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Rolf Kesselring: Les derniers rebelles

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«Cartes postales» de créateurs suisses expatriés... Rolf Kesselring, écrivain, ancien éditeur, nous adresse son courrier de la région de Nîmes.

Dans une bande dessinée plus que célèbre, les auteurs situaient le village des derniers Gaulois qui résistaient aux Romains quelque part du côté de la pointe du Finistère. Et bien c’est faux! Je crois pouvoir dire, aujourd’hui qu’il s’agit d’intox et de contre-information.

C’est beaucoup plus à l’est que se trouve ce nid de rebelles invétérés. J’en ai la certitude! Moi qui vit dans cette dans cette Gaule romaine depuis pas mal d’années, je peux vous assurer que, vu d’ici, c’est flagrant. Le dernier bastion qui tient encore face au continent qui l’encercle est ce minuscule pays enfermé entre ses lacs et ses chaînes de montagnes pointues. Ceci expliquant peut-être cela…

Une folie populaire

Il y a peu, tout le continent décidait de créer une monnaie nouvelle. Les citoyens des différentes nations firent d’abord un peu la gueule, se sentant dérangé dans leurs habitudes. Cependant, au jour dit, ils devinrent fous et se ruèrent sur cette nouvelle monnaie au point que les changeurs finirent par en manquer.

Tout le monde en voulait, chacun désirait la découvrir, la faire sonner dans le creux de la main, la palper enfin. Je ne vous dis pas les bousculades, les quiproquos, les engueulades. Durant les premiers jours, on se serait cru en pleine kermesse.

Une conscience toute neuve

Avec l’arrivée de cette nouvelle monnaie, les titres des journaux furent un régal: «Les Euros sont lâchés», «Euro qui comme Ulysse», «l’Euro fait le bonheur», «Euro soit qui mal y pense», les amateurs de bons mots firent, eux aussi, la fête. Des sceptiques tentèrent bien quelque: «Les Euros sont fatigués» qui firent long feu face à l’engouement.

Ce qui apparut, en filigrane, c’était une sorte de conscience nouvelle d’appartenir à un espace qui allait du nord au sud du continent et d’avoir, enfin, quelque chose de tangible à partager. Le geste politique avait pris de l’importance. On se sentait, soudain tous sur le même bateau, presque de la même famille.

Les irréductibles

Comme je le disais plus haut, les derniers à résister, cramponnés au franc comme à une bouée de sauvetage, étaient ces étranges Helvètes – mes frères, ces rebelles au regard si doux, ces irréductibles buveurs de vin blanc. Pour tous les citoyens de l’espace européen,, ils apparaissaient, désormais, comme une réserve d’autochtones qu’on regarderait vivre avec curiosité et un peu de compassion.

Je me suis laissé dire que, pourtant, que quelques inconscients voulaient, encore une fois, tenter de relier le pays à l’ONU… Peut-être que tout espoir n’est pas perdu, peut-être que cette fois ce sera un «oui» massif … et franc!

Rolf Kesselring

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