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Cinéma suisse sur les starting-blocks

Louise Szpindel dans le rôle de Sabine. Image tirée du film "Des épaules solides"

Genève, festival 'Cinéma tout écran': deux films suisses sont engagés dans la compétition, catégorie fictions internationales.

Parmi ceux-ci, un beau portrait d’adolescente intitulé «Des épaules solides», et signé Ursula Meier. Rencontre.

Le cinéma, sous nos latitudes, est désormais intimement lié à la télévision, aussi bien en matière de production que de diffusion. «Cinéma tout écran», dont c’est la huitième édition, a donc acquis un statut particulier, comme en témoigne la réalisatrice franco-suisse Ursula Meier:

«C’est un festival très important, parce que c’est une façon de démontrer qu’on peut faire un cinéma de qualité, un cinéma d’auteur à la télévision, que ce soit ici, en Palestine ou ailleurs. Sa nécessité est donc vitale»

«Des épaules solides», son premier long métrage de fiction, a été réalisé pour la collection «Masculin/Féminin» d’Arte, avec le soutien de la TSR. Pas de conflits d’intérêts?

«Ce n’est pas évident de travailler avec deux chaînes qui ont tout de même des visions très différentes. On parlait beaucoup de prime-time, de choses comme ça… Mais finalement, c’est moi qui me suis approprié le sujet, et chacun s’y est retrouvé, sans que ce soit un compromis pour autant».

Le quotidien d’une obsession

«Des épaules solides» est un portrait. Celui d’une jeune fille de 15 ans, Sabine (Louise Szpindel), qui, inscrite dans un internat sport-études, ne vit que pour sa passion de la course et plus particulièrement du 800 mètres.

Une passion qui la dévore au point de la faire se brouiller avec tous ou presque, y compris son entraîneur (Jean-François Stévenin).

«Aïe», se dit-on de prime abord. Un film sur la passion du sport, 95 minutes de muscles luisant sous l’effort, hymne à la ténacité et à la persévérance, cela va être long. Et on a tort: «Des épaules solides», est loin, très loin du cliché.

C’est le récit d’une crise personnelle que nous raconte Ursula Meier: «C’est une fille obsessionnelle, qui pousse son corps à bout, qui tyrannise les autres et qui se tyrannise elle-même.»

Car davantage que la compétition, c’est le corps qui est au cœur de son film: «J’avais vraiment envie de parler de ce que c’est que d’être une jeune fille qu veut devenir une sportive d’élite, avec la transformation que cela implique, la transformation d’un corps féminin en un corps masculin à un âge où le corps, de lui-même, est déjà en pleine mutation.»

«Je ne voulais pas parler du dopage, de choses remâchées, ajoute-t-elle. Mais vraiment du corps, de l’intimité du rapport avec son propre corps. La transformation, c’est un sujet dont on ne parle pas, un sujet presque tabou.»

Sportifs et comédiens, même combat?

Sabine se rêve l’égale des hommes, en matière de performance s’entend. Sabine est une tueuse, au sens arriviste du terme. Et Sabine se noie dans son égocentrisme.

Une attitude qui a amené Ursula Meier à un constat: «Il y a un parallèle très fort entre acteurs et athlètes. Beaucoup de ressemblance. Leur rapport au corps, le besoin du regard de l’autre. Sans le regard de l’autre, ni l’athlète ni le comédien n’existent. Parfois, j’avais l’impression de parler davantage du cinéma que du sport!»

Mais après avoir dépassé l’acceptable, Sabine reviendra à la réalité. Sans que le happy end en soit gênant, calibré ‘prime-time’… «C’est l’histoire d’une chute. Puis de quelqu’un qui se relève en acceptant sa féminité», constate Ursula Meier en souriant.

Compétition dans la compétition… «Des épaules solides» représente la Suisse dans le concours genevois, en compagnie d’un autre long métrage, «Dilemma» du réalisateur lucernois Tobias Ineichen. Beau film également. Verdict samedi dans la journée…

swissinfo/Bernard Léchot

Du 21 au 27 octobre se tient à Genève la 8e édition de «Cinéma tout écran»
Ce festival se consacre au cinéma de fiction produit par et pour la télévision
Quatorze films participent à la compétition internationale de longs métrages
Ursula Meier est née à Besançon en 1971, de parents suisse et français
Elle a suivi les cours de la section Images à l’ISEC à Paris, avant de poursuivre ses études de réalisation à l’IAD à Louvain-la-Neuve
Elle est l’auteur de plusieurs documentaires et courts-métrages

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