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A Lugano, les oeuvres délirantes de Basquiat

Jean-Michel Basquiat (à dr.) dos-à-dos avec son idole Andy Warhol. Keystone Archive

Le Musée d'art moderne de Lugano sort des chemins battus. Après Modigliani, Chagall et Schiele notamment, il expose les oeuvres de Jean-Michel Basquiat.

L’«enfant terrible» du pop art américain, l’âme du graffiteur rebelle, mort tragiquement en 1988, semble hanter les salles de la Villa Malpensata de Lugano, siège du Musée d’art moderne.

La rétrospective consacrée à Jean-Michel Basquiat, est «l’hommage le plus complet jamais rendu par la Suisse à un des principaux protagonistes du milieu artistique international des années 80».

Rudy Chiappini, directeur du Musée luganais l’affirme et ajoute même que l’exposition est l’une des plus importantes mises sur pied en Europe.

Expressionnisme

Avec Basquiat, le Musée d’art moderne de Lugano a décidément changé de ligne après sa dernière rétrospective, consacrée à Egon Schiele il y a deux ans.

«C’est vrai que cette anthologie est plutôt atypique pour notre musée», admet Rudy Chiappini, mais elle permet au public de découvrir ou de redécouvrir un important témoin de l’expressionnisme abstrait américain. Ceci à l’heure où New York et les Etats-Unis lui consacrent toute une série d’expositions.»

Le parcours de la rétrospective est chronologique. Les oeuvres ont été rigoureusement sélectionnées. Elles proviennent de collections privées surtout, mais aussi de galeries et musées du monde entier.

Une cinquantaine de tableaux, une vingtaine de dessins et une dizaine de coproductions réalisées avec Andy Warhol, le roi du pop art et avec l’Italien Francesco Clemente, retracent la fulgurante carrière du jeune artiste.

Sous le sigle de «SAMO»

Les créations de Basquiat, dont certaines frappent par leurs grandes dimensions, sont une fusion de symboles, inscriptions et signes. L’empreinte du gribouilleur, devenu graffiteur à la fois fragile, passionné et rebelle, y est omniprésente.

Les couleurs sont un coup de poing dans l’œil, parfois désemparé, du visiteur. Ce sont les couleurs de la rue, de la ville, les couleurs des affiches publicitaires qui placardent les murs de New York.

La ville où il est né, en 1960, de père haïtien et mère portoricaine. La ville où il est mort, dramatiquement, en 1988.

Autodidacte, passionné de dessin dès son plus jeune âge, Jean-Michel Basquiat a 17 ans lorsqu’il se lance, avec un ami portoricain, dans une carrière de sprayeur. A la fin des années 70, il devient célèbre dans le milieu des graffitis américains et signe ses oeuvres «SAMO», soit «Same Old Shit» (littéralement: ‘toujours la même merde’).

Dès 1980, le jeune homme participe à des expositions collectives à New York. En 1981, pas encore âgé de 21 ans, il devient subitement célèbre grâce à l’article du critique d’art René Ricard qui va jusqu’à le comparer à Jean Dubuffet.

Une lente descente aux enfers

La gloire soudaine marque aussi le début d’une lente descente aux enfers. Intelligent, curieux de tout, Basquiat ne sait pas résister aux plaisirs et aux dangers qu’il dénonce dans ses tableaux: l’alcool, la drogue, le sexe sans frein, l’adulation. En même temps, il se sent opprimé pour la couleur de sa peau, victime du racisme.

Cela ne l’empêche pas de continuer à produire et à exposer dans le monde entier. En octobre 1982, Jean-Michel Basquiat fait la connaissance d’Andy Warhol, son idole, avec qui il se lie profondément d’amitié et entame une étroite collaboration. La mort du maître du pop art, en février 1987, crée un vide difficile à combler dans la vie du jeune Haïtien.

Depuis plusieurs années, Basquiat consomme régulièrement du LSD et de l’héroïne, entre autres drogues. Au début de 1988, il tente une désintoxication qui échoue. Le 12 août 1988, son corps sans vie est retrouvé dans son appartement new-yorkais. Le «Jimmy Hendrix de l’art» a succombé à une overdose. Il n’avait pas 28 ans.

swissinfo, Gemma d’Urso, Lugano

Jean-Michel Basquiat, rétrospective. Du 20 mars au 19 juin 2005 au Musée d’art moderne de Lugano, Villa Malpensata, Riva Caccia 5.
Ouvert du mardi au dimanche, de 9h à 19h ainsi que les lundi de Pâques et Pentecôte.
Durant l’exposition, le catalogue «Jean-Michel Basquiat», édité par Skira Editore en italien et anglais, est vendu au prix de 50 francs.

– La rétrospective est complétée par une exposition des photographies inédites de Jean-Michel Basquiat prises dans les années 80 à New York par le photographe luganais Edo Bertoglio, ami intime de l’artiste.

– Edo Bertoglio est aussi l’auteur du film «Downtown 81» qui retrace la vie de Basquiat avant la célébrité.

– Le Musée d’art moderne de la ville de Lugano, ouvert en 1992, a lancé une série de vastes rétrospectives – Bacon, Nolde, Soutine, Modigliani, Munch, Chagall, Schiele, pour ne citer que les plus grands noms.

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