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Art et science, un dialogue ouvert à Barcelone

D'étranges plantes «respirantes», une installation de l'artiste Ping Qui à voir dans le cadre de l'exposition «Think Art-Act Science». DR

Avant Lucerne et San Francisco, Barcelone accueille «Think Art-Act Science», une exposition itinérante et ambitieuse qui réunit une dizaine d’œuvres réalisées par des artistes suisses. Et conçue à la suite d’une réflexion approfondie entre artistes et scientifiques.

L’Office Fédéral de la Culture (OFC) et la Haute Ecole des Beaux-arts de Zurich ont conduit une aventure atypique à partir de deux registres rarement associés: l’art et la science. A cette aventure, ils ont donné le nom de «Swiss artists-in-labs». En clair, il s’agit là d’un programme de recherche artistico-scientifique mené entre 2007 et 2009 et axé sur trois thèmes: écologie et environnement, perception de l’espace, exploration de nouvelles technologies.

Trois thèmes et autant de domaines passionnants pour une quinzaine d’artistes suisses ou étrangers domiciliés en Suisse. Sculpteurs, vidéastes, performers, architectes du son ou chorégraphes, triés sur le volet, ont bénéficié d’une bourse pour réaliser un travail de recherche dans un laboratoire ou institut helvétique de renom, et ce à l’occasion d’une résidence artistique de 9 mois. Il en a résulté des œuvres d’art d’une grande diversité qui font aujourd’hui l’objet d’une exposition ambitieuse, présentée au Museum Arts Santa Monica, à Barcelone, sous le titre «Think Art- Act Science» (TAAS).

L’exposition de Barcelone, qui s’ouvre donc le 18 décembre, n’est que la première étape d’un parcours lui aussi ambitieux car il mènera en Amérique puis en Asie les œuvres de ces artistes. Histoire de marquer le rayonnement de la Suisse à l’étranger. D’ailleurs, Pro Helvetia apporte son aide à «Swiss artists-in-labs» via son programme de coopération «Swiss-Chinese Explorations».

Une aide précieuse qui permet l’échange de résidences artistiques entre notre pays et la Chine. On ne s’étonnera donc pas de voir l’exposition «Think Art-Act Science» à Pékin en 2012.

Un duo d’enfer

Mais ça, c’est de la musique d’avenir. Pour l’instant, restons à Barcelone où sont présentées neuf créations: sculptures, installations vidéo et performances réalisées par dix artistes, dont un duo d’enfer Hina Strüver et Mätti Wüthrich. Très connu à Zurich où il se produit dans des espaces publics, ce couple de varappeurs fait l’ouverture de l’exposition avec une performance live intitulée «Regrowing Eden».Traduisez: recréer le paradis. Vaste programme qui consiste à escalader la façade du musée dans un geste à la fois farceur et engagé.

Sanglés dans une combinaison jaune de laquelle surgissent de très longues bandes de couleur idoine,  les deux performers ressemblent à des marionnettes à fils. C’est du moins l’impression ludique et théâtrale qu’ils laissent sur les photos. Car dans la réalité, il en est autrement. Et la réalité, c’est Irène Hediger, commissaire de l’exposition, qui nous la raconte.  

Elle explique: «Avec cette performance, le duo qui ascensionne la façade du musée a voulu reproduire les conditions de croissance d’une plante qui en poussant s’accrocherait à un tuteur, comme les deux artistes s’accrochent en grimpant aux parois du mur. Les bandes jaunes qui les tirent vers un ciel dont on ignore tout rappellent les ramifications d’une plante dont on ignore tout également. Et pour cause, cette plante est un OGM (organisme génétiquement modifié) qui suscite bien des inquiétudes dans notre monde partagé entre le désir d’aller de l’avant dans la recherche scientifique et la nécessité d’observer une éthique sociale et sanitaire».

D’où le titre «Regrowing Eden» de cette performance qui s’interroge sur la possibilité d’un retour à un univers paradisiaque et à une nature non manipulée, de fraîcheur intacte. Préparée dans l’un des laboratoires de  l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zurich, cette performance, qui s’articule autour du thème «écologie et environnement», sera présentée en vidéo aux visiteurs  après le vernissage de l’exposition.

Une communauté de clonés

Comme tous les artistes  présents à Barcelone, Stüver et Wüthrich ont «pensé» leur création en dialoguant avec des hommes de science. «Chaque laboratoire avait pour mission d’orienter le regard de l’artiste qu’il accueillait et d’aider ce dernier à intégrer à son travail les nouvelles techniques scientifiques», précise Irène Hediger.

Travail original et inventif de Christian Gozenbach, Pablo Ventura, Sylvia Hostettler, Ping Qui, Claudia Tolusso… et  d’autres encore dont il est difficile de détailler ici les œuvres car il nous faudrait des pages et des pages. Un mot néanmoins sur la suite de cette exposition itinérante et différente d’un pays à l’autre, car les artistes exposés ne sont pas forcément les mêmes à chaque halte.

Après Barcelone donc, il y aura San Francisco (septembre-octobre 2011), avec six œuvres réalisées par autant d’artistes inspirés, dont Monika Codourey. Son concept nous plaît: une installation vidéo à multiples ressorts, qui exploite l’architecture sonore, l’interactivité, les jeux électroniques et le modèle 3D. Cette approche de la modernité, menée par Monika Codourey à l’Institut de psychologie de l’Université de Bâle,  s’est faite autour du thème «Exploration de nouvelles technologies».

Sa création s’appelle «Airport habitués». Un titre qui dit tout : les tics, les gestes, les réactions des voyageurs de tous bords qui se ressemblent de plus en plus dans leur comportement et forment à travers  le monde une communauté de clonés. Comme se ressemblent d’ailleurs les aéroports qui les accueillent, avec leur répartition des espaces, toujours la même: zone fumeur, salon VIP, galeries marchandes, etc.

«Un life style, voilà ce que dévoile «Airport habitués», résume Irène Hediger, qui se réjouit de faire connaître ces créations à la dimension universelle dans plusieurs continents.

Plusieurs haltes sont donc prévues jusqu’en 2013. «Think Art –Act Science» s’arrêtera à Lucerne (du 28 mai au 8 juillet 2011) avant San Francisco, comme on l’a dit. «Nous sommes actuellement en discussion avec d’autres partenaires et lieux d’exposition, en Suisse comme à l’étranger», indique Irène Hediger. A l’horizon, la Chine, l’Afrique du Sud, l’Egypte, l’Inde… C’est déjà un tour du monde!

«Think Art- Act Science», exposition à voir au Museum Art Santa Monica, Barcelone. Du 18 décembre au 15 mai 2011. Puis à Lucerne du 28 mai au 8 juillet 2011 et à San Francisco en septembre-octobre 2011.

L’exposition itinérante «Think Art- Act Science» réunit une quinzaine de projets artistiques (conçus entre 2007 et 2009) résultant d’une collaboration interdisciplinaire entre art et science

Les œuvres présentées ont été créées dans le cadre de résidences artistiques (d’une durée de 9 mois chacune), organisées par le programme Swiss-artists-in-labs.

L’exposition s’articule autour de trois thèmes: écologie et environnement, perception de l’espace, exploration de nouvelles technologies.

Chaque œuvre est présentée au sein d’un espace construit à l’image d’une molécule, invitant le visiteur à explorer de nouveaux modes de perception et d’interaction.

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