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Le président afghan demande l’aide de la Suisse

Pascal Couchepin et Hamid Karsaï devant la haie d'honneur, à Berne. Keystone

Hamid Karsaï a rencontré vendredi à Berne Pascal Couchepin, le président de la Confédération, ainsi que Micheline Calmy-Rey, cheffe de la diplomatie.

Au centre des discussions: la reconstruction de l’Afghanistan.

Lors de la conférence de presse suivant la rencontre, le président Karsaï a déclaré que son pays était très reconnaissant pour l’aide que la Suisse a apporté à l’Afghanistan et à son peuple.

«La Suisse est l’un des pays qui n’a cessé d’aider l’Afghanistan au cours de ces trente dernières années», a souligné le président.

Une aide à plusieurs facettes

Les discussions de vendredi ont permis de faire le point sur la forme que l’aide suisse pourrait prendre à l’avenir.

«Il y a plusieurs domaines dans lesquels la Suisse peut continuer à être utile, a dit Hamid Karsaï. Spécialement pour la fourniture d’équipements scolaires, dans le secteur de l’énergie et dans la fabrication de médicaments.»

«M. Karsaï nous a demandé d’aider les étudiants afghans à venir étudier en Europe et en Suisse plus particulièrement», a de son côté expliqué le président de la Confédération.

Pascal Couchepin a dit que Berne étudierait la question, laissant entendre que des bourses pourraient être accordées.

Le président de la Confédération a par ailleurs indiqué que la Suisse n’avait fait aucune promesse concernant une augmentation de son aide financière. Il a par contre confirmé que cette aide se maintiendrait à son niveau actuel.

Surtout active dans l’humanitaire

L’an dernier, la Suisse a soutenu l’Afghanistan à hauteur de 21 millions de francs. La plus grande partie de cet argent (16 millions) a été consacré à l’aide humanitaire.

L’Irak a un peu occulté l’Afghanistan au cours des derniers mois. Mais ce n’est pas pour autant que la situation y est redevenue calme, loin s’en faut.

D’ailleurs, des organisations humanitaires et des experts en sécurité suisses se sont récemment inquiétés de l’augmentation de la violence dans certaines parties de l’Afghanistan.

La Suisse est engagée depuis plus de vingt ans dans ce pays détruit par la guerre. Elle y est surtout active dans les domaines des droits de l’homme et de la promotion de la paix.

Elle participe plus particulièrement à l’établissement d’une constitution et à l’émergence de la société civile.

Au niveau de la sécurité, deux officiers suisses sont engagés depuis mars dernier au sein de l’ISAF (force multinationale de maintien de la paix).

La guerre a tout détruit

L’Afghanistan se trouve actuellement dans une grande misère. Le système de sécurité social est complètement détruit, ainsi que les infrastructures de la santé et de l’éducation.

Les routes et les ponts ont été détruits ou sont minés, ce qui empêche le trafic. L’agriculture est également à la peine. De nombreux champs sont infestés de mines et la guerre a mis à mal le système d’irrigation.

Pour l’heure, la situation ne peut pas s’améliorer, avant tout à cause du manque de sécurité. En effet, deux ans après la chute du régime des Talibans, l’Afghanistan n’a toujours pas retrouvé la paix.

Chaque jour, des rapports font état d’attaques contre les forces de l’ISAF. L’accrochage le plus grave a eu lieu début juin. Quatre soldats allemands avaient alors perdu la vie dans un attentat-suicide.

La violence n’épargne pas les organisations non gouvernementales. En mars dernier, un collaborateur local du Comité international de la croix-rouge (CICR) a été abattu. Cette situation a poussé quelques organisations humanitaires a diminué leurs activités.

Les seigneurs de la guerre

Ces violences sont attribuées aux sympathisants des Talibans et d’Al-Quaïda, ainsi qu’aux seigneurs de guerre locaux qui tiennent une bonne partie du pays. C’est en tout cas la thèse défendue par le major Ralph Ganter, l’un des deux officiers suisses de l’ISAF.

«Le problème se situe surtout dans les provinces où il y a encore de nombreux seigneurs de guerre et de nombreux combattants qui détiennent le pouvoir et qui n’obéissent qu’à leurs propres intérêts», déclare l’officier suisse.

Un autre Suisse, Albert Stahel, ne partage pas ce point de vue. Pour cet expert dans les questions de sécurité, les seigneurs de guerre ne sont pas la première cause d’insécurité.

Pour lui, le problème vient surtout du fait que l’ISAF n’a toujours pas remis les Afghans aux commandes de leur propre pays.

Cela provoque un sentiment de colère parmi la population qui estime que les Etats-Unis continuent la guerre. «Si Washington ne change pas de politique, le pays va sombrer dans le chaos», avertit Albert Stahel.

Les femmes toujours prétéritées

La chute du régime des Talibans avait conduit à une immédiate amélioration de la condition des femmes afghanes. Celles-ci n’ont plus eu besoin de porter le voile traditionnel (la burka) et les petites filles ont pu retourner à l’école.

Mais l’amélioration n’a pas duré. Depuis la chute des Talibans, la population est confrontée à de nouveaux dangers dans la vie de tous les jours, explique Sima Samar, responsable de la première commission indépendante pour les droits de l’homme en Afghanistan.

«Les femmes ont davantage de problèmes, car le manque de sécurité limite plus leur liberté de mouvements que celle des hommes», déclare-t-elle. Du coup, les jeunes filles ne vont à nouveau plus à l’école.

Membre de Swisspeace, Susanne Schmeidl déplore également cette violence au quotidien. «La sécurité s’est clairement détériorée», déclare-t-elle. L’ISAF a réussi à rétablir la situation dans la capitale Kaboul, mais la situation est tout autre dans le reste du pays, surtout au Sud et au Nord.

swissinfo, Rita Emch et Joanne Shields
(traduction: Olivier Pauchard)

– Jeudi, Hamid Karzaï a parlé de son pays dans le cadre du Forum de Crans Montana en Valais.

– Au terme de sa visite en Suisse, le président afghan a été héliporté vendredi à Genève dans un Superpuma de l’armée suisse.

– Hamid Karzai regagnera l’Afghanistan après une escale à Paris.

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