Il s’agit aussi de protéger la dignité humaine, la personnalité et la santé.

Concernant le trafic, la nouvelle loi est tout à fait claire. Elle stipule qu’il est interdit de fournir ou de recevoir de l’argent pour un don d’organe, de tissu ou de cellule.

swissinfo, Gaby Ochsenbein
(traduction: Olivier Pauchard)

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