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Les dirigeants de Swiss font céder les pilotes

Swiss Pilots et Aeropers font des concessions pour la survie de Swiss. Keystone Archive

Le syndicat des pilotes de l’ex-Crossair accepte 559 licenciements et renonce à l’application des décisions du tribunal de Bâle en sa faveur.

L’accord conclu avec les pilotes provoque des remous, en particulier chez le personnel au sol.

Coup de théâtre chez Swiss mercredi. Les dirigeants de la compagnie aérienne ont réussi à faire céder le syndicat des pilotes de l’ex-Crossair. Non seulement il accepte la suppression de 559 postes dans le cadre du repositionnement de la société annoncé en juin.

Mais il renonce en outre à exiger l’application de l’arrêt du tribunal arbitral de Bâle qui lui avait pourtant donné raison par deux fois en juillet 2002 et à la mi-juin 2003.

En contrepartie, Swiss annonce dans le même communiqué qu’elle versera un dédommagement unique aux pilotes qui perdront leur emploi. Les indemnités de départ se monteront ainsi à 85’000 francs pour un copilote et à 140’000 francs pour un capitaine.

Mais les pilotes issus de Swissair, dont les intérêts sont défendus par le syndicat Aeropers, font également des concessions. A partir de l’horaire d’hiver, ils travailleront en moyenne à 85%.

Quant aux 150 pilotes engagés en dernier, ils ne travailleront qu’à 65%. Sans cela, ils auraient été licenciés.

Acceptation des membres encore requise

L’accord reste soumis à l’acceptation des membres du syndicat des pilotes de l’ex-Crossair. Le différend qui opposait Swiss Pilots à la direction de Swiss remonte à la création même de l’héritière de Swissair.

Dès le début de la nouvelle compagnie aérienne, des inégalités de traitement sont apparues entre les pilotes provenant de Swissair et ceux qui étaient issus de Crossair.

Swiss condamnée deux fois

A tel point qu’au mois de juillet 2002, soit trois mois après le lancement de Swiss, le tribunal arbitral de Bâle a constaté que la Convention collective de travail conclue avec Aeropers (syndicat des pilotes de l’ex-Swissair intégrés dans Swiss) était discriminatoire envers les pilotes de l’ex-Crossair en termes de salaires, de vacances et de bonus.

D’après les termes du jugement, Swiss a été condamnée à payer 90’000 francs d’indemnités et 160’000 francs de frais de justice, sans compter les dommages et intérêts que les deux parties ont négociés conjointement.

Egalité de traitement

Pour Swiss Pilots (syndicat des pilotes de l’ex-Crossair) il était nécessaire de rétablir l’égalité de traitement entre les deux catégories de pilotes avec effet rétroactif, conformément au jugement rendu par le tribunal bâlois. Chose faite au mois d’août 2002.

A la mi-juin 2003, quelques jours avant l’annonce de la restructuration drastique qui a entraîné la suppression de 3000 postes de travail, la direction de Swiss a connu un nouveau revers judiciaire.

Le tribunal arbitral a donné raison au syndicat Swiss Pilots en déclarant illégaux, les 169 licenciements de pilotes de l’ex-Crossair intervenus aux mois de février et mars de la même année.

La proportionnalité en question

L’instance judiciaire reproche en effet à la compagnie aérienne de ne pas avoir tenu compte du principe de la proportionnalité. Le tribunal considère que toute réduction d’effectifs doit toucher dans une proportion égale les pilotes de l’ex-Crossair et ceux de l’ex-Swissair.

La direction de Swiss, qui aurait dû licencier quatre pilotes provenant de Swissair chaque fois qu’elle met à la porte cinq pilotes issus de Crossair, n’en demandait pas tant.

Contraints de prendre acte de ce jugement, les dirigeants de Swiss ont immédiatement invoqué les «coûts supplémentaires considérables» qu’impliquait cette décision, elle aussi rétroactive pour mettre davantage de pression sur les pilotes de l’ex-Crossair.

Tous les pilotes sous le même drapeau

Mercredi, la direction de Swiss semble avoir gagné une partie de son pari en faisant plier ses pilotes. Cet accord, comme celui trouvé avec Aeropers, «représente une condition essentielle pour la réussite de la restructuration annoncée de Swiss», précise le communiqué.

Swiss a néanmoins fait une autre concession d’importance. La compagnie renonce à isoler juridiquement les anciens pilotes Crossair dans une société séparée (Swiss Express) chargée de sous-traiter les opérations régionales.

Le syndicat estimait que le statut des pilotes qui y seraient affectés serait fragilisé. Dès lors, «il est important que nous soyons réunis sous un même drapeau», déclare Frédérick Gunn, membre de Swiss Pilots.

La restructuration réussira-t-elle?

En contrepartie, la compagnie ne sera pas obligée d’appliquer le jugement du tribunal arbitral de Bâle qui l’obligeait à respecter le principe de la proportionnalité. Les plaintes encore pendantes seront en effet retirées.

Swiss précise en outre que les négociations avec le personnel de cabine est en bonne voie. Alors qu’en revanche rien n’a été conclu avec le personnel au sol qui conteste l’accord intervenu entre la direction de Swiss et ses pilotes.

«On ne peut pas octroyer de l’argent à un groupe privilégié et prendre à ceux qui sont déjà désavantagés», explique Philipp Hadorn, vice-président de Gata, syndicat qui défend les intérêts du personnel au sol.

Gata, qui a rompu mardi les négociations avec la direction de Swiss, n’entrera pas en matière tant que Swiss ne présentera pas un plan crédible.

Dans ces conditions, reste à savoir si Swiss pourra déjouer les pronostics sévères colportés par la presse dominicale.

Avec des pertes de 4,4 millions de francs par jour, certaines analyses anticipent sa mort le 13 octobre prochain, soit quatre jours avant les élections fédérales.

swissinfo et les agences

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