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Alicia Keys sur la voix de l’amour à Montreux

Le fille de Harlem en impose à Montreux. C'était jeudi soir. © Lionel Flusin © Montreux Jazz Festival Foundation

Elle est venue, elle s'est donnée, ils l'ont aimée. La New-Yorkaise a offert une grande soirée d'amour à Montreux jeudi. Un concert en forme de BO pour amant en sucre d'orge. Léché, alléchant.

Première chose, la belle surprise de cette soirée a été masculine. Il s’appelle Jermaine Paul, est choriste pour Alicia depuis plus de quatre ans. Mais il s’apprête aussi à sortir son premier album à l’automne. Qui devrait faire du bruit.

Sur invitation de la belle, il s’est offert un set de trois quarts d’heure de toute beauté. Voix soul habitée rappelant celle de Stevie Wonder, agile au plus haut point, jeu de guitare acoustique ardent, l’homme au bandana s’est d’abord fait accompagner du seul cajon. S’y sont ajoutés chœurs, guitare, basse, batterie, son collier de perles s’égrainant.

Epure de l’accompagnement dans un style musical qui préfère souvent la pléthore, il a chanté «tout le monde a besoin de quelqu’un à aimer», emportant le public dans sa fougue. Visiblement ému, il a remercié et remercié encore, jusqu’à en bégayer.

Jermaine Paul a terminé son set avec son premier single «I’m ready to fall in love». Claude Nobs ne s’est pas fait faute de l’adouber – il est officiellement invité à se produire à Montreux l’an prochain.

Q fait les présentations

«Elle est fabuleuse, talentueuse et magnifique! Elle comprend le groove!» Cette fois, on parlait bien d’Alicia. Ce «on» n’était autre que Q, le grand Quincy Jones, venu dire tout le bien qu’il pense de la Petite. Un joli candi pour celui dont Montreux a célébré en grandes pompes musicales les 75 ans en début de semaine.

Rompu aux meilleurs shows, le band de la Belle a scandé «Put your hands on your head, Quincy Jones!», suivi par le public. Enfin elle est arrivée, sur le coup des 21h30, cheveux tirés en queue de cheval virevoltante, tunique blanche, pantalon noir.

Un départ très funk-rock, très enlevé, dix musiciens choisis parmi la crème de la crème américaine – trompette qui se permet la rugosité, sax frétillant, trois choristes a qui on ne l’a fait pas, et une section rythmique qui mise sur le retrait intelligent.

La sueur l’irradiait

En une heure trente de show, Alicia Keys s’est donnée entière, avec un plaisir évident, démontrant, elle aussi, que Montreux ne laisse aucun artiste indifférent. Après le seul premier titre, la sueur l’irradiait déjà.

Avec sa voix au millimètre et son jeu de piano qui sait toucher là où ça fait mal, sa gestuelle sensuelle (bien que pas toujours d’une grâce folle), la Miss de 27 ans n’a rien laissé au hasard. Du maîtrisé, de l’hypercontrôlé, qui ne favorise pas toujours l’émotion, mais c’est un autre débat.

Du rythme en tout cas, à foison. Alicia est passée jeudi de la soul bien sucrée au funk, des accents hip hop aux mini-improvisations jazzy, de l’esquisse reggae à la salsa maison. Les titres se sont enchaînés à une cadence élevée. Des interprétations brèves, denses: un constant zappage centré sur la BO amoureuse contemporaine.

Sa dimension fusionnelle

Les échanges vocaux entre Alicia et Jermaine Paul, c’est à ces moments-là surtout que la musique mainstream et limpide de la Belle a pris son surcroît d’intensité tellurique, sa pleine dimension fusionnelle, extatique, à donner la chair de poule.

C’est au piano et seule (ou presque) avec sa voix qu’elle a aussi le plus touché. Le public la suivie dans son trip amoureux avec l’envie d’aller plus loin, lui offrant ici une peluche, là des fleurs argentées. «Thank you for your love!»…

«No one» au premier rappel, la foule a chanté plus fort qu’elle sa grand messe à l’amour. «If I ain’t got you» au second et des doigts joints en forme de cœur sont apparus dans la salle. La nuit ne faisait que commencer. Wôôôhouwôôh!

swissinfo, Pierre-François Besson à Montreux

Fille d’une mère irlando-italienne et d’un père jamaïcain, Alicia Keys est née à Harlem en janvier 1981.

A quatre ans, elle participe à un épisode du Cosby Show et commence l’étude du piano classique trois ans plus tard. Plus tard, elle reçoit une bourse d’étude de l’Université Columbia mais opte plutôt pour une carrière musicale.

Elle enregistre un titre de la BO de Men in Black. Ce premier enregistrement professionnel est suivi d’un premier album (Songs in A Minor, 2001), qui se vend à plus de dix millions d’exemplaires.

Trois albums suivent – records de vente, Grammy Awards en quantité, débuts au cinéma, sa carrière rime avec succès public. Alicia Keys vient d’annoncer son souhait d’arrêter la musique à trente ans, dans trois ans.

La 42ème édition du MJF a lieu du 4 au 19 juillet.

Au total, les deux scènes voient défiler près de 90 groupes.

Une trentaine de concerts sont des exclusivités suisses, dont ceux de Sheryl Crow, Joan Baez, The Raconteurs, Leonard Cohen et Madness, Gnarls Barkley et Travis, Etta James et les Babyshambles.

Maintes animations complètent la programmation, dont 250 concerts et DJ gratuits, des croisières sur le Léman et des voyages musicaux en train.

Les organisateurs disposent d’un budget de 18 millions de francs.

Le festival a été créé en 1967 par Claude Nobs, toujours aux commandes. De nombreux disques live y ont été enregistrés.

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