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La mode, taillée dans le tissu social

«Peau d'Housse», de Gaspard Yurkievich et Florence Doléac.

Inspirés des tendances esthétiques actuelles, stylistes, grands couturiers et plasticiens exposent leurs oeuvres au Mudac à Lausanne.

Vidéo, installations, bruits et odeurs explorent ici la mode à travers le corps humain, ses passions et ses répulsions.

Des phénomènes de mode plutôt que la mode. L’exposition «Dysfashional» présentée actuellement au Mudac (Musée de Design et d’Arts Appliqués Contemporains) à Lausanne, taille dans le tissu social son inspiration.

Ici, pas de vêtements exposés mais des oeuvres plastiques imaginées sous forme d’installations par dix grands créateurs internationaux (Martin Margiella, Antonio Marras, Grit & Jerszy Seymour, Gaspard Yurkievich…) imprégnés du pop art et de l’hyperréalisme.

Videos, sculptures lumineuses, objets, bruits, odeurs composent l’univers des ces artistes. Leurs réalisations répercutent les tendances esthétiques actuelles à travers les obsessions, les passions ou les répulsions de notre société marquée par l’idolâtrie du corps humain et sa commercialisation outrancière.

Des corps scotchés

Dénudé ou habillé, le corps est livré ici dans son intimité protégée ou, au contraire, surexposée. Pudeur d’un côté, luxure de l’autre, selon les créateurs. Pudeur martyrisante chez les grands couturiers Grit & Jerszy Seymour, par exemple, qui, dans une vidéo, sanglent leurs mannequins dans des robes serrées près du corps avec du scotch. On dirait un attirail carcéral.

Silhouettes de femmes empaquetées, donc, par opposition à celles plus aérées des danseuses du Crazy Horse. Lesquelles semblent avoir inspiré les défilés d’un autre grand styliste de mode, Gaspard Yurkievich (ancien assistant de Jean-Paul Gautier). Ici, jarretières et jambes en l’air chauffent les instincts au même titre que cette curieuse installation, immense cube lumineux fait de néons fluorescents et incandescents. Y entrer signifie se brûler.

Si certains accès sont à éviter, d’autres en revanche sont à recommander. Les orifices du corps étant nombreux, ils sont ici sollicités avec vulgarité ou humour, selon les créateurs là aussi.

Vulgarité pour toutes les images qui font le grand saut dans la chair et touchent au porno. Humour, en revanche, pour la meilleure pièce (à notre sens) de cette exposition, intitulée «The In-Betweens» et signée Sissel Tolaas (Norvève).

Un air frais et divin

Entrons donc dans cette pièce odorante. Deux grandes cartes géographiques de Paris et de New-York sont posées contre deux murs qui se font face. Ceux qui connaissent les deux villes et leurs effluves du métro ou des vendeurs de hot-dog seront ravis de noyer la puanteur de leurs souvenirs olfactifs dans le parfum diffusé par les deux cartes.

Il suffit donc de coller son nez contre l’une et l’autre pour respirer un air frais et divin. Quel rapport avec la mode, diriez-vous? Un rapport ludique, pourrait-on répondre. Paris et New-York s’exposent ici comme un patrimoine culturel à réinventer à partir de sensations personnelles qui échappent aux parfums formatés d’Yves Saint-Laurent ou de Calvin Klein, et à ceux plus écoeurants de la rue.

swissinfo, Ghania Adamo

«Dysfashional», exposition à voir au Musée de design et d’arts appliqués contemporains (MUDAC) à Lausanne, jusqu’au 8 juin.

Inauguré en 2000, le Mudac est installé au pied de la cathédrale de Lausanne, dans la «Maison Gaudard», du nom du bailli qui donna vers 1760 son aspect définitif à cet ensemble de constructions datant du Moyen-âge.

Il se consacre au design, défini comme «esthétique industrielle appliquée à la recherche de forme nouvelles et adaptées à leur fonction (pour les objets utilitaires, les meubles, l’habitat en général)» et aux arts appliqués, ou «arts à vocation utilitaire».

Outre la présentation des collections permanentes, le programme des expositions temporaires se veut riche et diversifié, avec trois à cinq grandes manifestations par an et une série de plus petites expositions présentent le travail de créateurs agissant dans, ou à la frontière, des domaines du design, du graphisme, de la communication visuelle et des arts appliqués.

Le Mudac a pour ambition de «favoriser les jeux de croisements, d’aller-retour et d’interrogations sur l’usage, le message et l’esthétique des créations contemporaines».

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