Des perspectives suisses en 10 langues

Aux Bugnenets, patrie de Didier Cuche

swissinfo.ch

Champion du monde de super-G et vainqueur de la Coupe du monde de géant, Didier Cuche a été accueilli avec les honneurs ce week-end dans sa vallée natale. Reportage aux Bugnenets, une petite station de l'Arc jurassien sortie de l'anonymat grâce à son enfant prodige.

En ce samedi 28 mars, c’est jour de fête dans le Val-de-Ruz. Les banderoles en l’honneur de Didier Cuche fleurissent sur les façades des maisons. «Didier, champion de nos coeurs», «Super Didier» ou encore «Pas de doute, Didier notre champion», peut-on lire tout au long de la route qui mène aux Bugnenets.

A 20 minutes en voiture de Neuchâtel, au bout de la vallée, la petite station des Bugnenets-Savagnières, avec ses 7 téléskis et ses 30 kilomètres de piste, ne possède certes pas les atouts pour rivaliser avec les plus grandes stations alpines. Mais ici, au cœur du Jura neuchâtelois, on peut se targuer d’avoir enfanté l’un des plus grands skieurs du 21e siècle.

Didier Cuche, 34 ans, terreur du Cirque Blanc, a fait ses premières gammes de skieur au pied du Chasseral, la montagne la plus haute du Jura, qui culmine… à 1607 mètres d’altitude. Alors quand l’enfant du pays revient sur ses terres, forcément, il est accueilli en véritable messie.

Un engouement très fort

«Je reçois énormément de témoignages de sympathie des gens de la région durant toute la saison. C’est vraiment quelque chose qui me touche et ça me tient à coeur de me mettre à leur disposition durant cette journée».

Mauvais temps oblige, c’est à Dombresson, un village situé à quelques kilomètres des Bugnenets, qu’a été déplacée en dernière minute la fête en l’honneur de Didier Cuche. Pas de quoi refroidir toutefois les ardeurs de la population locale, venue en nombre saluer son champion de skieur.

S’il y a un homme qui s’agite particulièrement en cette journée, c’est Alain Cuche, frère de Didier, membre du conseil d’administration des remontées mécaniques et organisateur de la journée. «Il y a un très fort engouement autour de Didier et on peut le mesurer avec l’affluence d’aujourd’hui.»

«Un bel exemple»

Ils sont en effet venus par centaines, petits et grands, pour saluer leur «Didier» à Dombresson. La séance de dédicaces tourne pratiquement à l’émeute. «Je ne signe que les posters officiels, sinon on n’aura pas encore fini à minuit», lance le héros du jour à la ribambelle de bambins venus espérer récolter une griffe «Didier Cuche» sur toutes sortes d’accessoires.

Mais malgré la file qui n’en finit pas de s’allonger, Didier Cuche ne perd pas le sourire. «T’as fais quoi comme chrono?», lance le champion à un jeune fan qui porte encore sur lui un dossard de compétition, preuve de sa participation à l’épreuve d’obstacles «Coupe du monde» organisée un peu plus tôt dans la halle de gymnastique du village.

Les témoignages de sympathie adressés au skieur sont authentiques. «Vous êtes un bel exemple», «Bravo pour tout ce que vous faites». Ici, pas de place pour les paillettes et les faux-semblants. A l’image de ce champion simple et entier, toujours prêt à échanger quelques mots avec d’anciennes connaissances et à poser pour les photographes en herbe.

Les «Bugnes», station surprenante

Le Val-de-Ruz, ce n’est ni Verbier ni Zermatt. Pourtant, les habitants sont fiers de leur station des «Bugnes». Dans la région, ils sont nombreux à avoir tracé leurs premières courbes dans ces paysages de sapins typiques de l’Arc jurassien.

Cette fierté, Didier Cuche l’éprouve également. «C’est une magnifique station pour la région, meme si ça serait absurde de comparer avec les stations des Alpes. Mais de nombreux visiteurs s’étonnent des infrastructures à disposition et du fort dénivelé offert par certaines pistes. Ca nous fait toujours plaisir de les surprendre…»

Grâce aux exploits de Didier Cuche, la station s’est fait connaître loin à la ronde ces dernières années. «On pense que ça a un impact sur l’affluence, même si c’est difficile à mesurer. On constate la venue de nombreux skieurs de cantons plus éloignés comme Vaud, Bâle, Soleure ou Fribourg. Beaucoup ont été séduits par les services que nous offrons à une distance raisonnable de chez eux», explique Alain Cuche.

Un hiver exceptionnel

L’hiver qui s’achève aura été l’un des meilleurs des dernières années. «On fonctionne depuis 4 mois sans interruption, et les jours de beaux temps ont été prisés», dixit le frère du champion.

Mais pas question pour autant de pavoiser et d’avoir les yeux plus gros que le ventre: «On fait avec les moyens à disposition et on tente de maintenir des réserves suffisantes pour pouvoir tenir deux saisons sans neige. Nous n’allons pas construire des télésièges ou des télécabines à plusieurs millions de francs».

Station de moyenne altitude, Les Bugnenets ne risque-t-elle pas à moyen terme d’être victime du réchauffement climatique? «Les experts affirment que les stations situées au-dessous de 1500 mètres sont condamnées. Mais nous avons pu remarquer ces dernières années qu’il y avait proportionnellement plus de neige à basse altitude dans le Jura que dans les Alpes. L’enneigement à 1100 mètres chez nous est identique à une station alpine située à 1500 mètres», répond Alain Cuche.

La confiance en l’avenir est donc toujours de mise aux «Bugnes». Il y a de quoi dans un coin de pays qui a vu le fils des restaurateurs de l’auberge familiale de la station devenir un ambassadeur de la Suisse dans le monde. A l’ombre du Chasseral, la légende est plus vivante que jamais.

swissinfo, Samuel Jaberg au Val-de-Ruz

Situation. Le petit hameau des Bugnenets, qui fait partie de la commune du Pâquier, est situé dans une vaste clairière au fond du Val-de-Ruz. Les pistes de ski sont accrochées à l’arète nord-ouest de Chasseral, entre 1090 et 1450 mètres d’altitude.

Création. C’est en 1953 qu’est créée la société de remontées mécaniques Chasseral – Les Bugnenets SA. René Cuche, le grand-père de Didier, fait partie des membres fondateurs. En 1985 et après plus de 20 ans de rivalité, les domaines skiables des Bugnenets et des Savagnières, situé sur territoire bernois, fusionnent, pour devenir le plus grand domaine skiable de l’Arc jurassien avec 7 téléskis et 30 kilomètres de piste.

Record. Le 2 janvier de cette année, un record de fréquentation a été établi. Plus de 4800 abonnements de ski ont été vendus en une seule journée.

Coupe du monde. L’hiver 2008/2009 a été prolifique pour le ski suisse. En Coupe du monde, l’équipe masculine a décroché 12 victoires. Il faut remonter à la saison 1991/92 pour trouver résultat identique. Deux globes de cristal sont venus couronner Didier Cuche (géant) et Carlo Janka (super-combiné). L’équipe féminine a obtenu 12 podiums, dont 4 victoires, un bilan qualifié d’exceptionnel par la Fédération suisse de ski.

Mondiaux. Aux championnats du monde de Val d’Isère, la Suisse a décroché 6 médailles et a terminé en tête du classement des nations. Didier Cuche a été sacré champion du monde de super-G, Carlo Janka de géant. Chez les filles, Lara Gut a obtenu deux médailles d’argent, en super-combiné et en descente.

Daniel Albrecht. Sans la chute de Daniel Albrecht à Kitzbuhel, la Suisse aurait sans doute décroché encore d’autres succès. Le skieur valaisan, victime d’un traumatisme crânien, suit actuellement un programme intensif de rééducation. Il est toutefois encore trop tôt pour dire s’il pourra reprendre sa carrière de sportif d’élite.

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision