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Une guerre ciblée contre le bostryche

Le bostryche transforme rapidement les arbres en squelettes. Keystone

Après une année 2003 dévastatrice, les responsables cantonaux des forêts ont défini leur stratégie de lutte contre le bostryche.

Faute de moyens, ils vont concentrer leurs efforts sur les forêts dites protectrices. Car leur dépérissement est une menace pour la population.

«Il n’existe pas de méthode révolutionnaire pour lutter contre le bostryche», explique à swissinfo Walter Schwab, président de la Conférence des inspecteurs cantonaux des forêts (CIC).

«Malgré nos efforts, nous ne sommes pas encore parvenus à provoquer le ‘grounding’ du bostryche, ce qui est de toute façon impossible», poursuit celui qui est aussi le chef du Service des forêts, de la chasse et de la pêche du canton de Fribourg.

Et d’avertir que l’été 2004 risque fort de voir ces petits coléoptères proliférer à nouveau de manière exponentielle.

Le bostryche, en effet, s’attaque aux arbres affaiblis, qui n’ont plus assez de sève pour l’empêcher de pénétrer sous son écorce. Après la tempête Lothar, en décembre 1999, et surtout la sécheresse de 2003, il a trouvé dans les forêts endommagées un terrain particulièrement fertile.

Priorité aux forêts protectrices

Conséquences de ces attaques: dans de nombreuses régions, en particulier en montagne, le danger d’érosion, de crues, de chutes de pierres et d’avalanches va fortement augmenter.

Les inspecteurs cantonaux des forêts veulent prévenir cette catastrophe et maintenir les risques à un niveau acceptable dans les endroits exposés. Ils s’attacheront donc à préserver en priorité les peuplements qui assurent une barrière naturelle au-dessus des habitations et des voies de communication.

Cette stratégie de lutte partielle est directement dictée par la diminution de la manne publique. De 35 millions de francs en 2003, l’aide fédérale à l’élimination du bostryche va être réduite à 18 millions en 2004. Et dès 2005, la Confédération limitera son soutien aux seules forêts protectrices.

Pour les autres, ce sera aux cantons, aux communes, aux bourgeoisies ou aux propriétaires privés de passer à la caisse.

Cercle vicieux

L’économie forestière helvétique se trouve prise dans un cercle vicieux. Les dégâts résultant d’événements comme Lothar ou de sécheresses exceptionnelles font chuter le prix du bois et proliférer le bostryche, qui provoque à son tour de gros dégâts.

Pour en sortir, Walter Schwab préconise une promotion de l’utilisation du bois, notamment dans la construction.

«Les maîtres d’œuvre, particulièrement les pouvoirs publics, devraient penser plus souvent au bois, explique le président de la CIC. Cela ferait remonter son prix et les propriétaires forestiers auraient ainsi davantage de moyens pour entretenir leur bien.»

Scénario catastrophe

Quant à savoir à quoi ressemblerait la forêt suisse, si rien n’était fait pour lutter contre le bostryche, la réponse de Beat Forster, collaborateur scientifique à l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage est claire.

«Elle rajeunirait rapidement, explique-t-il à swissinfo. Et les promeneurs devraient s’habituer à des paysages tout à fait insolites.»

«Mais la mort des arbres les plus vieux interdirait une exploitation durable du bois et empêcherait la forêt de remplir certaines de ses fonctions les plus importantes», avertit Beat Forster.

Une perspective, en d’autres termes, que personne ne souhaite affronter.

swissinfo et les agences

– Avec 1,2 millions d’hectares, la forêt couvre près du tiers de la surface du pays.

– Elle est sous-exploitée: sur 10 millions de m3 coupés chaque année, 5 millions sont transformés par la filière du bois.

– Peu diversifiée, elle compte trop de sapins rouges (épicéas) qui représentent 40% des arbres.

– La forêt suisse est également trop vieille et dense, avec sa moyenne de 366 m3 de bois par hectare.

– En raison de la sécheresse exceptionnelle, 2003 a été une année record pour le bostryche. Quelque 2 millions de m3 d’épicéa ont subi l’attaque du coléoptère. Les conditions très favorables à la ponte lui ont permis de former jusqu’à trois générations.

– Une grande partie des bostryches survivent à l’hiver et les experts s’attendent à une nouvelle prolifération cette année.

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