Des perspectives suisses en 10 langues

Peter Gabriel, a swiss summer night’s dream

Peter Gabriel, le goût du spectacle total. Keystone

Sophistication et brutalité, rythmiques plombées et mélodies aériennes, le tout dans un décor se jouant des quatre dimensions. Avant les festivals de l’été, le «Still Growing up Tour» de Peter Gabriel faisait escale lundi soir au Hallenstadion de Zurich.

Certains rêves vous sont chevillés au corps… Voir Lorie en concert si vous avez 8 ans. Ou pouvoir inscrire Peter Gabriel dans l’agenda de votre festival si vous êtes programmateur et quadragénaire.

Ce fantasme-là, le Paléo Festival de Nyon le vit à l’occasion de sa prochaine édition, après de nombreuses années d’espoir déçu. Peter Gabriel chantera sur la plaine de l’Asse le 21 juillet. Et comme un bonheur ne vient jamais seul, la Piazza Grande de Locarno l’accueillera également quelques jours plus tôt, le 9 juillet.

Un spectacle pour le moins rodé… car après la tournée «Growing up», qui s’est étagée sur 2002 et 2003, le «Still growing up Tour» a joué les prolongations en 2004, avec une étape, lundi soir, au Hallenstadion de Zurich.

Plusieurs Peter Gabriel

Pour les uns, Peter Gabriel, c’est une vague réminiscence… le premier chanteur d’un groupe dinosaure des seventies, juste le prédécesseur de Phil Collins en quelque sorte. Pour d’autres, c’est un clip bizarroïde et déjanté qui, en 1986, martelait un tube dansant, «Sledgehammer».

Enfin, pour les fidèles, c’est une source permanente d’étonnement. Pas un album où la surprise musicale ne soit au rendez-vous. Pas une tournée où l’imagination ne soit résolument au pouvoir.

Pourtant, une fois de plus, l’apparition du bonhomme, ne laisse rien présager des grandeurs à venir. Petit, replet, vêtu façon bonze – quoiqu’il ait raccourci sa barbichette à tendance confucéenne – Peter Gabriel surgit alors que la salle est encore baignée de lumière.

Seul, il se met à son piano pour interpréter «Here comes the Flood»… en allemand (la langue de Goethe et de Nena, il la pratiquera d’ailleurs à chacune de ses interventions parlées).

Et puis, une fois le contact noué en douceur, clin d’œil nostalgique presque entre amis, la véritable aventure peut commencer.

Plein les oreilles…

Elle démarre sauvagement par le grondant «Darkness» qui ouvre le dernier album, «Up», et donne la tonalité du concert: alternance de violence brute et de mélodies ciselées.

Autour de Peter Gabriel, des compagnons de – presque – toujours (le guitariste David Rhodes et le monumental bassiste Tony Levin) et des nouveaux venus: le batteur Ged Lynch, le multi-instrumentiste Richard Evans, la claviériste Rachel Z et une choriste du nom de Melanie Gabriel… sa fille.

Un groupe à la polyvalence saisissante: déluge rock de «Red Rain», funky plombé de «Sledgehammer», ambiance technoïsante de «More than this» ou de «Digging in the Dirt», tempo martial de «Games without frontiers», climats moites et mystérieux récurrents.

Sans oublier la fascination africaine, qui caractérise un large pan de la trajectoire de Peter Gabriel. Une fascination concrétisée en fin de spectacle par la voix du chanteur mauritanien Daby Touré, neveu des Touré Kunda, qui, deux heures auparavant, accompagné de sa seule guitare acoustique, avait d’ailleurs brillamment ouvert la voie au Maître. «In Your Eyes» et «Biko» serviront de conclusion au concert.

… et plein les yeux

Les plus anciens se souviennent du vieillard de «The Musical Box». Ou de la chauve-souris de «Watcher of the Skies». Ou la fleur de «Supper’s ready». Si Peter Gabriel a abandonné depuis longtemps les costumes délirants, le goût des accessoires ne l’a pas quitté pour autant.

Dans une ambiance de messe sombre à l’imagerie parfois presque fascisante – lumières dramatisantes, costumes noirs, crânes rasés – Peter Gabriel se permet un tour de piste à vélo ou une balade, tête en bas, sur la grille des projecteurs qui domine la scène… Et soudain une ambiance de cirque ou de fête foraine remplace l’étrange sabbat.

Lors de la tournée précédente, «Secret World Tour» en 1994, la scénographie jouait de l’horizontalité grâce à deux scènes, l’une carrée et masculine, l’autre ronde et féminine.

Cette fois-ci, la scène circulaire est au centre de la salle. Un lieu tournant, dont la géographie est constamment modifiée par des hommes en combinaison orange, qui modèlent et remodèlent l’espace des hommes en noir – les musiciens.

Et la verticalité n’est pas oubliée, grâce à une immense structure qui, elle aussi, évolue: tulipe géante, pistil obscène, champignon atomique, haut-de-forme de magicien, à chacun de choisir…

Peut-être, lors des festivals open air de cet été, le gros de l’arsenal gabrielien ne sera-t-il pas de la partie. Mais on peut parier que la magie sera tout de même au rendez-vous. Et que, à la fin de l’hypnotique «San Jacinto», à la place des faisceaux des projecteurs, c’est la lumière des étoiles que Peter Gabriel recueillera dans sa main…

swissinfo, Bernard Léchot à Zurich

Après Zurich, Peter Gabriel sera en concert à Locarno, Piazza Grande, le 9 juillet et au Paléo Festival de Nyon le 21 juillet.
Le groupe actuel est composé de Tony Levin (basse, stick), David Rhodes (guitare), Ged Lynch (batterie, percussions), Rachel Z (claviers), Richard Evans (flûtes, guitares), et Melanie Gabriel (chœurs).

– Peter Gabriel est né le 13 février 1950 à Londres.

– Il s’est fait connaître au début des années 70 en tant que figure de proue du groupe Genesis, formation qu’il quitte en 1975 après la tournée de «The Lamb lies down on Broadway».

– Dès cette date, il entame un parcours solo qui se traduira par des albums éminemment inventifs. En terme de succès, il atteint le sommet de sa popularité en 1986 avec «So», qui contient le tube «Sledgehammer». Outre un double CD de compilation, son dernier album, «Up», remonte à 2002.

– A côté de sa carrière personnelle, Peter Gabriel a énormément travaillé en tant que découvreur d’artistes du monde entier, à travers son label «Real World» et le vaste studio qu’il a créé dans le sud-ouest de l’Angleterre, près de Bath.

– En 1998, il a mis sur pied l’organisation Witness, dont le but est de fournir des archives vidéo sur les atteintes aux droits de l’homme. C’est en tant que représentant de cette ONG qu’il était d’ailleurs présent à la dernière édition du Forum économique de Davos.

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision