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Des jeux de rôle pour comprendre les réfugiés

Depuis le début du programme, environ 30 000 personnes ont suivi cette sensibilisation. OSAR/SFH

Alors que l'UDC (droite dure) de Zurich veut une nouvelle initiative sur l'asile, la Suisse célèbre samedi la journée des réfugiés.

Les écoles suisses alémaniques s’adressent de plus en plus à l’Organisation d’aide aux réfugiés pour comprendre ce phénomène.

«Cela ne fait l’affaire de personne, ni des Suisses, ni des réfugiés, de laisser de côté une partie de la population», note Kais Fguiri, coordinateur du projet Ecole et membre de la Commission fédérale des Etrangers (CFE).

Mais dans un contexte où la Suisse, comme le reste de l’Europe, subit une pression migratoire forte, la tendance est à la fermeture des frontières.

Or, le problème de l’asile s’est polarisé au niveau politique. La migration forcée est de plus en plus assimilée à une migration économique.

Des journées clé en main

Alors comment comprendre, le parcours, ce par quoi est réellement passé un réfugié qui arrive en Suisse, ce qu’être une marchandise chassée de partout, ce que signifie la peur, la fuite, la perte de repères, l’humiliation? Et par là-même comment apprendre la tolérance et la valeur de l’accueil?

Autant de questions auxquelles l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) tente de répondre grâce à des journées clé en main. Par le biais d’un jeu de rôle, suivi d’une partie didactique,

C’est l’occasion pour des adultes en formation et des écoliers de «vivre» la guerre, l’oppression et l’exil forcé.

En Romandie d’abord

Ce programme a débuté en Romandie en mars 1998, après quelques années de réflexion menées par le Secrétariat romand de l’OSAR. Une année plus tard, il commençait en Suisse alémanique.

«Mais depuis l’échec de justesse de l’initiative sur l’asile de l’UDC en novembre 2002, – qui a été acceptée partout en Suisse alémanique, même à Zurich qui habituellement repousse les initiatives xénophobes -, la demande des écoles et des milieux paroissiaux s’est accrue», note Jean-Daniel Fivaz.

«Les quatre premières années, nous avons effectué 150 interventions. Et déjà quarante rien que cette année, poursuit le responsable du projet pour la Suisse alémanique. Il y a donc eu une prise de conscience: il est temps d’en parler».

Un public cible qui s’élargit

En tout, depuis le début du programme, environ 30 000 personnes ont suivi cette sensibilisation.

En Romandie, le programme a d’ailleurs élargi son public cible. Il s’adressait d’abord aux élèves du niveau secondaire. Il s’est étendu aux jeunes adultes en formation.

Ses bénéficiaires regroupent notamment les aspirants policiers des cantons de Vaud et de Neuchâtel, des étudiants de Hautes écoles spécialisées dans les domaines médical et social, ainsi que des Hautes écoles pédagogiques, et les cadres de la Protection civile fédérale.

«C’est essentiel que ces futurs professionnels se donnent les outils de comprendre le pluralisme culturel auquel ils auront affaire», atteste Jean-Daniel Müller, responsable du projet pour la Romandie.

La pointe de l’iceberg dans les médias

«C’est un sujet qu’on ne peut politiser, déplore encore Kais Fguiri. Et pourtant tous les partis s’en emparent. Et la presse s’en fait le relais. Ce fut d’ailleurs le sujet numéro un dans les médias l’an dernier».

Et de remarquer que seule la pointe de l’iceberg apparaît dans les médias, focalisés qu’ils sont sur la délinquance des requérants d’asile. Ou sur les menaces pour l’emploi qu’ils pourraient représenter.

Justement, si le jeu de rôle permet dans un premier temps d’avoir un aperçu émotionnel du parcours d’un demandeur d’asile, la deuxième partie de la journée, didactique et étayée de témoignages de réfugiés statutaires, permet une réflexion objective sur la politique d’asile en Suisse.

On y examine notamment les critères d’admission pour l’obtention du statut de réfugié. Et on se rend compte à quel point, ils sont restrictifs et stricts au niveau des preuves à fournir.

La réalité des chiffres

Les participants vont aussi être confrontés aux chiffres. Notamment au fait qu’il n’y a que 26 000 réfugiés en Suisse. Et que selon les années, entre 2 et 10% seulement des demandes sont acceptées.

On se rend alors aussi compte que le requérant ne reçoit que 15 francs par jour pour se nourrir et s’habiller. Et qu’il coûte moins qu’un Suisse aux crochets de l’assistance sociale. Un autre mythe savamment entretenu par les partisans d’une fermeture totale de la Suisse.

Il est aussi rappelé qu’un requérant ne peut pas travailler pendant les trois premiers mois. Et qu’ensuite, seuls les travaux que les détenteurs d’un permis de travail ne veulent exécuter leur sont accessibles.

Autant d’éléments qui permettent de replacer le problème de l’asile dans un contexte objectif et humain, loin du populisme véhiculé par certains partis politiques.

Nouvelle initiative de l’UDC zurichoise

Cette démarche a d’autant plus d’importance que la loi sur l’asile est actuellement en révision. Et qu’à peine sept mois après le court rejet de l’initiative sur l’asile en votation populaire, l’UDC du canton de Zurich veut remettre la question sur le tapis.

Elle demande au parti national de lancer une nouvelle initiative visant à réduire l’attrait de la Suisse et à limiter les abus.

La question du refoulement devrait être l’un des points sensibles de la nouvelle initiative sur l’asile réclamée, a expliqué mardi dernier le député Hans Fehr.

Il est nécessaire à ses yeux d’instaurer une réglementation cohérente dans le domaine des Etats tiers. Il convient selon lui de ne plus entrer en matière dans le cas d’un requérant d’asile provenant d’un pays sûr ou ayant transité par cet Etat.

swissinfo, Anne Rubin

On estime à 50 millions le nombre de déracinés dans le monde.
Ce qui fait une personne en fuite sur 140 environ.
La Suisse est signataire de la Convention de Genève sur les réfugiés.
Le statut de réfugié est défini par l’article 3 de la Loi sur l’asile.
En Suisse, entre 4 et 10% seulement des demandes d’asile sont acceptées.
La population dépendant de l’asile, dont 90% vont repartir, représente 2%.

– L’OSAR est l’organisation faîtière d’œuvres d’entraide actives dans le domaine de l’asile.

– Elle a été créée en 1936 pour venir en aide aux victimes du nazisme.

– Elle représente les intérêts des requérants d’asile et des réfugiés auprès des autorités et des milieux politiques.

– Et elle accompagne les requérants à toutes les étapes de leur demande d’asile, de la première audition au retour en cas de refus.

– Elle est politiquement indépendante et confessionnellement neutre.

– Elle accomplit des mandats pour la Confédération et le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés.

– Sinon, son financement est assuré par des dons privés.

– Le projet «Ecoles» coûte environ un demi-million de francs par an. Les écoles en assument 20% des frais.

– Il touche en moyenne 110 écoles ou instituts par an. En Romandie, 40% sont des adultes.

– Jusqu’à présent 30 000 personnes ont été sensibilisées.

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