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Sir Paul fait pleuvoir les perles sur Zurich

Jamais un ex-Beatle n'avait joué autant de titres du groupe sur scène. swissinfo.ch

35 titres, dont 23 des Beatles. Si l’émotion peut se traduire en chiffres, ces deux-là en disent long sur ce qu’a été le concert de Paul McCartney mercredi soir à Zurich.

Alors tant pis pour la pluie qui n’a pas cessé de tomber pendant deux heures et demie. La magie n’a pas de prix.

24 ans après la disparition de John Lennon, trois ans après celle de George Harrison, avec Ringo Starr qui continue à cultiver la discrétion, Paul McCartney détient aujourd’hui la quasi-exclusivité de la marque Beatles.

Et pour cette tournée mondiale entamée en 2002, il ne se prive pas de le rappeler. Mercredi soir, sous les trombes d’eau qui inondaient le stade du Letzigrund, 30’000 fans suisses de tous âges en ont fait la jouissive expérience.

Plutôt disert avec la foule, Sir Paul ne cesse de lui demander comment elle supporte le déluge. Courtoisie toute britannique, qui fait aisément oublier son obstination à vouloir dire quelques mots en schwytzertütsch… et à railler l’accent gutural de la langue locale.

Rock n’Roll

Mais peu importe la tchatche, l’homme est d’abord là pour la musique. Et quelle musique!

Le band est impeccable. Brian Ray et Rusty Anderson sont non seulement de vrais “guitar heroes”, mais ils ont exactement le look que devraient avoir des “garçons dans le vent” d’aujourd’hui. Paul Wickens aux claviers et le monumental Abe Laboriel Jr. à la batterie complètent cette formidable machine à rocker.

Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Construit en trois parties, le concert démarre à un tempo d’enfer. Jet, Got to Get You into my Life, All my Loving, Let me Roll it: Paul nous rappelle d’entrée que dans Beatles, il y a Beat.

Séquence émotion

Maybe I’m Amazed, puis The Long and Winding Road marquent la transition vers la seconde partie. Le groupe quitte la scène, McCartney est seul face au public, avec sa guitare sèche. La voix est mal assurée en attaquant Blackbird. Il s’en rend très bien compte, grimace un peu, mais retrouve vite ses marques.

“Il y a des choses que l’on devrait dire aux gens quand il sont là”, confie Paul au public avant de livrer son hommage à John, dont il aimerait qu’il soit là aujourd’hui (Here Today). Et de son autre ami disparu (Geroge), il reprend All Things Must Pass, avec une émotion non feinte.
Un ange passe.

“But the show must go on”. Le band est revenu sur scène et attaque l’envoutant For No One. Pour la petite histoire, c’est en Suisse, à Klosters que fut écrite cette chanson, en mars 1966. Paul y passait des vacances avec Jane Asher, dont il se séparera trois ans plus tard.

Le texte dit pourtant déjà tout d’un amour qui se termine, dans l’ambiance glauque d’un petit matin où la flamme s’est éteinte dans les yeux mouillés de larmes de l’autre.

Crescendo

Du “gentil” McCartney, on ne retient souvent que les ballades. Et pourtant, des chansons aussi musclées que Drive my Car, Get Back ou Back in the USSR, c’est lui. Et dans leur version 2004, ces pièces balancent comme elles l’auraient fait à l’époque où Paul s’époumonait avec les autres à hurler dans une cave de Hambourg.

Le final n’est qu’un long crescendo, qui passe par Penny Lane, Band on the Run et le monumental Live and Let Die, composé à l’époque pour le film éponyme de James Bond. Les feux d’artifice qui éclatent sur ce son énorme sont plus qu’un simple gimmick. McCartney et son groupe sont réellement en train d’enflammer le stade.

C’est le moment de lui faire reprendre en choeur le refrain de Hey Jude, premier point d’orgue du concert, avant les inévitables rappels.

Tout est dit

Ici, c’est 100% Beatles. Deux fois trois titres pour achever la démonstration de ce qui a été dit mille fois. A savoir qu’entre 1962 et 1970, les quatre de Liverpool ont inventé tous les courants que le rock et la pop développeront plus tard.

Y compris le hard, avec l’implacable Helter Skelter, premier vrai cri de naissance d’un style que Led Zep et / ou Deep Purple ne codifieront qu’une année plus tard, en 1969.

Et comme on l’aime aussi dans le registre plus soft, Sir Paul n’oublie ni Yesterday ni Let it Be.

Classique sixties

Nostalgie? Bien sûr, le show en joue à fond. Guitares et basse d’époque, McCartney porte la veste à col mao des sixties. Lorsqu’il apparaît en noir et blanc sur les écrans géants, on se croirait revenu 40 ans en arrière.

Des écrans qui ne cessent de diffuser des icônes de ces sixties mythiques, où une bonne frange du public de la soirée n’était pas née. Mais même jeunes, les fans d’aujourd’hui ne se pâment plus comme le faisaient les hystériques de la beatlemania.

Ainsi, ces images de folie en arrière-plan d’une star qui n’a plus rien à prouver apparaissent plus comme un clin d’oeil que comme une incitation à réveiller une flamme de toute façon acquise, mais désormais plus intérieure. Comme si le catalogue des Beatles faisait déjà partie du répertoire classique.

Au fait, il y manquait When I’m Sixty Four.
Il est vrai que pour Paul McCartney, c’est encore dans trois ans.

swissinfo, Marc-André Miserez

– Né le 18 juin 1942 à Liverpool, Paul McCartney a tâté de la trompette et du piano avant de tenir la guitare des Quarrymen, devenus les Beatles. Il adopte la basse au départ de Stuart Sutcliffe.

– Les Beatles marquent la décennie 60-70 avec des dizaines de millions d’albums vendus dans le monde entier et le passage du rock n’ roll au Rock, avec une majuscule.

– A la séparation du groupe, Paul monte avec sa femme Linda le groupe Wings et repart pour dix ans de succès. Il décide d’arrêter l’aventure en 1980, après l’assassinat de John Lennon.

– Paul McCartney ne prend pas sa retraite pour autant et continue à composer (y compris des musiques de films et un oratorio), à enregistrer et à donner des concerts.

– La tournée mondiale qui passait par Zurich a démarré en 2002, et le répertoire est désormais composé aux deux tiers de titres qu’il a écrit du temps des Beatles.

– Certains d’entre eux n’avaient jamais été joués sur scène. Ni par le groupe (qui a cessé les tournées en 1966), ni par aucun de ses ex-membres.

– Le répertoire de la tournée compte même une authentique rareté: In Spite of All Danger, composée par Paul et George en 1958, qui se trouvait sur la face B du seul 45 tours jamais enregistré par les Quarrymen.

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