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Le point de vue de Charles-Henri Favrod

Charles-Henri Favrod et la «passion politique» swissinfo.ch

L'ancien patron du Musée de l'Elysée à Lausanne est le président du jury de la section «Documentaires en compétition».

Regard sur le festival, et sur les temps étranges que nous traversons.

Charles-Henri Favrod, homme de mots, homme de photos, mais homme d’images en mouvement également: il produisit notamment «Le Chagrin et la Pitié», de Marcel Ophuls, en 1970.

Il réalisa également de nombreux documentaires, dont plusieurs portraits d’hommes politiques – Hailé Sélassié, Sadate, Dayan, Amin Dada, Khadafi, Bourguiba, Mitterrand…

Charles-Henri Favrod œuvre donc comme président du jury, aux côtés de deux réalisateurs, André Gazut et Samir. En tant que membre du jury, comment regarde-t-on les films du Sud, alors qu’on est plutôt habitué à des œuvres occidentales rythmées et formatées?

«Il faut s’adapter à la lenteur du récit, à la répétition. Certains réalisateurs pourraient tenir leur sujet beaucoup plus en main qu’ils ne le font. Mais au vu de la difficulté que représente le montage d’un film, il y a chez certains la volonté de tout dire, de tout faire, tout rassembler…»

«Passion politique»

Charles-Henri Favrod parle de films de «passion politique». Et évoque notamment le cas «Jénine… Jénine», de Mohammed Bakri. Il ne l’a pas encore vu, mais a son point de vue sur «l’affaire» que sa projection suscite: «Un documentaire n’est pas nécessairement un reportage équilibré. C’est un témoignage à la première personne.»

Et d’ajouter: «Le mot propagande est extraordinaire. Pour une fois, les Palestiniens ont la parole. Pour une fois, ça n’est pas les télévisions étrangères qui filment les résultats du désastre quotidien. Il faut être très prudent avec le mot ‘propagande’, et singulièrement quand on est Israélien».

De l’écran à l’actualité

L’ancien journaliste a également été frappé par la présence réitérée du nom «Bush», que ce soit dans «Jénine… Jénine», dans le film argentin «Raymundo», ce martèlement d’un nom qui a également envahi notre quotidien.

«C’est très fort, soudain, cette apparition de Bush père, dont on sait le rôle dans les années épouvantables de l’Argentine, et de l’Amérique latine en général. Cela créée comme un sursaut. On est bien obligé d’inscrire ça dans une continuité de malheurs… j’ai presque envie de dire de maléfices.»

Lourdeur de l’époque, sentiment d’un monde qui se construit sans cesse sur l’injustice. Et pourtant, la planète, en ce début 2003, aura vu pour la première fois de son histoire le monde entier s’élever contre une décision politique. L’occasion d’espérer?

«Ce sursaut mondial, c’est certainement la véritable mondialisation. Nous avons là quelque chose de formidable. Un prodigieux refus de l’injustice», répond Charles-Henri Favrod, qui poursuit:

«La protestation n’a pas modifié l’état des choses. Mais pour la première fois, la protestation a entraîné le fait qu’une guerre se fait sans aval. Sans possibilité de dire ‘nous sommes autorisés’. C’est intéressant de faire des responsables de la guerre des gens en infraction internationale».

swissinfo, Bernard Léchot, Fribourg

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