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Une mort qui interpelle

Une rose a été deposée sur la porte des toilettes publiques du Closelet, lundi, après le décès, dimanche, d'une femme de 60 ans. Keystone

Une femme sans-abri a succombé au froid, ce week-end, à Lausanne. Un drame qui pose au plan national la question des limites de l'assistance forcée.

«Aujourd’hui, on n’a plus le droit d’avoir froid et d’avoir faim!» Le père fondateur des restaurants du cœur et des «enfoirés», Coluche, doit se retourner dans sa tombe. En effet, un sans-abri est encore mort de froid.

Le drame s’est produit en ville de Lausanne dans la nuit de samedi à dimanche. Victime du froid, une femme connue des services sociaux a été retrouvée sans vie dans des toilettes publiques près de la gare.

Cet abri précaire lui a été fatal. Elle qui s’abritait souvent au centre ville, sur la place Saint-François. La police lui venait régulièrement en aide pour finir la nuit au chaud.

Des structures d’accueil existaient

«Cette mort me touche profondément», assure Bernard Mettraux, municipal de la police en Ville de Lausanne. «D’autant plus que des structures d’accueil supplémentaires ont été mises en place samedi soir.»

Mais n’était-ce pas trop tard, alors qu’une pétition le demandait depuis quelques jours déjà? «Deux structures sont déjà existantes et offrent 48 lits, précise Bernard Mettraux. Et l’ouverture de l’abri de la Protection civile, en cas de grands froids, doit normalement suffire à offrir des places pour les nécessiteux.»

Il semble donc que la victime ne savait pas que cet abri venait d’ouvrir. Et, comble de malheur, les rondes effectuées par la police à la recherche de personnes dans le besoin ne l’ont pas amenée à l’endroit du drame.

L’obligation d’aider

«Au-delà de ce drame, lance Bernard Mettraux, il est évident que l’on n’a plus le droit de mourir de froid ni de faim. Toutefois, à côté du manque de structures ou d’aides sociales, se pose la question très délicate de l’assistance forcée.»

Or, précise le municipal de la police lausannoise, «il arrive fréquemment que des personnes refusent toute aide. Et cela peut leur être fatal».

Et le devoir d’assistance? «Il existe, bien entendu, et nous essayons de faire au mieux, en tout cas au sein de la police municipale, ajoute Bernard Mettraux. Cependant, nous ne pouvons pas utiliser de moyens coercitifs et forcer des personnes à se mettre à l’abri. C’est un problème éthique qui est quasi insoluble.»

Même son de cloche de la part de Beat Geiser, directeur des institutions sociales vaudoises de l’Armée du Salut. «Nous pouvons aller aussi loin que possible pour tendre la main à une personne en détresse, précise Beat Geiser. Et essayons d’anticiper au maximum une situation, afin de prévenir un accident.»

Cela dit, ajoute Beat Geiser, «la mort d’un individu est toujours dramatique. Mais le risque qu’une personne meure existe, quand elle ne veut pas qu’on lui tende la main. Même si ce constat est horrible.»

La solution appartient à tous

En attendant, constate Bernard Mettraux, l’aide aux désespérés est l’affaire de tous les citoyens, qui, par ailleurs, font souvent preuve d’une grande générosité. C’est le cas également de la part de nombreuses œuvres caritatives. «Une générosité qui pourrait en outre être renforcée par une meilleure collaboration de la part des cantons», conclut le municipal.

Jean-Louis Thomas

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