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Le Musée Barbier-Mueller dévoile quelques arcanes des masques africains

Après avoir sillonné l’Europe, une somptueuse exposition s’arrête à Genève. «L’autre visage» explore la complexité du masque, d’une rive à l’autre du continent noir.

Après avoir sillonné l’Europe, une somptueuse exposition s’arrête à Genève. «L’autre visage» explore la complexité du masque, d’une rive à l’autre du continent noir.

Il y a, d’abord, menaçant comme un glaive dressé, ce rare cimier bansonyi de Guinée. Haute de plus de deux mètres, scintillant d’éclats de verre, cette sculpture incarnant l’esprit d’un serpent n’a rien pour rassurer le visiteur. Elle est une des surprenantes apparitions réunies au Musée Barbier-Mueller autour du thème du masque, cet «autre visage».

Un tiers environ des 250 pièces initialement présentées à Munich ont trouvé place dans le musée genevois – l’ensemble faisant l’objet d’un riche catalogue. Issues d’une centaine de groupes ethniques, elles dessinent sur le continent noir une large ceinture s’épanouissant d’ouest en est, de Gambie au Mozambique, et des Diola aux Makondé.

Lié à des mythes dont le souvenir est parfois vacillant – quand on ne l’a pas délibérément réduit au silence – le masque apparaît comme l’intermédiaire entre l’homme et les esprits, entre l’intangible et l’ici-bas. Il est habituellement associé à un costume, celant entièrement le corps, et à la danse, susceptible de conduire à des états de transe. Le danseur, méconnaissable sous cet «autre visage», est alors possédé par l’esprit dont il a revêtu les attributs. Mais la fonction du masque est – comme ses formes – multiple; il intervient à des moments clés de la vie du groupe: deuils, naissances ou cérémonies d’initiation, pour rendre la justice ou lors de rites propitiatoires.

Pourtant, la démarche du collectionneur est aux antipodes du projet «ethnographique» dont on débat à quelques pas. Il est ici question de beauté, d’une beauté étrange, souveraine et atemporelle – de celles qui n’ont nul besoin de gloses de sept lieues pour s’éclairer.

Certaines pièces témoignent du reste de l’éveil des sensibilités occidentales aux arts dits premiers: l’exposition recèle ainsi le fameux «visage d’Etumbi» (Congo), dont on crut longtemps qu’il servit de modèle à Picasso pour ses «Demoiselles d’Avignon». Ou encore le masque «pibibuze» en cœur (Kwélé, Gabon), qu’aima Tristan Tzara: une merveille de stylisation et de pureté, bosselée et patinée par les ans.

Véronique Zbinden

Genève, Musée Barbier-Mueller, 10, rue Calvin: « L’autre visage – Masques africains», tous les jours de 11 à 17h. Jusqu’au 15 septembre.

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