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«Lever les yeux au ciel» pour y voir quoi?

«Lever les yeux au ciel», image tirée du spectacle. Emmanuelle Carraud

Dans sa dernière pièce, l'auteur franco-suisse Michel Beretti s'interroge sur l'Europe et ce qui reste de ses idéologies.

Au centre de son texte, il place Adriano Sofri, l’ancien militant italien, dont la vie se joue au Théâtre de l’Orangerie, à Genève.

Michel Beretti essaie de rester modeste lorsqu’il dit qu’à son actif il y a une centaine de pièces de théâtre, dont les premières remontent aux années 1970. A l’époque, il était encore étudiant à l’Université de Genève, lui le Français à qui la Suisse littéraire témoignera plus tard d’une fidélité sans faille.

Il en est heureux et ne le cache pas. Vingt-cinq de ses pièces, consacrées à la Suisse, à son Histoire, à sa culture et à ses grands personnages, feront prochainement l’objet d’une publication souhaitée par la fondation alémanique Landis & Gyr, sise à Zoug.

C’est là que Michel Beretti sera en résidence (d’août 2007 à janvier 2008) pour revoir et peaufiner ces 25 pièces qui suivent, entre autres, les parcours exceptionnels d’un certain Suchard ou Henry Dunant.

Mais en attendant, c’est à une autre destinée, italienne celle-là, que s’intéresse Beretti. Sur commande du metteur en scène Hervé Loichemol, le dramaturge évoque donc dans sa dernière pièce, «Lever les yeux au ciel», l’histoire d’Adriano Sofri ex-dirigeant de Lotta Continua qui, en 1988, fut accusé d’avoir commandité l’assassinat du commissaire Calabresi 16 ans plus tôt.

Condamné, puis acquitté, puis recondamné et maintenu en prison, Sofri (63 ans), ancien chrétien de gauche, qui n’a pas perdu son âme militante, vit aujourd’hui en résidence surveillée, en Toscane. C’est là que l’auteur est allé le voir avant d’écrire «Lever les yeux au ciel».

La fin des idéologies

Ce titre n’a rien d’innocent, bien sûr. Dans ses plis, se cache une question essentielle pour Michel Beretti: quel horizon le ciel invoqué dégage-t-il?

Aucun, serait-on tenté de répondre désespérément si l’on suit la pensée de l’auteur. «Ce qui m’intéresse dans certaines destinées individuelles, confie-t-il, c’est le monde qui se profile à travers elles. Autrement dit, notre présent. Lorsque je parle de Sofri, je parle aussi de l’Europe et de tout ce qui s’y est passé depuis la fin de la deuxième guerre».

«La fin des idéologies, et du communisme en particulier, a fait disparaître un horizon messianique, poursuit l’auteur. Faut-il donc donner un sens à cette disparition, ou faut-il, au contraire, admettre que nous assistons à une sorte de dérive?»

Autant d’interrogations que soulève la pièce. Néanmoins, «il ne s’agit pas là d’une œuvre militante, avertit Michel Beretti, mon but étant d’y faire croiser des voix tout simplement. Des voix dont s’est inspiré Adriano Sofri dans sa lutte, dans ses écrits. La voix de Pasolini, par exemple. Pour résumer, je dirai que cette pièce est une méditation sur le temps humain».

Créé début juillet à la Chartreuse de Villeneuve-les-Avignon, un lieu propice à la méditation justement, «Lever les yeux au ciel» sera présenté à Genève, d’abord au Théâtre de l’Orangerie du 27 au 30 juillet, puis au Théâtre Saint-Gervais, du 31 octobre au 11 novembre prochain.

swissinfo, Ghania Adamo

«Lever les yeux au ciel» de Michel Beretti.
A voir à Genève, Théâtre de l’Orangerie du 27 au 30 juillet, puis au Théâtre Saint-Gervais, du 31 octobre au 11 novembre prochain.

Né en France en 1948. Après des études de Philosophie et de Linguistique à l’Université de Genève, il commence à écrire pour le théâtre, au Théâtre Mobile puis au T/ACT.

Dramaturgies à l’Opéra de Francfort, Hambourg, Mannheim, Festival de Schwetzingen. Première mise en scène lyrique à l’Opéra de Francfort (direction Michael Gielen) en 1981. En 1985, premier livret d’opéra (Dérives, musique Michael Jarrell). L’Opéra de Paris crée pour lui le poste de dramaturge qu’il occupe de 1986 à 1995.

Auteur à ce jour d’une cinquantaine de pièces de théâtre, de livrets d’opéra et d’adaptations représentés sur les scènes suisses, allemandes et françaises.

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