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La corruption, un fléau à éradiquer

Remo Gautschi (à gauche), vice-directeur et René Hollenstein, responsable de la gouvernance de la DDC. swissinfo.ch

La Direction du développement et le la coopération (DDC) veut lutter contre la corruption, un fléau qui menace le développement. Mardi, elle a présenté sa stratégie.

L’idée est d’aider les pays en développement à réformer leur gouvernance. Mais la DDC veut aussi se prémunir à l’interne. Interview avec René Hollenstein, responsable de sa section Gouvernance.

Qu’elle se pratique à grande ou à petite échelle, la corruption peut prendre des formes bien différentes. Les orateurs présents à la présentation de la DDC, mardi à Berne, l’ont illustré avec les cas de l’Afghanistan, de la Colombie et de l’Afrique de l’Ouest.

Le phénomène touche tout particulièrement les pays en voie de développement. La coopération suisse veut donc agir concrètement en aidant les Etats à améliorer leur gouvernance pour limiter le taux de corruption.

swissinfo: Pourquoi la DDC s’intéresse-t-elle de si près à la corruption?

René Hollenstein: La corruption constitue clairement un frein au développement et un frein très important à la lutte contre la pauvreté, qui est quand même notre priorité en terme de coopération.

Il est difficile de calculer l’étendue de la corruption; cela varie selon les pays. On peut toutefois dire que la DDC est confrontée à la corruption au même titre que les entreprises et les organisations internationales.

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Direction du développement et de la coopération

Ce contenu a été publié sur La Direction du développement et de la coopération (DDC) est l’agence du ministère des Affaires étrangères chargée de la coopération internationale. Cet organisme effectue des actions directes et finance les programmes d’organisations humanitaires suisses et internationales, en particulier dans les domaines du développement, de l’aide humanitaire et de la coopération avec l’Europe de l’Est.

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swissinfo: Vous avez donc développé une stratégie pour lutter contre ce phénomène. Quelles en sont les grandes lignes?

R.H.: On veut d’abord sensibiliser notre personnel. Sensibiliser, cela veut dire rendre les gens conscients de ce que peuvent être les effets de la corruption.

Il s’agit ensuite d’identifier des actions concrètes qui peuvent être très spécifiques selon les contextes. J’ai moi-même travaillé en Bosnie. Un des problèmes de corruption auquel on était confronté était lié à la structure de l’Etat, avec un passé très lourd où des groupes importants de la société faisaient du trafic d’armes. C’est donc un problème complexe, dont il faut être conscient quand on travaille dans la coopération.

swissinfo: Peut-on dire que, sur le terrain, la DDC lutte par la force de l’exemple, notamment en refusant toute corruption?

R.H.: La DDC doit être un exemple. Dans nos accords de coopération bilatérale, nous avons une clause qui interdit formellement la corruption. Nous avons aussi pris des mesures au niveau de la gestion des projets qui empêchent – ou devraient empêcher – qu’il y ait des cas de corruption.

swissinfo: Dans le domaine humanitaire, il est parfois impossible d’accéder aux victimes sans «graisser la patte» des responsables. Devez-vous aussi faire face à ce problème?

R.H.: Notre souci est de travailler au plus près de la population civile. S’il n’est pas possible de travailler avec l’Etat, nous nous tournons vers la société civile. Il s’agit donc d’identifier les bons partenaires pour travailler dans des situations d’urgence. C’est également un frein contre la corruption.

Il y a eu des cas où la DDC s’est même retirée de certains pays pour différentes raisons, entre autres pour des raisons de corruption.

swissinfo: Dans certains pays, la corruption est endémique. N’est-ce pas décourageant?

R.H.: J’ai travaillé de longues années en Afrique de l’Ouest. Ce qui est étonnant, c’est que l’on peut très bien travailler, surtout avec la société civile et les municipalités qui sont proches de leurs sociétés et qui subissent un contrôle beaucoup plus important de la société civile que des gouvernements centraux. Il est donc important de situer sa propre action au niveau local.

swissinfo: D’une manière plus large, que peut faire la Suisse contre la corruption.

R.H.: Ce qui est urgent, c’est qu’elle s’implique encore plus pour la restitution de l’argent qui a été placé sur des comptes en Suisse. La Suisse a fait un excellent travail dans ce domaine, mais il faut qu’elle continue ses efforts.

Deuxième point important, la Suisse doit ratifier la Convention des Nations Unies pour la lutte contre la corruption.

Interview swissinfo, Olivier Pauchard

Selon la Banque mondiale, la corruption représente 1000 milliards de dollars au niveau de la planète.
Sur cette somme, 50 à 60 milliards concernent l’aide au développement.

La DDC a mis en place en 2006 un «compliance office» qui permet d’annoncer les cas de corruption interne en toute confidentialité.

Des cours de formations sur la prévention de la corruption ont été mis sur pied, avec un accent sur les mécanismes de contrôle interne et les conflits d’intérêt.

Une clause anti-corruption contraignante apparaît dans tous les contrats avec les partenaires de la DDC depuis 1998.

Les collaborateurs sont tenus de respecter un code de conduite.

L’organisation Transparency International établit un classement de la corruption dans le monde.

Dans son dernier classement (2006), la Suisse était classée au 7e rang, derrière les pays nordiques, la Nouvelle-Zélande et Singapour.

Toujours selon ce même classement, l’Etat le plus corrompu au monde est Haïti (163e rang).

La Suisse apparaît comme un pays très peu corrompu, mais elle pourrait encore mieux faire. Les critiques les plus fréquentes concernent le «copinage» régnant à différents niveaux.

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