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Ce qu’impliquerait une suppression des rentes pour enfants pour la Cinquième Suisse

Le Parlement
Lors de sa session de printemps, le Conseil national s’est prononcé en faveur d’une suppression des rentes pour enfants, qu’il souhaite remplacer par des prestations complémentaires Peter Klaunzer / Keystone

Le Conseil national s’est prononcé jeudi en faveur de la suppression des rentes pour enfants. Une mesure qui toucherait également les Suisses de l’étranger à la retraite ainsi que les travailleuses et travailleurs étrangers rentrés dans leur pays.

Aujourd’hui, les bénéficiaires d’une rente AVS qui ont des enfants mineurs ou en formation ont droit à des versements supplémentaires. Et ce, que le centre de leur vie soit en Suisse ou à l’étranger.

Le Conseil national (la Chambre basse du Parlement) a adopté jeudi une motion proposant la suppression de ce droit. Les débats ont été dominés par le souhait de ne plus voir ces rentes partir à l’étranger.

La conseillère nationale écologiste Manuela Weichelt représentait la minorité de la commission opposée à cette motion. Selon elle, l’idée – aussi véhiculée dans la presseLien externe – que des Suisses à la retraite épousent des parents isolés en Thaïlande pour bénéficier d’une rente est «absurde».

La motion met en avant deux principaux arguments en faveur de la suppression des rentes dites pour les enfants de retraités: d’une part, celui des économies à réaliser et, d’autre part, celui de l’équité. Le texte propose un nouveau système pour remplacer ces paiements.

Elle est un complément à la rente de vieillesse pour les personnes assurées ayant des enfants de moins de 18 ans à charge (ou de moins de 25 ans si ces derniers suivent une formation). Si les deux parents perçoivent une rente de vieillesse, ils ont droit à deux rentes pour enfants. Ensemble, celles-ci ne doivent pas dépasser 60% de la rente de vieillesse maximale.

Source: Glossaire de l’AVS/AILien externe

L’argument des économies est clair. Les assurances sociales sont sous pression. Depuis l’acceptation d’une 13e rente AVS dimanche 3 mars, les partis bourgeois craignent encore plus un déséquilibre financier. Mais les économies réalisables avec les rentes pour enfants sont limitées. Elles s’élèvent à environ 230 millions de francs, un faible montant au regard des près de 48 milliards de francs de dépenses enregistrés par l’AVS en 2022.

La tendance est toutefois à la hausse. Ces dernières années, le nombre de bénéficiaires de ces rentes a augmenté. Entre 2010 et 2020, il est passé d’environ 10’000 à quelque 32’000 personnes. À peu près un tiers de ces personnes vivent hors des frontières de la Suisse. Il s’agit en grande partie de Suisses de l’étranger, mais aussi de travailleuses et travailleurs étrangers rentrés dans leur pays. La plupart des rentes sont versées en France, en Allemagne et en Italie. Elles sont aussi en forte augmentation en Thaïlande, un pays très apprécié des personnes retraitées, où la diaspora suisse ne cesse de croître.

Les hommes sont presque les seuls à profiter des rentes pour enfants

L’argument de l’équité est lié au genre, car les hommes sont les principaux bénéficiaires (à plus de 90%) de ces rentes. Une situation qui a une cause biologique, les hommes pouvant avoir des enfants plus tard.

En outre, ces rentes pour enfants dépendent du montant de la rente AVS, ce qui favorise les personnes aisées et désavantage certaines catégories de personnes dans le besoin – comme les parents en âge de travailler qui perçoivent des allocations familiales.

Ces rentes sapent la solidarité entre les générations et sont discriminatoires à plusieurs égards, ont argumenté Benjamin Roduit (Le Centre) et Andri Silberschmidt (Parti libéral-radical) au nom de la commission consultative. Leurs arguments en faveur de la motion ont convaincu le Conseil national.

Un risque de pauvreté pour les enfants?

Ces dernières années, le Conseil fédéral a examiné à plusieurs reprises la possibilité de supprimer ces rentes et l’a toujours rejetée. Selon lui, une telle mesure augmenterait le risque de pauvreté pour les enfants et réduirait leurs chances de se former.

Sur les quelque 31’000 enfants concernés par de telles rentes, 22’000 vivent en Suisse. La motion prévoit que leurs parents puissent compenser la perte des rentes pour enfants par des prestations complémentaires. Des prestations auxquelles les Suisses de l’étranger n’ont en principe pas droit.

Le Conseil national a finalement adopté l’objet par 117 voix contre 62. La majorité bourgeoise a voté pour, la gauche et les verts ont voté contre.

Si la suppression s’impose, les rentes en cours ne seraient pas concernées – mais il n’y aurait plus de nouvelles rentes pour enfants. Il revient désormais au Conseil des États (la Chambre haute) d’en débattre et de trancher.

Texte relu et vérifié par Benjamin von Wyl, traduit de l’allemand par Dorian Burkhalter

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