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Un «Toscan né au Tessin» qui aimait la vie

Giorgio Orelli en 1998. Keystone

Giorgio Orelli, auteur tessinois d’envergure décédé dimanche à l'âge de 92 ans, est considéré comme l'un des plus importants poètes lyriques de langue italienne de l'Après-Guerre. Il a travaillé à ses manuscrits jusqu'à la veille de son décès et nous avait confié en 2011 espérer «vivre le plus longtemps possible pour réaliser tous ses projets».

Giorgio Orelli était qualifié par son professeur, le philologue italien Gianfranco Contini, de «Toscan né au Tessin» pour sa maîtrise de la langue de Dante. Né le 25 mai 1921 à Airolo dans une famille catholique et conservatrice, Giorgio Orelli a étudié à l’Université de Fribourg avant de rentrer dans son canton. Jusqu’à sa retraite, il a enseigné la littérature à l’Ecole cantonale de commerce et au Lycée de Bellinzone.

Apprécié en Italie, où les médias lui ont rendu hommage lundi, Giorgio Orelli était bien connu en Suisse alémanique. Mais il a été traduit en Suisse romande en 1973 par Yvette Z’Graggen (Editions Rencontre/L’Aire), puis par les Editions Empreintes de Chavannes près Renens (Vaud) et Samizdat du Grand-Saconnex (Genève).

En Suisse germanophone, Giorgio Orelli s’est surtout forgé une réputation de traducteur des œuvres de Johann Wolfgang von Goethe. Lauréat du Grand Prix Schiller en 1988 et du Prix Chiara pour sa carrière en 2001, l’écrivain tessinois s’est aussi montré fin connaisseur de littérature italienne, en particulier d’Eugenio Montale, Ugo Foscolo et Dante Alighieri, par exemple en 1978 dans Accertamenti verbali.

Considéré comme un des plus grands poètes et essayistes de langue italienne de l’après-guerre, Giorgio Orelli est né le 21 mai 1921 à Airolo (Léventine).

Elève du philologue italien Gianfranco Contini (1909-1990), qui l’a qualifié de «Toscan né au Tessin», il a approfondi les oeuvres des grands auteurs de la Péninsule.

Il a aussi été un traducteur renommé de Goethe et d’Andri Peer.

Cousin germain de l’écrivain Giovanni Orelli (1928), il était père de deux filles et six fois grand-père.

Plutôt l’italien que le patois

Tout en étant né et en ayant grandi dans une famille tessinoise pure souche, Giorgio Orelli préférait écrire en italien plutôt qu’en dialecte tessinois: «Le dialecte est important, nous avait-il déclaré, mais les Tessinois qui prônent sa défense à outrance le font souvent parce qu’ils ne maîtrisent pas parfaitement l’italien!» Il a cependant reconnu qu’on peut en faire bon usage. «comme le poète milanais Carlo Porta qui écrivit de manière sublime dans son dialecte lombard».

A ce propos, le linguiste tessinois Alessio Petralli a aussi déclaré à swissinfo.ch: «Giorgio Orelli préférait l’italien au dialecte car il était très méticuleux dans sa recherche des termes exacts, il savait éviscérer les mots comme nul autre tout en pouvant être très transgressif.»

Fidèle à sa vieille Olivetti

Jusqu’à la fin de sa carrière, très peu de temps avant sa mort subite, Giorgio Orelli a tapé ses textes sur une de ses quatre machines Olivetti (marque italienne aujourd’hui disparue) car, disait-il, «je ne me suis jamais mis à la technologie moderne, que ce soit l’ordinateur, Internet ou le téléphone portable».

Son premier recueil de poèmes, Né bianco né viola (ni blanc ni violet) a été publié en 1944. Il a écrit la plus grande partie de son œuvre en vers et n’a publié que deux livres en prose, dont Un giorno della vita (un jour dans la vie) en 1960. Epuisé entretemps, le recueil va être réédité en version bilingue en décembre par Limmat Verlag de Zurich.

«Giorgio Orelli a écrit jusqu’à ses derniers jours, en parfaite lucidité, rapporte Magda Mandelli, attachée de presse des Editions Casagrande de Bellinzone. En 2012 nous avons publié son recueil La qualità del senso. Su Dante, Ariosto e Leopardi, et un Abécédaire rédigé en collaboration avec le poète et critique Yari Bernasconi sortira de presse en 2014.»

Adieu au poète du post-hermétisme

Giorgio Orelli a donc su cultiver l’art de la longévité. Malgré son physique agile, son regard vif et sa répartie facile, l’écrivain nous avait confié qu’il n’avait pas toujours eu une santé de fer: dans sa jeunesse notamment, il avait frôlé la mort à quelques reprises, comme à 5 ans, à la suite d’une péritonite. Le jour même de ses 90 ans, il avait reconnu avoir «bien vieilli, comme ces arbres multicentenaires qui continuent à sembler jeunes».

La mort de Giorgio Orelli a suscité une profonde émotion au Tessin et en Italie du Nord, où l’agence de presse Adnkronos a titré un «Adieu à Giorgio Orelli, le poète du post-hermétisme». Les funérailles de l’écrivain tessinois auront lieu mardi à Ravecchia, au-dessus de Bellinzone, où le poète vivait avec son épouse Mimma.

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