Les médias prennent la vague du podcasting
Avec un temps de retard sur les Etats-Unis ou la France, les médias suisses commencent à proposer du contenu à télécharger sur baladeur numérique.
Simple d’utilisation et mobile, le podcasting ou baladodiffusion emporte le suffrage des consommateurs d’informations.
Aux Etats-Unis, les grands médias ont déjà fait le pas. Radios, télévisions, presse écrite, tous proposent «news» ou émissions à télécharger en toute autonomie, via Internet, sur baladeur (IPod). Et bientôt sur téléphone mobile.
Frère jumeau technologique du blog, le podcasting permet la diffusion de fichiers multimédias – son pour l’essentiel. Et laisse à l’utilisateur toute latitude de choisir quand et où il consomme. D’où l’appellation québécoise de «baladodiffusion».
Et déjà, selon les estimations, 6 millions d’Américains sont des utilisateurs réguliers. Dans le domaine des médias, très naturellement puisqu’il s’agit avant tout de fichiers son, les radios sont montées dans le train les premières. En Suisse aussi.
Les radios d’abord
La radio alémanique de service publique DRS offre désormais un contenu audio en podcast pour toutes ses émissions d’information. Et ce n’est qu’un début.
En Suisse romande, les radios locales de l’Arc jurassien ont joué les éclaireurs, suivies rapidement par la radio romande RSR (SRG SSR idée suisse), qui s’est lancée en mai 2005.
«Au départ, c’était une expérience, explique Alexandre Chatton, de rsr.ch. La réponse est claire: plusieurs milliers de ces podcasts sont consommés chaque mois».
«Puisque l’attente et la demande sont là, nous allons développer ce service. Exactement comment et jusqu’où? Nous ne le savons pas.»
Les pistes? Des contenus différents de ce qui est proposé à l’antenne. Compilations de revues de presse économique, sportive…
Un effet de mode?
Ce succès laisse tout même Alexandre Chatton un peu pantois. Car la RSR offre depuis huit ans un service de radio à la carte sur Internet (streaming) beaucoup plus complet.
«Effet de mode? Volonté de posséder le fichier en question pour pouvoir le transférer, l’écouter à loisir, l’envoyer? Toujours est-il que si la demande se développe constamment, nous envisagerons peut-être de remplacer le streaming par le podcasting.»
Soit dit en passant, adoptée aujourd’hui, cette solution poserait des problèmes de droits d’auteurs. Avec le podcasting, le consommateur devient en effet propriétaire du fichier (sur son disque dur).
La RSR contourne actuellement le problème (qu’il faudra bien résoudre un jour) en ne publiant pas de musique en fichiers baladodiffusion.
Prudemment, la presse écrite met, elle aussi, un pied dans le podcasting. Et c’est la frontière entre média écrit et audiovisuel qui flanche un peu plus.
Un test grandeur nature
Après l’hebdomadaire «Weltwoche» l’an dernier, qui propose un petit nombre de papiers choisis, la «Neue Zürcher Zeitung» vient d’achever un test grandeur nature d’une semaine.
La très institutionnelle gazette a offert sa page de résumé quotidienne en version audio. Et s’en trouve fort aise. «Il ne s’agissait que d’un test, mais très réussi. Les retours ont été très positifs», assure Andreas Häuptli, des éditions NZZ.
«Le podcasting ne remplacera pas l’écrit mais pourrait en être un bon complément», précise le Suisse alémanique.
Pour autant, la NZZ ne prévoit pas de lancer un service de baladodiffusion quotidien. Tout au plus envisage-t-elle des dossiers ponctuels.
En Suisse romande, le groupe Edipresse reste discret sur ses projets. «Avant de faire des annonces, il faut d’abord que nous trouvions l’outil de production et les vrais produits», justifie le directeur du département nouveaux médias et services.
«Extrêmement intéressant»
Mais Christophe Rasche confirme, «c’est un domaine extrêmement intéressant, qui offre des possibilités assez uniques pour un groupe médias».
Son et image pour pas (trop) cher, tout porte à parier sur une technologie qui pourrait rapidement sortir de son marché de niche.
«Chaque consommateur d’informations utilise 4 à 5 médias différents, constate Christophe Rasche. Si vous ne l’accompagnez pas à travers ces changements de marques à travers la journée, il est clair que vous n’avez plus votre place…»
Reste la question du coût. Si le podcasting est bon marché au niveau de la technologie, il n’entre pas dans le métier d’un journal comme la NZZ, qui est l’écrit. Il faudra donc trouver le moyen de financer les compétences requises.
Plutôt que l’accès payant, les éditions NZZ envisagent la piste de la publicité. A la RSR, Alexandre Chatton se demande si le podcasting ne suivra pas le modèle des journaux traditionnels sur le Net – entièrement gratuits au début, en partie payant aujourd’hui.
«Le tout gratuit ne va pas durer éternellement, estime en tout cas le journaliste. Ce genre d’offre, absolument incroyables pour le public, mais qui exige un travail, a un prix, qu’il faudra bien payer une fois.»
swissinfo, Pierre-François Besson
Podcasting vient de la contraction de IPod (le baladeur d’Apple) et broadcasting (la radiodiffusion).
Il permet de publier sur Internet des émissions son et vidéo. Et ce, sans grand savoir technique ni gros budget.
L’auditeur choisi des fichiers à partir de sources variées. Le téléchargement s’effectue automatiquement à partir de ses diverses souscriptions.
– La dépense médias des Suisses atteint en moyenne 3000 francs par an. Dont 20% pour l’achat des journaux et périodiques – 2500 titres sont imprimés et vendus en Suisse.
– Les médias électroniques se taillent la part du lion. Dans le domaine de la radio et la télévision publique (SRG SSR idée suisse) et des réseaux câblés, mais toujours plus aussi pour Internet (dépense privée de 1,5 milliard en 2004).
– Le podcasting attire des «offreurs» de tous acabits, y compris en dehors des médias – amateurs ou indépendants qui font se rappeler les belles heures de la radio FM. Les entreprises aussi utilisent ce canal pour faire leur communication (conférence de presse en VO).
En conformité avec les normes du JTI
Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative
Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !
Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.